Comment les Sud-Coréens sont devenus fous du Talmud
Le livre religieux est un véritable best-seller là-bas.
En 2011, l’ambassadeur de Corée du Sud à Tel-Aviv avait crée la surprise lors d’une émission de la télévision publique israélienne. «Je voudrais vous montrer ceci», avait-il lancé en sortant un livre blanc avec un dessin d’un personnage biblique en tunique.«Chaque famille coréenne possède au moins un exemplaire du Talmud. Les mères veulent savoir comment tant de juifs sont devenus des génies. (...) 23% des Prix Nobel sont juifs. Les femmes coréennes veulent connaître le secret. Et elles l’ont trouvé dans ce livre.» Intrigué par cet épisode alors que le pays est majoritairement catholique, puis bouddhiste, un journaliste du magazine The New Yorker a mené l’enquête sur cette passion sud-coréenne, dans un article traduit par Books ce mois-ci.
Et son papier ne cesse d’étonner. L’histoire a commencé il y a presque un demi-siècle, lorsqu’un rabbin américain aujourd’hui âgé de 78 ans, Marvin Tokayer, fut envoyé au Japon. Là, il rencontra un auteur, qui, fasciné par sa capacité à conseiller toutes sortes de gens, le mis en relation avec un éditeur pour écrire une version simplifiée du Talmud. L’ouvrage connut un certain succès dans les années 1970 et fut piraté dans la foulée par des maisons d’édition sud-coréennes.
Mouvement culturel
Il a fallu attendre la fin des années 2000 pour qu’une version officielle soit enfin diffusée:
«Tokayer n’arrive pas à croire qu’un livre écrit par lui voilà quarante-cinq ans au Japon ait connu un énorme succès en Corée du Sud, et que ce soit celui-là même que l’ambassadeur ait mentionné à la télévision israélienne. Mais chaque nouvelle conversation et chaque nouvelle visite de librairie dans ce pays confirment clairement que Tokayer a, sans le savoir, contribué à lancer un mouvement culturel à des milliers de kilomètres.»
Le livre est désormais partout à Séoul. Plus de 80% de la population l’a lu, estime un patron de presse. Un professeur de pédagogie pense même que toutes éditions confondues, le talmud serait le deuxième best-seller du pays après la Bible. Un champion de patinage le recommande régulièrement à ses fans: «Je le lis chaque fois que je traverse une mauvaise passe, a-t-il confié à des journalistes, cela m’apaise.»
Mais certains ultraorthodoxes ne voient pas les choses du même œil, estimant que «le Talmud –le vrai– interdit explicitement l’enseignement de son contenu aux non-juifs». Pas de quoi arrêter la folie des Sud-Coréens pour leur nouveau viatique.
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