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REPÈRES D’ARCHÉOLOGIE CHRÉTIENNE EN TUNISIE

REPÈRES D’ARCHÉOLOGIE CHRÉTIENNE EN TUNISIE[1]

 

Ce rapport pour les plus intéressés à l’archéologie, ne peut être qu’une brève énumération des nombreuses découvertes survenues pendant quinze ans en Tunisie. A ce travail de Picard datant de 1953, je me permets d’ajouter quelques actualisations après les dernières visites que moi-même j’ai faites sur les sites en question entre 2012 et 2014.  

1- CARTHAGE

«L’article Carthage du Dictionnaire d’Histoire et de Géographie ecclésiasti­ques, XI, col. 1149 sqq. dû aux RR. PP. Ferron et Lapeyre donne un exposé complet de nos connaissances en 1939 ». Nous en trouverons un exemplaire à la bibliothèque diocésaine de Tunis. Consulter: C. PICARD, Carthage, 1951 et P. Silvio Moreno, «Carthage éternelle, un pèlerinage sur les ruines et l’archéologie chrétienne de Carthage», 2013. 

Dans le parc des Thermes d’Antonin : Une nouvelle église a été fouillée à une vingtaine de mètres au Sud de la grande basilique découverte en 1899 par P. Gauckler que nous appelons aujourd’hui «Basilique Byzantine». L’édifice orienté N. S., l’entrée au N., était divisé en trois nefs. Seul le pavement du bas-côté Ouest est à peu près entièrement conservé; dans l’entrée de la nef subsiste un soubassement carré en ciment autrefois plaqué de marbre, dont la destination est inconnue. Consulter: Un rapport provisoire a été publié dans le Bulletin archéologique du Comité p. 77 sqq. année 1943-45, en 1951. Cf. aussi C. PICARD, op. 1. p. 46.

Une chapelle funéraire (chapelle d’Asterius) byzantine absolument intacte a été décou­verte en 1950 sur la colline de Ste-Monique et transportée, sous la direction dc M. A. Lézine, dans le Parc des Thermes d’Antonin. C’est le plus petit, mais le mieux conservé, de tous les monuments chrétiens de Carthage. La date est fixée par la découverte sous le pavement de trois monnaies de Maurice Tibère, frappées à Carthage en 588. Consulter: Cf. S. Moreno, op. cit. p. 67.

 «Une rotonde énigmatique existe sur la colline du théâtre, pour laquelle, les interprétations les plus variées avaient été proposées. Les fouilles conduites par M. A. Lézine en 1951 ont démontré: que les ruines étaient celles du soubassement d’un monument comparable, architecturalement, au Trophée des Alpes à la Turbie: rotonde sur podium carré; que la construction pouvait être assignée à la seconde moitié du IVème siècle. Une mon­naie de Mercure dans les fondations donne un terminus post quem; une mon­naie de Julien trouvée sous une mosaïque appartenant à une construction postérieure donne un terminus ante quem. L’utilisation du monument demeure inconnue, mais il est possible qu’il s’agisse d’un édifice cultuel chrétien. M. Lézine a en tout cas relevé au N. O. une abside appartenant à un monument postérieur à la rotonde, mais antérieur à la mosaïque de Julien, dont un bloc de fondation porte une croix sculptée en bas-relief». Consulter: Cf. Fasti Archaeologici, VI, 1953, n. 4831, 3. Cette rotonde est inaccessible aux touristes et pèlerins.

2 – CAP BON

Un baptistère en mosaïque, parfaitement conservé, a été découvert en 1952 à une dizaine de kilomètres au N. de Kélibia sur la côte Est de la pres­qu’île et transporté au Musée du Bardo. Il s’agit sans doute du plus beau monument de ce genre qui soit connu en Afrique. La cuve cruciforme très richement ornée, est entourée d’une dédicace à St Cyprien et à St Adelfius, celui-ci qualifié de presbyter huiusce unitatis. La date probable est le VIème siècle. Le lieu de ce baptistère  au Cap Bon est fermé aux touristes et pèlerins.Consulter: Christian COURTOIS, «Baptistère découvert à Kélibia », CRAI, vol. 100, n°2, 1956.

