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Hicham est parti faire le djihad en Syrie : "C'est comme si cette personne-là n'était plus mon fils"

Hicham est parti faire le djihad en Syrie : "C'est comme si cette personne-là n'était plus mon fils"

 

 

Par Thomas Prouteau

 

Son fils est parti mener le djihad en Syrie. Leila raconte la conversion rapide du jeune homme à l'islamisme et témoigne du "cauchemar" qu'elle vit au quotidien. Elle témoigne parce qu'elle veut éviter aux autres mères son calvaire. Leila ne dort plus depuis que son fils Hicham, 19 ans, a pris la route pour la Syrie afin d'y mener le djihad. Là où elle vit, à Vilvorde, en Belgique, elle est loin d'être la seule dans ce cas : trente garçons sont partis.

« Comme Hicham, ils sont plus d'une centaine de Belges à être partis combattre en Syrie, 113 en France selon les chiffres du ministère de l'Intérieur, plus de 600 à l'échelle européenne »

Leila, elle, ne comprend pas. Mère de quatre enfants, dans une famille parfaitement intégrée, elle n'aurait jamais pu imaginer un tel embrigadement. "La conversion de mon fils a commencé en avril quand il a commencé à prier, avant il ne priait même pas", explique-t-elle au micro de RTL. "Aller cinq fois par jour à la mosquée, ça, ça a été le grand changement."

À partir de là, il a suffi de quelques semaines. "On a fêté la fin du ramadan le 9 août", se souvient Leila. "Le mardi matin, quand j'ai vu qu'il n'était pas dans son lit, là j'ai su qu'il était parti. On a attendu 48 heures et on a contacté la police." Le surlendemain, Hicham envoie un premier message à sa famille, via Facebook. "On a dû insister et à la fin il nous a dit 'je suis en Syrie' et là le monde s'est écroulé", raconte Leila. "Mon fils jurait par dieu qu'il n'allait pas partir en Syrie,je ne le reconnais plus."

 

Leila a parlé deux fois à son fils depuis son départ

Elle lui parle par deux fois au téléphone. "La première fois, il m'a dit 'allô maman' avec un sourire, comme si de rien n'était", se rappelle-t-elle. "J'étais tellement fâchée. Je lui ai dit 'tu oses nous appeler avec le sourire jusqu'aux oreilles alors qu'on est tous par terre ici' et là je lui ai dit 'ne m'appelle plus jamais' et j'ai raccroché."

Hicham lui parle une seconde fois, grâce à l'intermédiaire de son frère. "Je lui ai parlé autrement, comme une mère parle à quelqu'un qui est parti faire la guerre", explique Leila. "Il m'a dit 'écoute maman, ne t'inquiète pas pour moi, je suis ici, je suis heureux'. Il m'a dit qu'il s'occupait un peu de la maintenance, donc il prépare à manger, qu'il n'avait pas encore reçu d’ordres de ses activités futures."

Sa mère tente de le convaincre de revenir. Hicham refuse. "Il m'a dit 'non maman, j'ai émigré, la démocratie c'est haram, c'est péché et je ne peux pas revenir, c'est à toi de changer'. 'Prie, lis beaucoup le Coran et c'est comme ça que tu vas guérir'", relate Leila. "C'est comme si cette personne-là n'était plus mon fils. Pour moi, il est devenu une machine qu'on a remontée et ils ne peuvent plus avoir de sentiment ni de compassion. Pour moi ils ont été lobotomisés."

 

Elle témoigne pour éviter d'autres départs

Elle se dit certaine qu'une organisation est derrière tout cela, avec des recruteurs. "Pour moi ce sont des manipulateurs d'une intelligence inouïe", estime Leila. En échec scolaire depuis plusieurs mois, Hicham a été approché dans un bar à chicha. "Je pense que ça a marché parce qu'il était fragile au départ et maintenant qu'il a trouvé quelqu'un qui s'intéresse à lui, qui le rend un peu comme un héros, je crois que pour lui, c'est la voie qu'il cherchait."

La mère de famille vit avec la culpabilité. "Je m'en veux parce que c'est comme s'il s'était sacrifié pour nous en disant je n'ai pas ma place, je vais la prendre ailleurs", affirme-t-elle. "Mon combat c'est de prévenir les gens. (...) Le radicalisme est très mauvais."

"Beaucoup de gens nous ont reproché d'aller voir la police. Même des parents dont les enfants sont partis en Syrie, en nous disant 'vous ne vous rendez pas compte, si jamais ils reviennent, ils vont être catalogués terroristes'", raconte Leila. "Je m'en fous, je veux revoir mon fils", balaye-t-elle. "Je veux que stoppe l'hémorragie de l'envoi de tous ces jeunes. Ils n'ont rien à faire en Syrie. Ce n'est pas notre combat. Pour nous, c'est un vrai cauchemar."

Comme Hicham, ils sont plus d'une centaine de Belges à être partis combattre en Syrie, 113 en France selon les chiffres du ministère de l'Intérieur, plus de 600 à l'échelle européenne. Pour les services anti-terroristes, l'éventuel retour en Europe - au sein d'un groupe terroriste - est devenu un enjeu majeur.

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