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"Super Mario" et sa mere Juive

 

"Super Mario" et sa mere Juive

 

 

Jusqu'à jeudi dernier Mario Balotelli, noir comme l'ébène et italien, était seulement un grand joueur de football, un beau gosse, un personnage capricieux et casse-cou, étoile montante d'une certaine presse people. Une photo réalisée à la fin du match Italie-Allemagne, où Mario (surnommé aussi Super Mario, comme Mario Monti d'ailleurs...) a signé les deux buts qui ont permis aux Azzurri de disputer la finale de l'Euro 2012 de dimanche soir, a révélé beaucoup plus de choses sur lui. Et sur l'Italie !

Mamma Silvia, une dame Juive déjà âgée, mère adoptive de Mario, prend dans ses bras son fiston à la fin du match. Lui se trouve à l'intérieur du terrain du stade de Varsovie et il se lance vers elle, elle avec sa mise en plis à peine décoiffée et l'allure d'une dame de la classe moyenne du Nord de l'Italie. Mamma Silvia ferme les yeux et attire à elle la tête de Mario qui s'est baissé pour être à sa hauteur. Dans la réalité, la scène a duré longtemps. Dans le silence. Un vrai concentré d'amour.

C'est seulement à ce moment-là que beaucoup d'Italiens ont découvert des détails en plus sur la vie de Super Mario, au-delà des informations normalement données sur son impulsivité sur le terrain. Ou sur sa dernière fiancée. La véritable histoire est celle beaucoup moins glamour d'un couple, Franco et Silvia Balotelli, de Concesio, aux portes de Brescia, ville riche et industrieuse de Lombardie, qui pendant l'été 1990, alors qu'ils ont déjà trois enfants (Cristina, Corrado et Giovanni), décident d'accueillir chez eux un bébé, fils d'un couple du Ghana, qui l'a abandonné en le laissant à l'hôpital: Mario souffrait d'une malformation intestinale. Ils ont estimé qu'ils ne pouvaient pas s'occuper de lui.

Silvia et Franco l'ont accueilli dans le cadre d'un "placement en famille d'accueil", qui n'est pas une vraie adoption, mais un instrument juridique crée en 1983 et très répandu en Italie: l'enfant conserve ses parents naturels et les nouveaux "parents" doivent organiser des rencontres périodiques avec eux. L'Etat octroie une contribution et surtout un suivi psychologique. C'est un véritable acte d'amour pour deux parents qui ne le seront jamais à plein titre, sauf si les géniteurs naturels (c'est très, très rare) renoncent à leurs droits. Mario aurait voulu devenir vraiment le fils de Silvia et Franco, mais ses parents naturels, qui vivent encore en Italie et avec qui il a une relation difficile liée à l'abandon, n'ont jamais accepté de renoncer à leurs droits parentaux. Pour les Balotelli, quand même, cela n'a jamais posé de problème.

Cette belle et tendre photo a fait découvrir à beaucoup d'Italiens l'histoire qu'un couple de vieux Lombards, tout sauf exubérants et à l'interview facile, aurait préféré garder secrète. Depuis le début, mamma Silvia ne voulait pas que ce gamin puissant et impulsif joue au football. Mais il était un petit champion dès son adolescence. Alors elle a commencé à le suivre partout, en lui donnant des leçons de mathématique, d'histoire, de géographie... avant et après les matchs ou dans la voiture, pendant les transferts, pour que Mario ne prenne pas de retard dans ses études. Une fois passé à l'Inter de Milan, déjà adulte, Silvia prenait le train de Brescia une fois par semaine pour ranger l'appartement de Mario et surtout le voir, le contrôler, qu'il s'énerve pas trop... Une fois engagé au Manchester City, elle a commencé à prendre l'avion pour l'Angleterre. Toujours dans l'ombre, avec son mari et les autres enfants.

Maintenant les Italiens savent. Il a suffi d'une photo. Ils savent aussi que Mario a dû attendre ses 18 ans pour aller à la mairie de Concesio, où tous le connaissent, lui et sa famille, pour obtenir la nationalité italienne, à cause d'une loi stupide et arriérée, qui la refuse aux enfants de parents étrangers, au moins jusqu'à l'âge adulte. Même ceux qui au début sifflaient Super Mario sur le terrain parce qu'il était noir savent comment les choses se sont passées. Et que mamma Mario et papa Franco, qui vivent encore dans leur petite maison de Concesio, avaient compris avant tout le monde, au nom de la générosité et de la tolérance.

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