3 – TUNISIE SEPTENTRIONALE

Thibiuca : Une église et un baptistère ont été fouillés à Thibiuca près de Tébourba. Consulter: Cf. J. CINTAS et G. L. FEUILLE, Karthago 111,1952, p. 195 sqq.

Bulla Regia: Une très importante basilique a été découverte par M. P. Quoniam à Bulla Regia. Pavée de mosaïques elle comporte un baptistère cruciforme dont la cuve a été ultérieurement rétrécie par la pose de plaques de marbre isolant deux des bras. Des tombes de basse époque ont envahi le sanctuaire. L’une d’elles contenait un petit trésor de monnaies ommayades, permettant de la dater du VIIIème siècle ap. J. C. Lieu de prédication de Saint Augustin, lors de ses voyages à Carthage.

Mactar: Plusieurs églises nouvelles ont été découvertes au cours des fouilles: Basilique d’Hildeguns:«Elle est située au Sud du Forum de Tra­jan. C’est une église à trois nefs, l’abside orientée vers l’Est, avec presbyte­rium surélevé. En avant de la nef centrale à l’ouest, un suggestus de maçon­nerie abrite le tombeau d’un certain Hildeguns, très vraisemblablement un Vandale; la fosse a été aménagée dans un ancien égout. A l’Est, derrière l’abside, se trouve un baptistère dont la cuve avait été abritée par un ciborium enlevé au temple d’Apollon, où il abritait une statue de Latone. Les sculptures des bases (attributs de Diane et d’Apollon) et la dédicace à Latone gravée sur la frise n’ont pas été martelées. Le sol des bas-côtés contient plusieurs tombes, recouvertes de dalles à épitaphe; d’autres tombeaux se trouvent dans une exèdre qui s’ouvre sur le bas-côté Sud».

Basilique des juvenes: «Elle se trouve à la limite S. O. de la ville, à proximité d’une nécropole utilisée depuis l’époque numide jusqu’à nos jours. L’église a été aménagée dans un ensemble monumental construit ou reconstruit entre 283 et 285, et qui comportait une cour à péristyle entourée de divers bâtiments, dont une grande salle. A mon avis d’après certaines recherches ce local était le siège de la juventus civitatis Mactaritanae. La grande salle, peut-être déjà désignée sous le nom de basilique, a reçu sans doute à la fin du IIIème ou au début du IVème siècle, une abside; ultérieurement on y installa une double colonnade intérieure; vers le même temps un narthex fut aménagé aux dépens du portique. Divers monuments funéraires ont été trouvés in situ; deux cippes païens du IIIème siècle ap. J. C. abrités par des ciboria se trouvaient, l’un au milieu du narthex, l’autre devant l’abside; ils avaient contenu les cendres d’un certain Julius Piso et de sa fille Julia Spesina. Ce dernier a certainement servi d’autel chrétien. Le cippe de Julius Piso et les colonnettes de son ciborium reposent sur des fondations identiques à celles du stylobate du portique; il semble donc que ce tombeau, dont la présence ne peut être expliquée par les besoins de la liturgie chrétienne, ait été en place dès avant la transformation de l’édifice en église. On est ainsi amené à conclure que Pison et sa fille ont été inhumés dans l’édifice des Juvenes, sans doute en tant que bienfaiteurs du collège, et que leurs tombeaux ont été respectés par les Chrétiens. Plusieurs tombes chrétiennes ont d’autre part été aménagées dans l’église: devant l’autel, les tombes en mosaïque, avec épitaphes métriques, de Constantinus, Honorate et Constantia; dans le narthex, celle d’une religieuse, Benenata, dite Jambaria; enfin plusieurs tombes à ciste, sans épitaphe, les premières datant sans doute du VIème siècle, les autres du Vème siècle. Une nécropole avait égale­ment été installée autour de l’église; elle se compose de tombes à ciste; l’une d’elles contenait quelques bijoux d’époque vandale».

