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Pourquoi Netanyahu et Lieberman sont-ils ouverts au Plan de paix saoudien ?

Israël-Arabie saoudite Il en est énormément question dans le monde arabo-musulman

Pourquoi Netanyahu et Lieberman sont-ils ouverts au Plan de paix saoudien ? (info # 010506/16)[Analyse]

Par Guy Millière ©MetulaNewsAgency

 

Quand Binyamin Netanyahou a décidé de conforter la majorité dont il dispose à la Knesset en confiant le poste de ministre de la Défense à Avigdor Lieberman, divers commentateurs, jusqu’au Département d’Etat américain, ont souligné, sur un ton qui frôlait l’indignation, qu’Israël se dotait du gouvernement le plus à droite de son histoire. Certains esprits malveillants ont parlé de bellicisme israélien et s’apprêtaient à faire déferler des attaques d’une intensité redoublée. Yitzhak Herzog, furieux et dépité, songeait déjà à des stratagèmes pour faire tomber Netanyahou.

 

Et les choses ne se passent pas comme prévu. Binyamin Netanyahou se déclare non seulement ouvert à des négociations, mais prêt à prendre pour point de départ le « plan de paix saoudien ». Avigdor Lieberman s’exprime peu ou prou de la même manière que Binyamin Netanyahu.

 

Cela peut surprendre et paraître constituer un mouvement de volteface suicidaire. Le « plan de paix saoudien » prévoit, de fait, une reconnaissance d’Israël par le monde arabe en échange d’un retrait d’Israël aux frontières de 1967 et d’un retour des réfugiés de 48, qui aboutirait à la disparition d’Israël.

 

Binyamin Netanyahou et Avigdor Lieberman sont-ils devenus fous ? Ont-ils glissé vers un gauchisme délirant ? La réponse est non aux deux questions.

 

L’un et l’autre partent de la situation telle qu’elle est et usent de l’art diplomatique pour répondre à celle-ci. Ils savent que la France est en train de manœuvrer contre Israël et, au-delà de la conférence internationale du 3 juin dernier à Paris, qu’elle persévérera au cours des prochains mois.

 

Ils savent aussi que la France prépare, de concert avec les dirigeants « palestiniens », un projet de reconnaissance d’un Etat palestinien par les Nations Unies. Ils ont constaté que l’Administration Obama, par le biais de John Kerry, a participé à la conférence de Paris, et ils supputent qu’ qu’Obama n’a pas nécessairement l’intention d’exercer le droit de veto dont disposent les Etats Unis lorsque le projet susdit sera présenté au Conseil de Sécurité. Ils ont conscience, en somme, de ce que des manœuvres féroces et sournoises contre Israël sont en gestation.

 

Ils ont aussi connaissance de ce que les régimes sunnites du statu quo (Arabie Saoudite et Egypte en tête) sont placés en position très inconfortable par le rapprochement des Etats Unis d’Obama et de l’Iran, qui entend, plus que jamais, se doter d’une position d’hégémonie régionale et d’une sanctuarisation nucléaire. Et Netanyahu et Lieberman n’ignorent évidemment rien des intentions de rapprochement tactique des régimes sunnites du statu quo avec Israël, puisqu’ils se trouvent au cœur de ce rapprochement tactique.

 

Ils savent que les régimes sunnites du statu quo ne peuvent afficher trop ouvertement ce rapprochement sans passer pour des traitres à la cause islamique, sauf si Israël procède à des gestes d’ouverture et fait mine de céder du terrain. Et le binôme a compris qu’il peut sembler céder du terrain sans rien céder en fait.

 

Ils savent surtout que les dirigeants « palestiniens » n’accepteront strictement jamais un « Etat palestinien » vivant en paix à côté d’Israël, reconnu par eux en tant qu’Etat juif, et n’abandonneront jamais la demande du retour des « réfugiés ».

 

Ils ne peuvent deviner ce que sera le résultat de l’élection présidentielle du mois de novembre prochain, tout en discernant que si le président qui entrera à la Maison Blanche en janvier 2017 s’appellera Donald Trump, le contexte deviendra plus favorable à Israël ; mais, en revanche, si le prochain président U.S se nomme Hillary Clinton (ou porte le nom de son remplaçant si elle est envoyée devant un juge), le contexte international restera très défavorable à Jérusalem.

 

Ils font dès lors preuve de toute la subtilité dont ils sont capables afin de désamorcer les manœuvres féroces et sournoises et les priver autant que faire se peut de leur pouvoir de nuisance. Qui pourrait prétendre placer Israël devant un fait accompli inique si Israël était en train de négocier ? Et qui pourrait dire qu’Israël, dans ces conditions, est fermé aux négociations ? Qui pourrait dire qu’Israël est fermé aux négociations avec les pays du monde musulman, si Israël négocie avec les régimes sunnites du statu quo, surtout si Israël prend pour point de départ le « plan de paix saoudien » ? Comment, enfin, les Etats Unis pourraient-ils ne pas exercer le droit de veto dont ils disposent au Conseil de Sécurité des Nations Unies dans ces conditions ?

 

Netanyahou et Lieberman entendent aussi poursuivre le rapprochement tactique avec les grands régimes sunnites et permettre à ceux-ci d’aller plus avant dans cette dynamique, sans se faire plus d’illusions que nécessaire.

 

Ils entendent maintenir les dirigeants « palestiniens » dans le rôle de ceux qui refusent la paix, car Netanyahou et Lieberman savent qu’ils n’accepteront jamais un Etat palestinien vivant en paix à côté d’Israël, reconnu par eux en tant qu’Etat juif, et qu’ils ne céderont jamais sur la demande du retour des « réfugiés ».

 

Si le président américain à partir de janvier 2017 s’appelle Donald Trump, Netanyahu jouira de davantage de liberté de mouvement et de décision, et il pourra adopter un discours plus ferme. Si, comme cela reste très possible, c’est Hillary Clinton qui sera la prochaine pensionnaire de la Maison Blanche, les Israéliens auront pris les devants face à des manœuvres qui risquent d’être plus féroces et plus sournoises encore qu’elles ne le sont actuellement.

 

Dans le moyen terme, l’avenir pour Israël sera fécond : Israël continue d’être un vivier d’innovations et de dynamisme. Dans le court terme, Israël doit traverser l’orage, qui a grossi depuis l’élection de Barack Obama en novembre 2008, et qui n’a, depuis, cessé de s’abattre.

 

L’orage n’est pas passé. Binyamin Netanyahou s’est, depuis l’élection de Barack Obama, révélé un excellent joueur d’échecs et a déjoué tous les pièges que l’Administration Obama lui a tendus. Il n’a jamais perdu de vue le moyen terme et a toujours su que, pour préserver le moyen terme, il lui fallait traverser l’orage et savoir jouer aux échecs. Avigdor Lieberman semble comprendre le jeu d’échecs.

 

Quant à ceux qui ne comprennent rien au jeu d’échecs, ils ne comprennent naturellement pas la partie en cours.

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