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Lola Bessis

 

Lola Bessis

 

 

 

Par Alexandra BOQUET |

 

 

A 23 ans, la jeune cinéaste parisienne d'origine Tunisienne vient de réaliser son tout premier long-métrage « Swim Little Fish Swim ». Celle qui débute avec le caméscope familial à l’âge de 14 ans parvient aujourd’hui à révéler en image sa vision artistique et optimiste du monde qui l’entoure. Un monde où le rêve et l’ambition sont nos seuls guides, au milieu d’une société renfermée et prévisible. Son destin, Lola Bessis ne le prévoit pas, elle se contente de le vivre, entre New York et Paris, portée par son amour pour le cinéma. Rencontre avec une solitaire dans l’âme qui sait pourtant s’entourer du meilleur pour réussir, transmettre et se laisser porter.

Dès l’âge de 14 ans tu as réalisé ton premier court-métrage. Le cinéma a toujours été une évidence pour toi?
Je n’ai pas toujours eu conscience de mon désir de faire du cinéma mais j’étais assez solitaire, et j’ai toujours aimé m’inventer des histoires dans mon coin, des vies parallèles. Quand j’étais petite, j’étais persuadée que je pouvais voler et que mon reflet dans le miroir était ma sœur jumelle… Elle s’appelait Valentine ! J’ai même essayé de fabriquer une machine à remonter le temps ! Comme j’étais assez timide, je me fabriquais une carapace en incarnant des personnages, c’est ainsi que le désir de jouer la comédie est né.

Mes parents ont toujours essayé de m’en dissuader en me disant que c’était un métier difficile qui pouvait être très déceptif car l’on dépend en permanence du désir d’autrui mais à12 ans, j’ai été repérée par hasard pour jouer dans un court-métrage. C’est alors que j’ai pris conscience de l’envers du décor, que j’ai découvert la machine de fabrication d’un film. Ce travail d’équipe m’a passionné et j’ai alors décidé de devenir réalisatrice pour ne dépendre de personne !

Un ami de mes parents réalisateur m’a alors dit qu’il ne me restait pas beaucoup de temps car il avait lui-même réalisé son premier film à 14 ans. J’ai donc piqué la home camera de mes parents et je me suis mise au boulot, sollicitant les compétences de toute ma famille le temps des vacances scolaires !

Aujourd’hui tu produis ton premier long-métrage Swim Little Fish Swim au coté de Ruben Amar. Comment s’y prend-t-on pour inventer la vie de personnages encore inexistants?
On s’est beaucoup inspirés de personnages existants justement ! J’observe beaucoup les gens dans le bus, dans la rue, c’est ma principale source d’inspiration. Et encore plus pour Swim car ce film s’est fait dans un contexte particulier. Le désir de faire un film de manière générale, quel qu’il soit, a primé sur l’envie de raconter une histoire en particulier. On avait très peu de temps – on a écrit le scénario en deux mois seulement – et on voulait que le travail avec les comédiens soit au centre de notre processus de création. Nous souhaitions donc que l’intrigue soit relativement simple afin de permettre aux comédiens d’y apporter d’eux-mêmes car nous avons choisi nos acteurs pour ce qu’ils sont dans la vraie vie. Etant donné la nécessité d’écrire une trame narrative dans un délai très court, toute source d’imagination étais la bienvenue : nos problème de visas, la relation qu’entretenait une amie avec son père artiste, un musicien loufoque qu’on a vu en concert, et surtout la ville de New York qui est l’un des personnages principaux du film !

Pourquoi avoir choisi le titre Swim Little Fish Swim?
Ce titre est une injonction à prendre au sens propre comme métaphorique. La petite fille dans le film a un poisson rouge et je ne vais pas révéler la fin à nos lecteurs mais cela pourrait tout à fait être une phrase qu’elle lancerait à son poisson dans le film.

En même temps, ce message s’adresse à tous les personnages qui sont comme enfermés dans un bocal, sous l’emprise de la pression sociale ou familiale et qui sont à un moment de leurs vies où ils doivent s’en affranchir pour voler de leurs propres ailes – ou plonger dans la big apple.

Le film parle d’univers artistiques. Quel regard portes-tu sur l’avenir de ce milieu?
C’est un milieu difficile, surtout en tant de crise,il n’est pas facile de gagner sa vie en tant qu’artiste mais je pense que paradoxalement, ce climat difficile est le déclencheur des plus belles œuvres, car il faut avoir quelque chose d’important à dire pour créer. Des études prouvent que la créativité artistique se développe davantage en temps de guerre ou de crise. Je m’intéresse beaucoup aux artistes contemporains et je trouve qu’il se passe des choses incroyables en ce moment surtout dans le domaine de la photo et de la vidéo, car on est une génération de l’image et c’est accessible à tout le monde ! J’ai récemment découvert un jeune photographe chinois incroyable : Ren Hang. J’aime beaucoup l’américain Ryan Mcginley aussi.

