Fumer en public pendant le jeûne de ramadan est-ce un délit en Tunisie?
Selon la loi tunisienne, fumer en public pendant ramadan ne constitue pas un délit, affirme Me Habib Ben Youssef. Toujours est-il que cet acte n’est pas toléré socialement. Mais quid de la liberté individuelle?
Par Ali Ben Mabrouk
Le fait qu’un musulman n’observe pas le jeûne durant le mois saint est considéré par la plupart des musulmans croyants comme un acte illicite voire même un blasphème. Il est donc préférable pour tout musulman, durant le mois sacré, de ne pas manger, boire ou fumer en public durant les heures de jeûnes, car, durant ramadan, le jeûne peut provoquer, chez certains pratiquants, un état d’âme irascible et la moindre contrariété peut dégénérer en querelle verbale allant jusqu’à la violence physique. On remarquera cependant que lorsqu’il s’agit de touristes ou de personnes d’une autre confession qui boivent leur bouteille d’eau ou leur bière en public, ces mêmes musulmans pratiquants arrivent facilement à se contrôler et à oublier leurs frustrations.
Pourtant, quelle que soit la confession, ceux qui souffrent d’une maladie chronique ou encore les femmes enceintes sont appelés à ne pas observer le jeûne. Or, ces dispensés du jeûne s’obstinent la plupart du temps de pratiquer ce rite malgré l’avis défavorable du médecin, et si jamais leur état de santé ne leur laisse guère le choix, alors ils essaient d’être le plus discrets possible.
On remarque aussi chez les femmes diabétiques, qui doivent recevoir leurs doses quotidiennes d'insuline, matin et soir, il leur est pénible de se sustenter en présence de leurs proches, y compris leurs propres enfants. Idem pour les jeunes femmes qui doivent subir leurs contraintes menstruelles.
Et il y a ceux qui, pour une raison ou une autre, considèrent le jeûne comme le dernier de leur souci. Après tout c’est une affaire de croyance, et l’article premier de la constitution ne stipule pas que tous les Tunisiens doivent être des musulmans, ou qu’ils doivent observer le jeûne pendant ramadan.
Ce rite est donc une affaire de libre-arbitre et chaque musulman pratique (ou ne pratique pas) sa religion comme il l’entend. Reste que pour ceux qui n’observent pas le jeûne, la vie dans les pays musulmans pendant ramadan s’avère particulièrement difficile. Et pour cause: tous les cafés, pâtisseries, boulangeries et épiceries sont fermés le matin. Point donc de croissants chauds, de cafés crème ou d’expresso serré ou allongé! Une punition difficile à supporter par certains qui n’aiment pas déroger à leurs habitudes.
Aux dernières nouvelles les cafés et restaurants autorisés à ouvrir durant le mois saint n’ont pas le droit de servir les Tunisiens non-pratiquants. Désormais, il faut circuler avec un certificat médical en poche pour pouvoir grignoter un sandwich ou avaler une citronnade bien fraiche par ces temps de chaleur torride.
Toutes ces contraintes nous laissent penser qu’islam et libertés individuelles ne peuvent pas cohabiter dans un pays qui vient de sortir de 23 ans de dictature pour se doter d’un gouvernement dominé par un parti islamiste. Avec le projet de loi criminalisant l’atteinte au sacré que des députés d’Ennahdha s’apprêtent faire examiner par l’Assemblée nationale constituante (Anc), la fermeture des cafés et l’interdiction de servir les musulmans durant les heures de jeûne, entre autres signes avant-coureurs, annoncent-ils la mise en place progressive d’une nouvelle dictature de type iranien.
Fumer en public pendant le jeûne de ramadan est-ce un délit en Tunisie?
Commentaires
Publier un nouveau commentaire