São Paulo: Alexandrine Brami, la normalienne qui cultive les start-up
Marina Torre
Alexandrine Brami, cette ancienne élève de l’ENS Cachan et Sciences Po qui se rêvait chercheuse au CNRS a déjà créé, à 36 ans, trois entreprises à São Paulo.
Surtout, ne la qualifiez pas "d'expat'". Alexandrine Brami se définit comme une "Française du Brésil", plus précisément de São Paulo. C'est là qu'elle s'est installée en 2002, là qu'elle se voit encore vivre dix ans.
Pourtant, à l'origine, elle n'était venue que pour une courte mission. Enseignante-chercheure en Sciences politiques, sachant à peine parler portugais, elle devait y boucler une thèse sur la fiscalité au Brésil. Seulement, au gré de ses rencontres avec des dirigeants brésiliens, cette normalienne formée à l'ENS Cachan et Sciences Po "attrape le virus de l'entreprenariat" dans un pays dont elle ressent "l'énergie folle" et décide de rester.
Une carrière toute tracée
Elle abandonne sa thèse, sa "carrière toute tracée en France, son projet d'entrer au CNRS avant trente ans" et crée sa première entreprise au Brésil : une prépa privée pour grandes écoles et universités, l'IFESP. Son école forme l'élite de São Paulo et donne notamment des cours de Français à ceux de ses membres qui souhaitent étudier dans le pays de Molière. Cette "tropicalisation" d'un concept français, l'IPESUP, a déjà formé 9.000 étudiants et réalisé l'an dernier 1,4 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Pour accroître sa visibilité, Alexandrine Brami a ensuite créé un média en ligne "MyLittleBrasil", destiné à la communauté des "Français du Brésil", 25.000 personnes en tout en 2013 selon une estimation de la Maison des Français de l'étranger. Très impliquée, elle multiplie par ailleurs les interventions auprès de l'équivalent local du Medef, ou de la chambre de commerce française. Elle a par exemple accueilli François Hollande lors de sa visite au Brésil en décembre.
A l'égard de la France, elle affiche sa reconnaissance :
"J'ai l'envie et le projet d'être une ambassadrice de nos valeurs et de nos méthodes. Je ne viens pas d'un milieu particulièrement aisé. C'est l'école républicaine qui m'a donné accès aux meilleurs lycées et grandes écoles. Je sais ce que je dois à la France. J'ai une dette envers elle."
Se "barrer" au Brésil
Une dette qui justifie à ses yeux son rôle de "pont" sur l'Atlantique, désormais matérialisé par son nouveau projet. Début 2013, elle a monté Digital Factory Brasil, un "excubateur" pour start-up spécialisées dans le numérique. Le lieu s'adresse surtout aux projets "bi-culturels" ou à ceux de Français souhaitant s'installer dans le pays. Le polémiste Félix Marquardt l'a retenu comme point de chute possible pour ces jeunes Français à qui il conseille de se "barrer" dans un guide (chez Librio) après l'avoir fait à longueur de tribunes dans la presse. Avec un ton plus nuancé, la normalienne opine :
"Quand on est jeune, il faut aller voir ailleurs pour prendre de la distance avec sa réalité."
Elle ajoute : "un entrepreneur qui réussit au Brésil peut réussir partout", tant les obstacles administratifs sont nombreux et la réglementation changeante. Réussir ailleurs? A l'avenir, la chef d'entreprise s'imagine bien tenter sa chance mais pas en France, plutôt à New York ou Moscou.
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