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Jonathan Chaouat: «Quand Amir Weintraub et Malek Jaziri s’entraînent ensemble, on les chambre»

Les joueurs de tennis, Amir Weintraub (à g.) et Malek Jaziri (à droite), coéquipiers en Interclubs avec l'équipe de Sarcelles TORU YAMANAKA / AFP ET AFP PHOTO/MARWAN NAAMANI

Jonathan Chaouat: «Quand Amir Weintraub et Malek Jaziri s’entraînent ensemble, on les chambre»

 

 

TENNIS – Le président du club de Sarcelles accompagne actuellement les deux joueurs lors des championnats interclubs…

Il y a un peu plus d’un mois, le Tunisien Malek Jaziri était invité par sa fédération à déclarer forfait contre un adversaire israélien, Amir Weintraub, lors d’un tournoi ATP en Ouzbékistan. L’affaire a valu à la Tunisie son exclusion de la Coupe Davis. Depuis une semaine, les deux joueurs se côtoient pourtant au sein de l’équipe du club de Sarcelles, engagée dans les Interclubs français, une compétition par équipe de fin de saison. Leur président, Jonathan Chaouat, décrit les retrouvailles des deux joueurs amis qui affronteront Dijon samedi, après Colomiers, mercredi.

Comment se passe la cohabitation entre les deux joueurs?

Les retrouvailles se sont très bien passées entre eux, mais comme il y avait des médias, ils n’étaient pas à l’aise. Là, à Toulouse, ils sont tranquilles, il n’y a personne, ça se passe super bien. Malek et Amir n’ont pas trop envie de parler. Ce qu’il s’est passé est délicat. Ils veulent juste jouer au tennis. Et ils sont forts pour ça.

Entre eux, le sujet est-il tabou?

En fait, ils n’en ont pas parlé. Les joueurs ont un peu chambré en disant: «Faites attention, ne vous mettez pas côte à côte», etc. Histoire de détendre un peu l’atmosphère, parce qu’on a senti un malaise. Malek n’était pas comme d’habitude. Amir était un peu blessé (physiquement), il est venu encourager l’équipe la première semaine des Interclubs. Forcément, Amir n’était pas heureux qu’on lui reparle de ça. Ils veulent qu’on parle d’eux pour leurs résultats sportifs plutôt que pour des problèmes politiques.

Lequel des deux a été le plus touché par cette affaire?

Amir était gêné pour Malek. Il l’aime beaucoup. Et c’est à Malek qu’on a mis une pression. Pour Malek, c’est délicat parce qu’il adore son pays. Il en parle tout le temps en disant que c’est le plus beau pays du monde. Il est triste qu’il y ait ces tensions et dit qu’il ne faut pas s’arrêter à ça.

Est-ce qu’ils vont programmer leur saison en fonction de l’autre à l’avenir?

Je ne pense pas. Il ne faut pas en arriver là. Là, ça va mieux. Ça rigole. A Toulouse, ils se sont entraînés ensemble. Quand c’est le cas, on les chambre. Avec le temps, ça passera. Ils sont contents de jouer au tennis. A Toulouse, Amir fait chambre avec sa fiancée et Malek fait chambre seul. Mais au repas d’équipe, tout le monde est ensemble.

Cette histoire est-elle gênante pour votre club?

La seule chose qui a gêné le club, c’est quand on l’a mis au cœur d’un problème politique. On ne fait partie d’une mouvance politique. Quand le club appelle Malek ou Amir, ce n’est pas parce qu’ils sont juifs ou musulmans, mais parce qu’ils sont joueurs de tennis. Et en plus, ils jouent bien.

Vous n’avez donc jamais eu de choix à faire entre l’un et l’autre?

Non. Amir a eu peur qu’on ait à choisir. Mais on n’est pas là pour ça. La seule chose qui m’intéresse, c’est de gérer les rencontres (des Interclubs). Personne ne m’a demandé de faire quoi que ce soit. La seule chose qui peut se passer, c’est qu’un joueur vienne me voir pour me dire: «Ecoute, il y a trop de pression chez toi quand Amir ou Malek sont là.» Là, ce sera une vraie problématique. Mais je ne pense pas qu’on en arrive à faire un choix.

Pourquoi Malek ne veut-il pas parler à la presse pour expliquer son ressenti?

Il n’en a pas envie. Il a juste peur de la façon dont ses propos seront interprétés chez lui. Il craint l’effet crescendo. On va demander quelque chose à Malek, puis à Amir de contredire. Moi je n’en ai pas envie. Je veux qu’on fasse un match detennis plutôt entre eux. Pour une œuvre caritative.

Quand ça?

Après les championnats interclubs. Pour organiser cela, il faut des dons, et pour trouver des dons, il faut du temps. Le but, c’est juste de dire qu’on est là pour jouer au tennis. Quand Nadal joue Federer, qu’il l’aime ou pas, il va sur le terrain. Quand Malek jouera Amir, juif ou musulman, il jouera contre lui. C’est ce qu’on veut montrer à Sarcelles, une ville cosmopolite. La semaine dernière, on a joué contre Strasbourg, c’était shabbat, il y avait des gens qui ont encouragé les Sarcellois avant d’aller prier à la synagogue. Bon, ça montre à quel point on fait les choses normalement. Il n’y a pas de problème avec les religions.

 Propos recueillis par Romain Scotto

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