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Ramadan en Tunisie: des restos "momifiés"

Ramadan en Tunisie: des restos "momifiés"

 

Par Monia Ben Hamadi

 

Le Ramadan débute ce mardi 9 juillet et la question qui se pose pour certains "déjeûneurs" est la possibilité de fumer une cigarette, boire un café ou déjeuner dans un restaurant en journée en dehors de chez soi.

Le mois de Ramadan en Tunisie est une période pendant laquelle de nombreux restaurateurs et autres cafetiers modifient leurs horaires d’ouverture pour se calquer sur le mode de vie d’une grande partie de leur clientèle. C’est aussi l’occasion de prendre des vacances ou d'entreprendre des travaux de rénovation.

Mais quelques irréductibles "gaulois" et leurs indécrottables clients préfèrent maintenir leurs horaires habituels quitte à froisser une partie de leurs concitoyens.

Une entrée furtive, cachés par des journaux déchirés, derrière un nuage de fumée dû au manque d’aération, le "déjeûneur" tente, tant bien que mal, de mener une vie normale. Les principaux cafés de la capitale restés ouverts en journée affichent souvent complet.





Malgré cette discrétion, le premier jour du mois de Ramadan 2012, les forces de l’ordre ont été réquisitionnées pour fermer certains lieux de restauration, notamment à Ennasr.

Selon les témoignages recueillis alors, auprès des clients et des restaurateurs, les policiers agissaient sur ordre du gouverneur de l’Ariana, sur la base d’une circulaire qui existait déjà avant la révolution. Réagissant à ces accusations, le gouverneur en question, Baha Eddine Baccari, avait affirmé à l’agence TAP, qu’il ne s’agissait que de "mises en garde" visant à faire appliquer une circulaire du ministère de l’Intérieur. Celle-ci interdit "la vente de boissons et de produits alimentaires de manière ostensible et sur les devantures des commerces, par respect pour les citoyens qui font le jeûne, durant le mois de Ramadan", et ce dans les zones touristiques ou dans les quartiers dits modernes. Cette circulaire précise également la fermeture des cafés et restaurants dans les quartiers populaires, entre le début et la rupture du jeûne", selon des sources sécuritaires citées par la TAP.


"Une circulaire est le premier échelon dans la hiérarchie des normes et concerne l’application d’un texte qui lui est supérieur", explique l’avocat Nawfel Saïed dans une déclaration au HuffPost Maghreb. "Pour la circulaire qui nous intéresse, nous ne savons pas sur quoi elle est appuyée », poursuit-il, ajoutant que, généralement, une circulaire n’est pas publiable, s’agissant d’un document interne à l’administration.

Selon Me Saïed, le danger consiste dans le paradoxe entre le caractère efficace et immédiatement applicable de la circulaire et l’opacité qui l’entoure. Laquelle opacité rend difficile, pour l’administré, la vérification de la légalité du texte et l’assurance qu’il ne soit pas créateur de normes. "Encore faut-il qu’il y ait des règles transparentes connues de tous", déplore-t-il.



Pour Kaïs Berjab, avocat et militant pour la transparence, il s’agit souvent des mêmes pratiques que celles observées pendant l’ancien régime, des pratiques qui se basent plus sur la peur et l’intimidation, que sur le respect de la légalité. Me Berjab affirme que pour toute décision émanant des autorités, à l’endroit des administrés (en l’occurrence les restaurateurs), il faut qu’un procès-verbal soit établi. Or cela n’est souvent pas le cas, et les restaurateurs préfèrent se plier aux ordres des autorités que de "s’attirer des problèmes".



"Pour mettre la pression sur l’administration, il faut multiplier les procès", affirme Kaïs Berjab, un des initiateurs de la plainte contre l’Assemblée constituante en août 2012. "Le problème est que certains commerçants peuvent être dans l’illégalité sur d’autres aspects, ce qui permet aux autorités de maintenir la pression et l’intimidation. D’autres ont toujours aussi peur des forces de l’ordre et de ce qui symbolise l’Etat, ce qui les empêchera de faire valoir leur droit », ajoute, en substance, Me Berjab auHuffPost Maghreb.



Pendant le mois de Ramadan 2012, plusieurs lieux de restauration auxquels des « mises en garde » ont été adressées, ont pu rouvrir leurs portes, notamment suite à la pression médiatique exercée. Parmi eux, certains restaurateurs d’Ennasr, ayant requis l’anonymat, ont affirmé n’avoir reçu aucun document attestant la mise en application d’une quelconque circulaire…

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