Martyrium: «Au Sud de la basilique les installations funéraires sont plus importan­tes. Il y a là notamment une sorte de martyrium, formé d’une cour rectan­gulaire et d’une exèdre, qui peut être datée du IVème siècle. On y a découvert un cippe portant l’épitaphe métrique de Julias Benenata, toute païenne d’inspiration et de forme, mais qui se termine par la formule vixit in pace. Ce texte a soulevé déjà de nombreuses discussions».

Consulter : C.R.A.I., 1946, p. 461; M. P. NILSSON, Eranos, XLVI, 1947, p. ’59 sqq. et Gesch. der Griech. Reli­gion Il, p. 474, n. 6 – W. VOLLGRAFF, Hommages à J. Bidez et F. Cumont, p.339, n. 3 – P. Boyancé, C.R.A.I., 1951, p. 373 sqq. et R.A.R., 1952, p. ’47-155; J. CARCOPINO, ap., G. PICARD, Relig. de l’Afr. ant., p. VI, VII, et G. PICARD, ibid., p. 146, 211-227.

Édifices à auges: «Entre le monument de Julia Benenata et la basilique des juvenes s’élève un curieux édifice quadrilobé dont la principale caractéristique est qu’il porte une série d’auges sur le mur extérieur de son abside nord, et une série de placards symétriques sur l’abside sud. Nous avons essayé à ce propos de résoudre le problème des «édifices à auges» africains. Certains se rencon­trent dans le voisinage d’églises, notamment à Bulla Regia, à Thuburbo Maius. D’autres ont été pris eux-mêmes pour des églises, parce qu’ils affectent souvent un plan basilical. En fait, il s’agit à notre avis d’édifices destinés à la collation – ou éventuellement à la distribu­tion – de prestations en nature, et notamment en céréales. Les plus an­ciens – ceux du Kef, d’Haïdra notamment – n’ont aucun caractère chrétien et doivent avoir été édifiés pour l’impôt. A partir du IVème siècle, ils sont fréquemment annexés à des églises ou à des châteaux-forts, et ser­vaient sans doute à la perception des redevances versées par les paysans à l’Eglise et aux grands propriétaires. Nous avons pu également déblayer complètement une petite église décou­verte par L. Chatelain. Elle a été aménagée dans les ruines d’un temple païen, consacré vraisemblablement à Bacchus, qui dominait la plus ancienne place publique de la ville. De nombreuses épitaphes chrétiennes ont d’autre part été découvertes au cours des fouilles».

4- TUNISIE CENTRALE ET SAHEL

A Sousse: Ont été découvertes plusieurs tombes chrétiennes pour la plupart recouvertes de mosaïque, et portant des inscriptions. Aujourd’hui en exposition au musée archéologique de Sousse. Consulter: A. TRUIL­LOT, B.A.C., 1943-45, p. 300-306. Il faudrait aussi parler des découvertes des catacombes, unique exemplaire en Tunisie. Il y a peu de matériel actualisé par rapport aux catacombes de Sousse.

A Boutria: « A été identifié le site de l’ancienne Acholla. On a découvert là deux baptistères, l’un cruciforme, l’autre en rosace et deux nécropoles chrétiennes avec des tombes à épitaphes, certaines en mosaïque ». Consulter: Cf. B.A.C. 1946-49, p. 304; B.A.C. ‘953, Rapport sur l’activité du Service des Antiquités de Tunisie.

Ruspe: Le site de la ville épiscopale de Saint Fulgence, Ruspae, a été identifié à 10 km. au sud de Boutria, au lieu dit Rosfa. P. Cintas a découvert dans l’îlot central de l’archipel des Kneiss un monastère, qui est peut-être celui où le même saint trouva momentanément une retraite. Consulter : Revue Tunisienne. 1940, p. 243.

