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« LA COLLABORATION » AUX ARCHIVES NATIONALES : UNE EXPOSITION QUI MET FIN AU MYTHE RESISTANCIALISTE

« LA COLLABORATION » AUX ARCHIVES NATIONALES : UNE EXPOSITION QUI MET FIN AU MYTHE RESISTANCIALISTE

 

 

 

 

C’est la première fois qu’une exposition se tient sur La Collaboration. Hasard de l’histoire et obsession de la mémoire, cela se produit en même temps que  paraît le pamphlet négationniste d’Eric Zemmour et que le précieux Nobel est décerné à l’auteur qui a tant écrit sur cette période, Partick Modiano. Sous le double commissariat très prestigieux de Thomas Fontaine et Denis Peschanski, les Archives cassent le mythe tenace d’une collaboration qui ne  serait qu’ une occupation. 

« Ça fait 32 ans que je travaille sur la collaboration et pour moi plus de la moitié des documents étaient inédits », avoue Denis Peschanski. 300 documents s’offrent à nous dans une approche d’abord chronologique puis thématique. L’exposition s’ouvre sur une frise chronologique qui présente les 20 documents de la collaboration. Très rapidement, nous sommes confrontés à l’apport majeur de ce travail : « mettre en évidence des passerelles plus importantes que celles que l’on pensait ». Une image nous présente le glaçant trio Laval/Petain/Abetz quelques heures avant l’entrevue Montoire qui acte la collaboration entre la France et l’Allemagne.

Les thèmes sont ensuite choisis pour nous permettre de saisir les nuances de l’histoire de la collaboration. A la fois la différence entre les collaborateurs – venus de l’extrême droite classique – et les collaborationnistes – plutôt fascistes, avec des figures de proue comme Jacques Doriot – fondateur du Parti populaire français – et aussi le tempo de la collaboration. De 1940 à 1942, c’est la collaboration constructive qui fait le choix d’une coopération avec l’Allemagne dans le but de s’assurer une bonne place économique dans l’Europe Nazie. De 1942 à 1944, c’est le temps des contraintes. Contraintes à la fois économiques et humaines puisque la France livre toutes les minorités et persécutés. Enfin dès Janvier 1944, c’est « le bonheur de la participation » dit Peschanski. La participation à la politique allemande se confond avec la politique française. « Il n’y a plus de distinction entre la leur et la notre ». On atteint de nouveaux pics de persécution et de déportation; c’est une période de radicalisation.

Ce que montre bien l’exposition c’est comment la déportation des Juifs est au cœur même de l’entreprise de Vichy avec une volonté exponentielle de la part de Pétain. « Dès le départ tous les actes de Pétain vont vers une aggravation du statut des juifs » . On retrouve le Statut d’octobre annoté de la main du Maréchal, et le fichier en lui même. Il s’agît là de pièces connues. Mais, dans la troisième salle de l’exposition, réservée à la collaboration policière, on voit une photo découverte très récemment dans les archives de l’agence de photographie Trampus. Pétain, René Bousquet et Pierre Laval sortent du pavillon Sévigné à Vichy. C’est la seule retrouvée qui représente le conseil des ministres du 3 Juillet 1942. Derrière la photo se trouvent 2 tampons de la censure française et allemande, datés de Juillet et d’Août. La photo marque l’événement juste avant l’annonce de la co-gestion de la solution finale et de la rafle du Vel d’Hiv.

Dans la même salle, nous découvrons les seuls manuscrits et photos existants sur la concentration des juifs avant leur transfert vers le camp de Drancy avant Auschwitz, daté du 14 mai 1941, soit plus d’un an avant le Vel d’Hiv.

Les thèmes  qui sont politiques, sociétaux, médiatiques recouvrent tous la même réalité historique : l’interaction entre les acteurs est totale, cela se voit particulièrement dans la salle « Produire avec le Reich », puis en découvrant les images de Goering confortablement installé dans le jardin de l’Ambassade d’Allemagne à Paris.

L’exposition donne à voir une diversité d’objets et de supports, et offre un apport double. D’abord pour les spécialistes de l’histoire de Vichy qui auront ainsi accès à des pièces nouvelles (les séquestres de Pétain viennent d’être mis à jour, on peut voir le journal de Marcel Déat…) mais également pour le grand public, qui se repérera facilement dans un parcours limpide, qui fait une large place aux photos et aux vidéos. Le son aussi : « Maréchal nous voilà » retentit en nous refroidissant l’échine.

On comprend ainsi, et cela est un fait nouveau, comment la collaboration est un phénomène certes minoritaire mais qui a une importance sociale très importante.

Ni tous collabos, ni tous résistants, l’exposition « La collaboration » amène encore plus de précisions et de nuances à propos de, pour reprendre l’historien de l’histoire de la mémoire de Vichy, Henry Rousso, « ce passé qui ne passe pas ».

Amélie Blaustein Niddam et Sarah Hamidou

Informations pratiques :

« La Collaboration (1940-1945) » aux Archives Nationales
Hôtel de Soubise 60 rue des Francs-Bourgeois 75003 Paris
Du 26 novembre 2014 au 2 mars 2015
Du lundi au vendredi de 10h à 17h30
Samedi et dimanche de 14h à 17h30
Fermé le mardi et jours fériés.
Tarifs : entrée 6€, tarif réduit 4€.

 Visuels : 

 Télégramme de René Bousquet aux préfets régionaux précisant les consignes de mise en oeuvre
de la déportation des Juifs étrangers de zone sud, 22 août 1942
Archives nationales, 3W/91 dossier de René Bousquet devant la Haute cour de justice
© Archives nationales / Alain Berry

 

Le retour des écrivains ayant participé au voyage en Allemagne, en gare de l’Est, novembre 1941
Archives nationales, Z/6/731 dossier 5467
© Archives nationales / Alain Berry

Lettre de félicitations de Louis-Ferdinand Céline à Lucien Rebatet à l’occasion de la publication
de son livre Les Décombres, sans date
Archives nationales, Z/6/1050 scellés du dossier 2999
© Archives nationales / Alain Berry

 

Brassard de la Légion des volontaires français contre le bolchevisme
Archives nationales, Z/6/35 dossier 604
© Archives nationales / Alain Berry

Par Amelie Blaustein Niddam

http://toutelaculture.com/arts/expositions/la-collaboration-aux-archives...

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