En Israël, la coexistence entre Juifs et Arabes remise en cause ?

En Israël, la coexistence entre Juifs et Arabes remise en cause ?

Par Isabelle Puderbeutel 

Les récents attentats, commis presque tous par des Arabes israéliens, risquent-ils de porter atteinte à l'intégration des Arabes au sein de la communauté nationale ?

La vague de violence qui s'est abattue au cours des dernières semaines sur l'Etat d'Israël, menace l'équilibre précaire qui semblait s'être installé dans le pays entre Juifs et Arabes, la coexistence. Malgré leur sympathie pour la cause palestinienne, les Arabes paraissaient depuis quelques années de mieux en mieux intégrés dans le tissu de la vie sociale israélienne. Les récents attentats remettent-ils en cause ce rapprochement ?

 « Nous sommes déchirés, vraiment déchirés, déclare un restaurateur de Nazareth. D'un côté, nous souffrons des atteintes répétées d'Israël au statu quo à la mosquée Al-Aksa et de la situation de nos frères palestiniens ployant sous le joug de l'occupation. Mais par ailleurs, la plupart des Arabes israéliens sont des citoyens respectueux de la loi qui veulent mener une existence calme et sereine aux côtés de nos voisins juifs ».

Les relations entre Juifs et Arabes en Israël ont connu leur plus grave crise en 2000 lors des émeutes qui ont accompagné le déclenchement de la seconde Intifada, au cours desquelles neuf Arabes ont trouvé la mort. Il avait fallu beaucoup de temps pour reconstituer le tissu des rapports entre les deux communautés, remis en cause de façon plus légère à plusieurs reprises : affrontements entre Juifs et Arabes à Akko en 2008 et mouvements de protestation lors des opérations israéliennes dans la bande de Gaza.

 Les Arabes israéliens représentent environ 20% de la population israélienne. Ils sont concentrés dans plusieurs régions : le nord du pays, Jérusalem, le Néguev, qui compte une importante population bédouine, et certaines villes mixtes comme Haïfa, Ramleh et Lod.

Les progrès de la cohabitation sont particulièrement notables à Jérusalem où Juifs et Arabes se côtoient partout, dans les rues, le tramway et les bus, mais aussi dans les magasins et les supermarchés, où l'on trouve de plus en plus de clients, de vendeurs et de caissiers arabes, hommes et femmes. Les Arabes que l'on rencontre dans la capitale n'occupent pas que des emplois subalternes. Beaucoup de pharmaciens sont arabes. C'est le cas aussi du personnel médical qui compte de nombreux médecins et infirmiers arabes.

Les Arabes israéliens représentent environ 20% de la population

Une très grande partie de cette population souhaite le maintien du calme et du statu quo. Selon un récent sondage, 52% des habitants arabes de Jérusalem préfèreraient la citoyenneté de l'Etat hébreu. Dans le Nord, les commerçants arabes se désolent de la fuite des clients juifs qui ne viennent plus faire leurs emplettes chez eux. 

Qu'est-ce qui a bouleversé cet équilibre ? Tout d'abord le choix du thème d'Al-Aksa comme principal argument de cette campagne. En transformant le différend entre Juifs et Arabes en guerre de religion, le Mouvement islamique israélien et les différents groupes palestiniens ont choisi un axe particulièrement mobilisateur. 

Le second élément expliquant cette flambée de violence est la place qu'y jouent les jeunes, moins sensibles aux considérations matérielles et galvanisés par la volonté de défendre les lieux saints. Ils sont mobilisés par les réseaux sociaux qui jouent un rôle sans précédent dans cette vague de violence. 

Enfin, la mobilisation des Arabes israéliens résulte aussi d'un choix tactique des Palestiniens et notamment de Mahmoud Abbas qui ne souhaite pas compromettre la position diplomatique de l'AP et préfère donc utiliser les Arabes israéliens et les habitants de Jérusalem-est pour frapper l'Etat hébreu. 

Un retour à la coexistence qui prévalait auparavant sera-t-il possible ? Ce n'est pas sûr car aujourd'hui la suspicion et la crainte mutuelle se sont installées entre les deux communautés. 

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