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Condamnations tunisiennes après l'appel au meurtre de Juifs

 

Condamnations tunisiennes après l'appel au meurtre de Juifs

 

Les Tunisiens ont manifesté leur colère après les récentes déclarations d'un islamiste radical dont certains estiment qu'il pourrait porter atteinte au secteur du tourisme dans le pays et à la reprise économique.

Par Houda Trabelsi pour Magharebia à Tunis 

 

L'appel d'un cheikh salafiste lancé aux jeunes pour "tuer les Juifs" a suscité la colère en Tunisie le mois dernier, et les autorités ont fermement condamné ce langage extrémiste.

Un cheikh inconnu a attiré l'attention lors d'un rassemblement organisé le 25 mars à Tunis en faveur de la charia. La vidéo de cet incident survenu sur l'Avenue Bourguiba a fait le tour du pays, mais l'identité de ce cheikh et ses origines restent inconnues.

"Cet appel à lutter contre les Juifs est absurde", a déclaré le ministère des Affaires religieuses dans un communiqué. "Le ministère rejette cette attaque contre tous les citoyens tunisiens", soulignant que "les Juifs tunisiens sont des citoyens à part entière."

Roger Bismuth, le président de la communauté juive de Tunisie, a dénoncé cet appel. "Nous le déplorons, et la Tunisie n'est pas habituée à une mentalité comme celle-là", a-t-il indiqué.

"J'ai rencontré le président de l'assemblée constituante Mostafa Ben Jafaar et le Président de la République Moncef Marzouki, et tous deux condamnent les propos de ce cheikh salafiste", a-t-il déclaré à Magharebia.

"Ce qu'a fait ce cheikh ne fait pas partie de nos coutumes en Tunisie, et il ne peut s'agir d'un Tunisien", a-t-il ajouté. "Nous devons aujourd'hui être unis, plus que jamais, pour sauver l'économie du pays et faire revenir les investissements et les touristes."

Près de deux mille Juifs vivent en Tunisie, principalement sur l'île de Djerba.

Saida Garrache, une militante des droits de l'Homme, a déclaré que ce cheikh salafiste était "la traduction littérale de l'ignorance de la religion, de l'histoire, de la géographie et, naturellement, de la politique et de la loi, car il oublie que le Prophète Mahomet avait épousé une Juive pour conclure la paix avec les Juifs."

"Le judaïsme est une religion divine reconnue par l'Islam, comme le christianisme", a-t-elle ajouté. "De plus, ce cheikh ne sait rien de l'histoire de la Tunisie, parce qu'en Tunisie, les Juifs sont avant tout des citoyens tunisiens comme lui, et disposent des mêmes droits et des mêmes capacités que lui."

Elle a expliqué que les Juifs ont, dans l'histoire, contribué à construire la Tunisie, ajoutant qu'associer les Juifs tunisiens et la question palestinienne était un message totalement faux.

Garacche a poursuivi en expliquant que "l'incitation à la haine entre les membres d'une même société et l'incitation au meurtre sont punissables par la loi. C'est de surcroît un coup porté à l'économie du pays et une atteinte aux moyens de subsistance des hommes et des femmes de ce pays."

Cet appel au meurtre a également suscité la condamnation au sein des utilisateurs des médias sociaux, certains demandant que le gouvernement tunisien prenne les mesures nécessaires pour arrêter ce cheikh.

"Franchement, je suis surpris par le silence du gouvernement tunisien et surpris de le voir laisser de tels ignorants organiser des manifestations et les laisser lancer leurs appels au meurtre", a déclaré Mourad Louati, 40 ans, à Magharebia. "Nous ne voulons pas d'une telle démocratie, mais d'une démocratie codifiée et rationnelle."

Bouthaina Bouzid, 33 ans, a mis en garde contre l'impact économique de tels propos, affirmant que "un tel appel amoral ne reflète en rien l'esprit pacifique du peuple tunisien et porte atteinte à l'économie et à la sécurité du pays à un moment où nous avons besoin de stabilité et de plus d'opportunités d'investissement."

"Il est étrange que tant de personnes à l'esprit étroit ne sachent faire la distinction entre judaïsme et sionisme, ou entre l'Etat d'Israël et le judaïsme en tant que religion divine", a commenté Mostafa Riahi.

Masouda Matilde Milan, une Juive tunisienne, a déclaré à Magharebia : "Honnêtement, de tels appels, totalement étrangers à notre pays, menacent notre sécurité et notre stabilité, et contribuent à entretenir les divisions entre les peuples."

"Malgré ces appels à tuer des Juifs lancés par ce cheikh salafiste, nous constatons chez certains de nos amis musulmans et ceux qui nous sont proches en Tunisie, avec lesquels nous vivons depuis des dizaines d'années dans un amour et un respect total, une énorme solidarité et un grand soutien", a-t-elle affirmé.

"Nous, Juifs, n'abandonnerons pas notre pays, et nous contribuerons au développement de celui-ci aux côtés de nos frères musulmans", a-t-elle conclu.

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