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«Enfances tunisiennes»

 

 

 

 

«Enfances tunisiennes»

 

 

 

 

De quoi est constituée aujourd’hui l’identité de la Tunisie ? Le livre «Enfances tunisiennes», recueil de 20 textes d’écrivains tunisiens francophones et arabophones, tente de répondre à cette actuelle et délicate question.

En 20 nouvelles, Enfances tunisiennes (éditions Elyzad) livre le portrait d’une Tunisie incroyablement plurielle où se côtoyaient il y a encore quelques décennies de multiples communautés : arabe, bien sûr, mais aussi française, juive, maltaise, italienne… Au sein même de ces communautés, on trouve des groupes différents: par exemple les Judéo-Tunisiens et les juifs «grana» originaires de Livourne et de Pise (Italie) ; les «Français»vivant en Tunisie, et les «Français de France», totalement étrangers au pays.

«Je n’aime pas ce terme de ‘communauté’. Il est très réducteur car il induit quelque chose de fermé et d’homogène», explique Sophie Bessis, historienne et auteure de l’un des 20 textes du livre, et qui les a rassemblés avec Leïla Sebbar. Un «quelque chose» qui n’a rien à voir avec ce qu’on découvre dans Enfances tunisiennes.

L’ouvrage décrit une mosaïque. Un mot très symbolique quand on connaît la magnificence de cet art antique en Tunisie ! «Une mosaïque peut se lire de deux façons : soit elle s’interprète comme une juxtaposition de petits carreaux, soit c

Mais aujourd’hui, la mosaïque a disparu. A titre d’exemple, au moment de l’indépendance en 1956, la Tunisie comptait environ 100.000 juifs sur trois millions d’habitants. Aujourd’hui, elle en compte à peine 1500 sur une population de 11 millions de personnes. «Le pays a ainsi cessé d’être méditerranéen pour devenir arabo-musulman», constate Sophie Bessis. «Quoi qu’il en soit, c’est cette ‘tunisianité’ plurielle qui a été mise à sac avec l’homogénéisation née de l’indépendance en 1956 et la dispersion des minorités. En les perdant, la pluralité tunisienne s’est appauvrie», ajoute-t-elle.

La question identitaire se pose de manière plus détendue que dans un pays comme l’Algérie, malmenée par son histoire coloniale. «La Tunisie était déjà un Etat avant l’arrivée des Français et elle avait entrepris des efforts de modernisation pendant la période précoloniale. De plus, ses frontières sont restées pratiquement les mêmes depuis l’Empire romain», rappelle l’historienne.

Pour autant, la question identitaire ne s’en pose pas moins. En quelques années, on a ainsi assisté à la mise en place d’«une homogénéisation rare» si l’on considère l’histoire du Maghreb. Une homogénéisation autour de l’islam et de l’arabité, qui a donné naissance à un grand débat. «Dans ce contexte, il y a deux camps : ceux qui penchent pour la source unique arabo-musulmane ; et ceux qui pensent que l’arabité est centrale dans cette identité mais que celle-ci a également des composantes vieilles de 3000 ans, notamment berbères», poursuit Sophie Bessis.

Avec le parti islamiste Ennahda, le débat a pris une grande importance. «Je le déplore. Parce que je pense qu’il y a actuellement d’autres chats à fouetter dans ce pays que de placer au premier plan une question identitaire qui, en définitive, ne sera jamais tranchée», pense l’auteure.

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