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Sexe, drogue et Bains-Douches

Paris, le 10 mai 1991. Robert De Niro (au centre) est entouré du DJ Claude Challe (avec le chapeau) et du propriétaire du club, Hubert Boukobza (avec les lunettes).(Sipa/Franck.)

Livre : sexe, drogue et Bains-Douches

 

 

L'ancien patron de discothèque mythique raconte ses années de fêtes, de stars et d'excès dans un récit hallucinant.

Pierre Vavasseur 

Les illusions perdues sont toujours fascinantes. Surtout quand elles ont approché le firmament. Hubert Boukobza en sait quelque chose. Aujourd'hui à 64 ans, l'ancien « petit juif pied-noir de Tunis » devenu dans les années 1980 le prince des nuits parisiennes dans son club des Bains-Douches, rue du Bourg-l'Abbé dans le Marais, qui devrait être bientôt un hôtel de luxe, vit dans un deux-pièces et touche 750 € de retraite mensuelle.

Soit, raconte-t-il en préface de son hallucinant livre de souvenirs, « Dix mille et une nuits »*, ce qu'il dépensait chaque matin en livres d'art dans une librairie parisienne. Demeures plus somptueuses les unes que les autres, bonnes fortunes sexuelles avec des créatures éblouissantes, tours du monde en jet privé et paradis artificiels à gogo dont 5 g de cocaïne par jour, avec passage par la case prison, Boukobza, qui a commencé en rachetant une à une les gargotes à touristes du quartier Saint-Michel, a tutoyé les stars de la galaxie V I P, de Grace Jones à Robert De Niro en passant par Jack Nicholson, Prince, Bowie et plus tard Mohamed al-Fayed et Jean-Luc Delarue avec qui il sera associé. Ce ne sont désormais que poussières d'étoiles. Plongez dans les grands Bains, vous ne le regretterez pas...

Ne pas parler à Prince. Le Kid de Minneapolis était un habitué des Bains. Sa spécialité, raconte Boukobza, était d'arriver sans prévenir au coeur de la nuit, « 1,50 m sur talonnettes, poudré, en combi de satin mauve ou body noir à galons dorés [...], des yeux de faon sur une barbiche de vizir », tandis que ses musiciens installaient leur matériel sur scène. La rumeur d'un concert privé faisait alors le tour de Paris à la vitesse d'une traînée de poudre blanche, mais Prince ne se dépêchait pas et pouvait soit ne jamais apparaître, soit se produire enfin à 5 heures du matin. L'auteur dit aussi comment l'auteur de la BO de « Purple Rain » n'acceptait jamais qu'on lui adresse la parole en premier.

Robert De Niro, papa poule. La première fois que De Niro a franchi le seuil des Bains, le patron des lieux est venu à lui en lui disant qu'il avait adoré « Casino », le film qu'il venait de tourner avec Martin Scorsese. « Ça... c'était l'erreur, écrit-il. [...] Sa réaction m'a glacé [...] je venais de lui déclarer que son film était génial et il m'a répondu par une moue — cette façon de plisser la gueule avant de regarder par-dessus mon épaule [...]. En le voyant me tourner le dos, j'ai pensé : Hubert, tu viens de faire une connerie. » Mais « Bobby » est revenu et Boukobza l'a cette fois complimenté pour ses... boutons de manchette. Et là, bingo. Début d'une longue amitié. Et lorsque l'acteur lui rendait de nouveau visite, c'était pour prendre Hubert à part et lui parler de ses enfants. Comment les élever ? De Niro apportait même leurs bulletins scolaires !

Grace Jones s'incruste. Tant qu'à être une diva, autant être à la hauteur de sa réputation. Boukobza raconte comment il a lancé un village chic sur les hauteurs de Tanger en puisant les people dans sa clientèle. Parmi eux, Grace Jones qui mettait cinq heures pour se préparer à la simple perspective d'un dîner. « Tout devait être tip-top, chaque resto, chaque portion, la serviette, le service, la baignoire [...] pour cette souveraine, qui nous a salués des deux bras [...] sans laisser un cent pour le personnel après s'être tapé l'incruste trois semaines. »

Jack Nicholson s'empiffre. La vedette de « Vol au-dessus d'un nid de coucou » a fait au patron des Bains l'une des plus fortes impressions. « Le type même du génie qui kiffe la vie. » A commencer par la nourriture. « Quand Jack me retrouvait à Paris [...], il me parlait de ce qu'il venait de manger [...]. Nicholson déjeune et dîne deux fois, en le vivant, puis en te le racontant, sans rien omettre. Avec le sang, la graisse, la sauce [...]. Chaque menu est une scène d'anthologie et ce Pantagruel d'outre-Atlantique ne se déplaçait jamais sans une horde de quinze à vingt convives. »

* « Dix mille et une nuits » d'Hubert Boukobza, avec Jean-François Kervéan, Ed. Robert Laffont, 298 pages, 20 €.

http://www.leparisien.fr/livres/livre-sexe-drogue-et-bains-douches-07-12...

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