Tu partages ton temps entre Paris et New York. Que t’apporte ce rythme de vie? Te convient-il ou aimerais-tu parfois te poser?
Je suis amoureuse de New York, mais c’est ma ville d’adoption, de cœur. Mais la France reste ma mère-patrie et je me sens Parisienne même si je n’ai pas choisie de l’être et que je préfère New York pour plein de raisons. Ce sont deux rythmes et deux façons de travailler très différentes et complémentaires, j’aime donc être entre les deux pour prendre ce qu’il y a de mieux des deux côtés.

Décris nous une de tes semaines type.
Je n’ai pas de semaine type. Mes semaines varient selon les périodes et mes différentes casquettes. Certaines semaines je suis la réalisatrice-scénariste qui écrit dans des cafés ou prépare ses prochains tournages, d’autres la productrice qui recherche des financements et organise des castings. Je suis également la comédienne qui passe des castings et répète ses prochains films. Je suis aussi souvent à l’étranger pour la promotion du film en festivals,…

En ce moment je conjugue toute mes différentes activités et mes semaines sont très remplies, sans weekend et avec très peu d’heures de sommeil. Quand j’ai un instant de libre, j’en profite pour diner avec mes amis et voir ma famille.

Je suis à la campagne, sans rien d’autre qu’une télé et un lecteur DVD. Quels sont les cinq films que je dois absolument voir?
Le rayon vert d’Eric Rohmer – pour apprendre à gérer la solitude et à prendre goût à la campagne.
Où est la maison de mon ami de Kiarostami – pour retrouver son chemin.
Une femme sous influence de Cassavetes – pour comprendre comment ne pas sombrer dans la folie.
Portrait d’une enfant déchue de Jerry Schatzberg – Idem (oui, j’ai très peur de sombrer dans la folie !).
Annie Hall – pour rigoler et faire passer le temps afin de ne pas sombrer dans la folie.

Dans Swim Little Fish Swim, on remarque ton goût prononcé pour la mode. Quels sont tes trois looks fétiches?
Je n’ai pas vraiment de looks fétiches, j’aime bien varier. J’alterne entre des jours excentriques – j’aime beaucoup les couleurs chaudes, les motifs japonais, africains et floraux – et des jours plus sobres : jean taille haute, chemisier court vintage ou T-Shirt uni gris foncé avec des baskets ou des petites boots.

Quelles marques te séduisent?
J’adore Chanel et Prada ! J’aime aussi Miu Miu, Chloé, Valentino, Tsumori Chisato et une jeune marque californienne, Reformation, qui recycle des tissus vintage !

Quel est ton rituel beauté?
Dormir !

Un secret beauté transmis par quelqu’un de ton entourage?
Ma grand-mère m’a toujours dit qu’il fallait faire un grand sourire forcé pour se maquiller les pommettes, du coup j’ai toujours peur que quelqu’un me surprenne à faire des grimaces toute seule devant ma glace !

Quelle phrase a guidé ta vie?
Un proverbe africain que la bibliothécaire de mon collège m’a lancé un jour car je prétextais être pressée : « si tu n’as pas de montre, tu as le temps ». Ou encore une citation de Kennedy, toujours dans la même veine : « rien ne sert de tenter d’ajouter des années à sa vie, il faut mieux rajouter de la vie à ses années » !

Selon toi, quelle est la différence entre vivre et exister?
On ne choisit pas d’exister, de venir au monde, mais on choisit de vivre, de se rendre actif pour profiter de la vie.

Quelles activités te font perdre la notion du temps?
Le travail ! Écrire notamment.

Le meilleur remède contre un coup de mou?
Marcher au grand air !

Pour te calmer lorsque tu es énervée tu..?
Je prends un bain et je me lave les cheveux !

Que signifie pour toi « le rêve américain » ?
Mon expérience de l’Amérique en tous cas c’est que tout est possible si l’on s’en donne les moyens, ce n’est pas magique, mais les efforts payent ! Je pense que c’est transposable aux autres pays du monde mais c’est vrai que pour moi ça s’est passé à New York, c’est aussi mon inconscience qui m’a donné des ailes. Je me suis dit : « tu vas faire un film, l’écrire, le produire, le réaliser, jouer à l’intérieur, sans argent et sans temps ! » c’était extrêmement difficile mais près de trois ans après le tournage, je commence à récolter les fruits de mon travail, et ce sont de délicieux fruits !

Peux-tu décrire ta vie en un mot?
Agitée ! Belle, aussi ! Mais ça fait deux…

Swim Little Fish Swim, en salles le 4 juin.

http://www.newton-mag.com/lola-bessis/

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