Iunca: « Sur le site de Iunca situé près de Maharès, à 45 km. au Sud de Sfax sur la côte, deux grandes églises ont été découvertes et fouillées de 1935 à 1952. La première est une basilique à cinq nefs, caractérisée par la présence d’un martyrium à crypte et abside, opposé symétriquement à l’abside principale et séparé de la basilique par deux couloirs. Le sol du couloir donnant accès au martyrium était pavé d’une mosaïque représentant les fleuves du paradis, s’échappant d’un édifice à coupole. Cette mosaïque nous l’appelons «Golgotha», et nous en avons parlé plus haut. La crypte conte­nait une pyxide en ivoire à reliefs. La seconde est une vaste basilique à trois nefs flanquée de deux absides latérales de part et d’autre du chœur qui donnent à l’ensemble l’aspect d’un triconque. D’autre part, une contre-abside s’élève symétriquement à l’abside principale, au tiers environ de la longueur du quadratum; elle est interprétée par M. Guarrigue comme un exèdre-ambon d’origine syrienne. En arrière le reste du quadratum, incomplètement fouillé d’ail­leurs, est occupé par des tombes. Il aboutissait à un narthex couvert, dont la largeur correspond à celle de la nef centrale, flanqué de deux pièces latérales. Des chapelles annexes s’ouvrent sur le grand côté N. E. de l’église. Celle-ci possédait une riche décoration, dont la pièce la plus remar­quable est la mosaïque de l’abside principale». Consulter: Cf. G. L. FEUILLE, Rev. Tun. 1949, p. 21 sqq.; Cahiers arch. III, 1948, p. 75 sqq.; IV, 1949, p. 131, sqq. Cf. P. GARRIGUE, Mél. Rome, LXV, ‘953, p. 173-196.

Sbeïtla: « Dans le secteur Sud de la ville, au voisinage des maisons fortes byzantines, une petite église d’architecture médiocre a été découverte en 1948. La fouille a été achevée en 1954. Une plaque de marbre inscrite, qui devait être fixée à la table d’autel – celle-ci a été également retrou­vée – portait sur une face mention des reliques des martyrs Protasius, Gervasius et Tryphon; sur l’autre face était mentionnée la memoria du seul Tryphon ». Consulter : Cf. G. L. FEUILLE, B.A.C., 1946-1949, p. 539-544.

« Plus loin au S. O., en bordure de la route qui reliait Sufetula à Cil­hum, M. Dumont a découvert dans sa propriété une importante église funéraire, fouillée en 1954 par M. N. Duval, membre de l’Ecole Française de Rome. Plusieurs dizaines d’épitaphes y ont été décou­vertes. Plusieurs sont datées d’après l’indiction et d’outres d’après l’année d’un comput non précisé, qui paraît correspondre au règne des rois vandales. Une mosaïque épigraphique est dédiée aux Saints Sylvanus et Fortunatus ».

Haïdra: «Le Dr. G. Dolcemascolo, dans les années qui ont précédé la dernière guerre mondiale, et notamment en 1934, a été déblayé la plus grande des basiliques d’Haïdra à l’ouest du forum. L’église fut consacrée par l’évêque Melleus en 568-569 ap. J.C. La publication est encore incom­plète». De cette église-cathédrale provient la mosaïque de la dédicace qui se trouve dans la salle «Eclessia mater» du musée du Bardo. Des années plus tard M. N. Duval a fouillé systématiquement le site de Haïdra en retrouvant plusieurs basiliques chrétiennes; surtout à l’intérieur de la forteresse byzantine ainsi qu’un reliquaire de Saint Cyprien, évêque de Carthage. Consulter: Cf. L. POINSSOT, G. L. FEUILLE, Inscr. chrét. d’Ammaedara: B.A.C., 1941-42, p. Goi-639.

[1] PICARD, G.-Ch, L’archéologie chrétienne en Afrique, 1938-1953

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