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Salman Rushdie frappe fort

Salman Rushdie frappe fort

SOPHIE DUROCHER

 

 

On savait déjà que Salman Rushdie, le célèbre auteur des Versets sataniques, n’a pas la langue dans sa poche. Il a toujours dénoncé la montée de l’islamisme et l’aveuglement de l’Occident face à l’intégrisme.

Mais dans une récente entrevue dans le magazine L’Express, il s’en prend carrément à la gauche, à certains intellectuels, et il assène deux ou trois vérités à ceux qui n’ont rien compris après les assassinats à Charlie Hebdo.

Qui est Charlie ?

Salman Rushdie vit dans la clandestinité sous protection policière depuis 1989, quand une fatwa a été lancée contre lui.

Qu’est-ce qui a changé dans les mentalités un quart de siècle plus tard? lui demande le journaliste de L’Express. «Plus de 25 ans après les Versets sataniques, il semble qu’on en ait tiré de mauvaises leçons. Au lieu d’en déduire qu’il faut s’opposer à ces attaques contre la liberté de s’exprimer, on a cru qu’il fallait les calmer par des compromis et des renoncements.»

Vous avez bien lu. Rushdie n’en revient pas: on se met à genoux devant les intégristes au lieu de se tenir debout devant eux.

Comment en est-on arrivé là? «On peut déplorer un retour du politiquement correct dans les milieux intellectuels», répond l’auteur.

En fait, ce que déplore Rushdie, c’est qu’aujourd’hui ce soit la gauche qui refuse de se battre pour la liberté d’expression. On en a eu un bel exemple plus tôt cette année quand de grands auteurs (dont le Canadien Michael Ondaatje et l’Américaine Joyce Carol Oates) ont refusé de participer à une remise de prix du courage à Charlie Hebdo lors du congrès de l’association de défense de la liberté d’expression PEN.

«J’ai alors eu la sensation que si les attaques contre Les Versets sataniquesavaient lieu aujourd’hui, ces gens ne prendraient pas ma défense et useraient de ces mêmes arguments contre moi, en m’accusant d’insulter une minorité ethnique et culturelle.»

C’est quand même le monde à l’envers! Alors qu’en 1989 c’étaient les gens de droite (dont l’entourage de Margaret Thatcher) qui avaient critiqué Rushdie en lui lançant qu’il avait fait de la provocation, aujourd’hui c’est la gauche qui refuse de défendre la liberté d’expression de Charlie Hebdo. La raison invoquée par ces grands intellectuels, supposément progressistes et tolérants, pour snober Charlie Hebdo? Ils trouvaient le magazine islamophobe.

Un argument que réfute Rushdie de façon cinglante. Charlie est tout sauf raciste. «En vérité, ce point, le contenu même du magazine, est sans importance, car la liberté de parole implique de défendre l’expression d’opinions que vous ne partagez pas. Ces personnes, rappelons-le, ont été assassinées parce qu’elles faisaient des dessins.»

Les islamophobes

Rushdie, qui est lui-même issu d’une famille musulmane, lance une affirmation qui va faire frémir certains intellectuels québécois. «Il faut en finir avec ce tabou de la prétendue “islamophobie”. Pourquoi ne pourrait-on pas débattre de l’islam? Il est possible de respecter des individus, de les préserver de l’intolérance tout en affichant son scepticisme envers leurs idées, voire en les critiquant farouchement. Combattre l’extrémisme, je le répète, n’est pas combattre l’islam. Au contraire. C’est le défendre.»

Vous ne trouvez pas que ça fait bien d’entendre ça de la bouche d’un grand penseur comme Salman Rushdie?

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