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Avoir peur: la nouvelle norme? Par Simone Uzan Joseph

Avoir peur: la nouvelle norme? Par Simone Joseph Uzan

 

 

Le journal juif local, à Los Angeles, cette semaine titre sur sa couverture "The New Normal" (traduisez"La nouvelle norme") avec en fond d'images,  des roses blanches et des photos des victimes de l'attentat de Nice. 

 

Je n'arrive pas à croire, voire accepter, que nous devons vivre apeurés. Je ne veux pas accepter que nos libertés acquises, soient maintenant, mises à l'écart , car une nouvelle armée de tyrans fous, se met à semer la terreur et conquérir les plus grandes villes occidentales. 

 

Il y a quelques années, nous étions en vacances en Israël. C'était tristement l'époque de la deuxième intifada : Israël se réveillait quotidiennement avec des attentats, et le rythme de nos sorties, était tous les jours remis en question. Devrions-nous manger dehors? S'amuser, aller à la plage? Les images omniprésentes nous faisaient réfléchir, en américains apeurés que nous étions (et sommes encore.)

 

Autour de nous, les Israéliens et locaux étaient attablés à la terrasse des cafés, ou allongés sur les plages : la vie continuait. Les funérailles, pleurs et moments d'épouvante avaient laissé place à la vie. On re-sortait, on revoyait les amis, en un mot, on avait claqué la porte à la tristesse et ré-ouvert celle de la joie et des éclats de rire.

 

Bon, peut-être que beaucoup avaient sûrement des paroles amères au début mais j'avoue avoir entendu la vie reprendre son cours normal, un peu partout. En un mot, le pays paralysé il y a quelques heures, s'était levé d'un pied ferme et avait rejeté l'ennemi, en occupant tous les endroits publics. Comme un pied de nez à l'ennemi...

 

La peur au ventre, je me souviens avoir traversé  le marché arabe à Jérusalem, en chuchotant non-stop à mon mari "let's go, let's leave" (partons, quittons cet endroit.)

Il est vrai, que quelques semaines auparavant, des touristes s'étaient faits poignarder dans ce lieu précis.  Malgré la présence de soldats, je n'étais pas à l'aise. Je relisais dans ma tête les titres des journaux de l'époque et imaginais même le titre "une américaine poignardée en plein coeur du marché à Jérusalem." Nous sommes rentrés à l'hôtel sans aucun problème. 

 

Quelques jours après, nous fûmes réveillés par les nouvelles d'un attentat à Netanya, dans un centre commercial. Nous avions prévu ce jour-là de déjeuner (ou dîner) avec notre ami Yarek qui habitait Herzlya.  En quelques minutes, nous avions décidé d'annuler notre rendez-vous et de rester cloitrés à l'hôtel. Nous avions même pensé, pendant quelques heures, à rentrer illico presto à San Francisco où nous demeurions. 

Nous appelâmes Yarek pour confirmer notre annulation et il éclata de rire "...donc à chaque fois que nous vivons quelques heures de terreur, vous croyez que nous allons rester chez nous, cloîtrés dans nos maisons ? Mais voyons c'est la vie ici, c'est rien. On est habitués, allez" ajouta-t-il "ne jouez pas les touristes apeurés, juste venez ! Je vous attends."  En quelques instants nous changeâmes d'avis et prîmes la route pour Herzlya. 

 

La vague de terreur qui s'abat sur le monde est en train de créer un climat de panique général. Une amie me textait hier soir "J'ai très peur de voyager." J'avoue ne pas être la plus courageuse dans les avions mais je ne veux pas que ces nouveaux barbares gagnent la bataille contre notre liberté de circuler, de s'amuser ou de voyager. 

 

La vie doit continuer malgré les tueries presque hebdomadaires autour du monde. Doit-on éviter toute sortie? Doit-on laisser les principales chaînes de télévision décider de nos mouvements journaliers. Car vous l'avez compris, ce déroulement d'informations en boucle sur les chaînes américaines ou autres, nous tétanisent.

 

En un mot, refuser de vivre, de s'amuser, de jouir de tous les plaisirs de la vie, est notre raison d'être sur terre.  La peur que tout s'achève (par notre disparition, employons les mots justes) nous paralyse. 

 

La vie c'est maintenant, chaque moment. Je ne suis pas superstitieuse, je ne porte ni poisson ni hamsa (tous deux ayant un pouvoir d'éloigner "le mauvais oeil") mais je crois au mektoub "notre destinée". Et tant que nous sommes sur terre, rions fort, sortons, amusons-nous car si nos ennemis pensent que la mort est l'ultime bonheur, ce n'est sûrement pas notre philosophie. Restons prudents mais ne laissons pas la peur nous envahir : en un mot ne les laissons pas gagner. 

Simone Uzan Joseph

Los Angeles. 

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