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Ce qui doit être dit à Günter Grass, par Pol-Serge KAKON

Ce qui doit être dit à Günter Grass

 

 

“Ce qui doit être dit’, c’est le titre du prétendu poème en prose dans lequel l’écrivain allemand Günter Grass reproche à Israël de proclamer sa capacité à se défendre par une attaque préventive contre l’Iran.

 

Et il écrit : “C’est le droit affirmé à la première frappe susceptible d’effacer le peuple iranien…”. Il va vite en besogne, ce monsieur, ou peut-être s’impatiente-t-il ?

 

Pourtant il sait bien qu’Israël ne penserait même pas à ces vilaines choses si le chef du gouvernement iranien ne cessait de clamer son souhait de rayer Israël de la carte du monde. Là, on a l’impression que Günter Grass, s’impose de tenir le propos israélien pour grave et les imprécations comme les menaces iraniennes pour des vétilles. Un poids et démesure en somme.

 

Il sait combien l’aveuglement ou la haine ont pu conduire à la mort de millions de personnes, il le sait d’autant plus qu’il a reconnu, de lui-même, avoir servi Hitler dans la Waffen SS. Cela aussi devait être dit. Mais déplorablement Günter Grass a attendu soixante-deux ans, l’année 2006, pour révéler son engagement dans la 10e Panzerdivision Frundsberg des Waffen SS en 1944.

 

Ce qui aurait pu n’être pas dit, Grass, s’en est gargarisé au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 en déclarant que “La réaction américaine orchestre beaucoup de tapage pour trois mille Blancs tués”.

 

Pas grand-chose en somme, quand on “haine” on ne compte pas. Voudrait-il ainsi faire payer à tous les Blancs de la terre la “faute” de ses pères et de sa jeunesse : la shoah dont Israël est l’intraitable témoin ? “Personne ne témoigne pour le témoin” a écrit le grand poète juif de langue allemande, Paul Celan, dont Günter Grass se disait l’ami.

 

Pour prospérer sur le dos de ces conflits entre Sémites, quelques intellectuels de gauche et de droite ont besoin d’attiser la surenchère verbale en jetant sur le feu leur humanisme de circonstance. Günter Grass est pareil eux, mais comme eux, il se trompe, parce qu’israéliens, palestiniens, iraniens savent jusqu’où ils peuvent aller trop loin-ce que les peuples de l’Europe n’ont pas toujours su faire-.

 

Y aurait-il chez lui quelque coupable réminiscence due à ce syndrome de Stockholm qui lui a attribué le Prix Nobel en 1999, sans rien savoir de son passé ? Peut-être qu’au fond quelque chose de Macbeth obsède la plume de cet homme : “Reste toujours l’odeur de sang ». On aurait envie de lui souffler : « Tous les parfums de l’Arabie n’adouciront en rien le soupçon de votre antisémitisme voilé, ni le désaveu de l’Allemagne qui flotte sur vos vieux jours ».

 

Voilà ce qui doit lui être dit.

 

Pol-Serge KAKON - Ecrivain

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