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Égypte : ce que veulent les Frères musulmans

 

Égypte : ce que veulent les Frères musulmans

 

La puissante confrérie religieuse d'Égypte est l'inspiratrice des mouvements islamistes, qui sont aux portes du pouvoir, de Rabat au Caire...

Repères.

Les islamistes vont-ils cueillir les fruits du Printemps arabe ?

Probable, alors que ni en Tunisie ni en Égypte, ils n'ont initié les révoltes qui ont fait tomber les régimes autoritaires et corrompus de Ben Ali et Moubarak. Ils ont pris en marche le train lancé par la jeunesse. En Tunisie en octobre, au Maroc la semaine dernière, ils sont arrivés en tête des législatives et vont diriger le gouvernement. En Égypte, ils revendiquent plus de 40 % des voix aux législatives de lundi et réclament le poste de Premier ministre.

Pourquoi sont-ils si puissants ?

N'ayant jamais gouverné, ils paraissent propres et neufs. Comme les libéraux égyptiens ou les sociaux-démocrates tunisiens... pourtant distancés dans les urnes. Leur force ? Leur ancrage ancien et méthodique, singulièrement en Égypte. Lancée par Hassan el-Banna en 1928, la Fraternité des musulmans s'est organisée dans chaque localité : une mosquée autour de laquelle s'agrègent une école et un club sportif. L'objectif était la diffusion de la morale, que Banna jugeait menacée par la tutelle britannique et par les élites occidentalisées. Dès les années 1940, les Frères essaiment. Le Hamas est leur rejeton palestinien. L'AKP du Premier ministre turc Erdogan ou la Fédération des organisations islamiques d'Europe (à laquelle adhère l'UOIF française) sont des héritiers plus lointains.

Pourquoi inquiètent-ils ?

L'histoire égyptienne est sanglante. Dès les années 1940, Banna crée une branche militaire, l'Appareil spécial, qui commet des attentats contre les intérêts britanniques et juifs. Cela vaut aux Frères d'être interdits en 1948. Le Premier ministre Mahmoud al-Nuqrashi est assassiné peu après... et Banna tué par un inconnu, sans doute lié aux services de sécurité.

Les Frères soutiennent le coup d'État des Officiers libres en 1952, mais se dressent contre Nasser lorsqu'il s'aligne sur l'URSS. Impitoyablement réprimés, les Frères se radicalisent en prison ; le poète Sayid Qutb théorise le jihad avant d'être pendu. Amnistiés par Sadate, bienveillant à leur égard, les Frères se retournent contre le Président, lorsqu'il signe la paix avec Israël, et l'assassinent en 1981. Sous Moubarak, la confrérie est interdite, ses activités tolérées.

Quel est leur programme ?

Leurs slogans ¯ « L'islam est la solution, le coran notre constitution » ¯ semblent appeler à la théocratie. Leur plateforme de 2007 préconisait qu'un comité de religieux valide les lois adoptées au Parlement. Elle excluait qu'un chrétien ou une femme accède à la présidence. Mais l'aile modérée préconise seulement que la charia soit « la source principale de la loi »... ce qui figure déjà, noir sur blanc, dans l'actuelle Constitution.

Les islamistes se sont acclimatés aux réalités locales. Au Maroc, le Premier ministre Benkirane exclut d'instaurer la charia. En Turquie, l'AKP au pouvoir depuis 2002 siège en observateur au Parti populaire européen, qui fédère les démocrates-chrétiens, dont l'UMP. Loin d'avoir abrogé la laïcité, Erdogan a recommandé aux Égyptiens de l'adopter lors d'une récente visite au Caire.

Bruno RIPOCHE.

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