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Khamenei déclare qu’il ne respectera pas l’accord si les sanctions sont simplement suspendues et non levées

Khamenei déclare qu’il ne respectera pas l’accord si les sanctions sont simplement suspendues et non levées

 

 

Dans un discours prononcé devant l’Assemblée des experts d’Iran, le Guide suprême Ali Khamenei a abordé l’accord du JCPOA sur le nucléaire. On trouvera ci-après des extraits de son discours et leurs implications :

Khamenei fait marche arrière sur l’accord

Le Guide suprême Ali Khamenei a déclaré que la suspension des sanctions – comme convenu dans le JCPOA et la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies – n’était pas acceptable à ses yeux. Il a affirmé que si les sanctions n’étaient pas levées, au lieu d’être simplement suspendues, l’Iran ne respecterait pas ses obligations en vertu du JCPOA.

Khamenei fait ainsi marche arrière sur l’accord et impose une nouvelle demande – qui ne pourra être facilement acceptée même au cas où l’administration américaine l’acceptait. Sur le plan procédural, cela exigerait de reconvoquer le P5+1, de modifier le texte du JCPOA et de reconvoquer le Conseil de sécurité des Nations unies afin d’entériner la nouvelle demande. Sur le plan substantiel, l’acceptation des demandes de Khamenei porterait atteinte au concept de « snapback » des sanctions (N.d.T. Rétablissement des sanctions en cas de violation des règles par l’Iran), que l’administration a présenté comme l’une des raisons justifiant le JCPOA.

Khamenei donne la compétence au Majlis pour approuver ou rejeter le JCPOA

Dans son discours, Khamenei a donné au Majlis (parlement) la compétence d’approuver ou de rejeter l’accord, décision que le président Hassan Rohani avait tenté d’empêcher, étant averti du fait que de nombreux membres du Majlis avaient des critiques envers l’accord. [1]

Implications

Le fait que Khamenei ait décidé de faire marche arrière sur le JCPOA, immédiatement après confirmation que le président Obama disposait des voix nécessaires pour soutenir un veto indique l’une des deux possibilités suivantes :

Soit cela signifie que Khamenei, conscient du fait qu’il présentait une demande impossible, tente de saboter le JCPOA (hypothèse renforcée par son transfert de compétence au Majlis), soit qu’il a tiré avantage de ce qu’il perçoit comme une capitulation d’Obama sur toutes ses demandes et tente d’obtenir des concessions supplémentaires en rouvrant les négociations.

En outre, après la directive de Khamenei pour transférer la compétence concernant l’approbation du JCPOA au Majlis, les porte-parole du camp idéologique au sein du Majlis ont lancé une campagne publique contre le JCPOA et contre tout respect de l’accord de la part de l’Iran – comme cela lui incombe en vertu du JCPOA – avant la levée des sanctions.

Voici les principaux points de son discours : [2]

Des juristes et des experts doivent examiner la question des aspects juridiques de l’accord. De manière générale, il ne serait pas approprié pour nous d’écarter le Majlis du processus d’examen de l’accord, comme je l’ai indiqué au président [Rohani]. Je ne conseille pas au Majlis d’accepter ou de rejeter l’accord… La décision finale relève de la responsabilité des représentants du peuple au sein du Majlis. Je pense que le Majlis ne doit pas être tenu à l’écart [du processus] et que les représentants du peuple doivent prendre une décision à ce sujet.

Les négociations avec les Etats-Unis sur la question des sanctions

Bien que nous ayons parlé avec six pays, la partie principale à laquelle nous avons été confrontés dans les négociations était l’administration américaine. Les représentants officiels américains ont parlé avec impertinence, et il a fallu gérer cela… Les Américains ont parlé de maintenir le cadre des sanctions. Si le cadre des sanctions doit être maintenu, alors pourquoi avons-nous négocié ? Nous avons négocié [avec les Américains] afin d’obtenir la levée des sanctions, et les sanctions seront levées. A présent, si nous sommes supposés maintenir ce cadre… cela contredit totalement la raison pour laquelle l’Iran a participé aux discussions.

Autrement, quelle était la raison de notre participation aux discussions ? Nous aurions pu continuer de faire ce que nous faisions [avant les discussions]…

Si nous nous sommes assis à la table des négociations et avons fait des concessions sur certaines questions, c’était principalement pour obtenir la levée des sanctions. Si les sanctions ne sont pas levées, il n’y aura pas d’accord…

[Nos] représentants officiels [à savoir le gouvernement de Rohani et le ministre des Affaires étrangères] doivent le faire savoir clairement. Personne ne doit dire que les [Américains] affirment [que les sanctions ne seront suspendues] que pour persuader leurs opposants chez eux. Je pense qu’il y a effectivement un débat interne aux États-Unis, qui est un débat authentique. Je ne pense pas que cela soit une [simple] façade. De fait, ils ne sont pas d’accord, et nous savons aussi pourquoi. Mais nous devons répondre à ce que [les Américains] affirment officiellement – parce que si nous ne répondons pas, ce que dit l’autre partie sera mis en œuvre…

Ils affirment qu’ils suspendront [les sanctions] ou les gèleront. Cela n’était pas dans notre intérêt. De manière évidente, les sanctions doivent être levées. Nous avons dit « immédiatement » et ils ont interprété « immédiatement » [d’une certaine manière] et je n’y ai pas prêté d’attention.

Nos collègues [à savoir l’équipe de négociateurs] ont interprété « immédiatement » d’une certaine manière, ont imaginé une solution et je ne m’y suis pas opposé. En fin de compte, toutefois, les sanctions doivent être levées. Le gel ou la suspension [des sanctions] ne sont pas acceptables à mes yeux.

S’ils suspendent [les sanctions], nous suspendrons aussi [ce qui nous incombe]. Si nous devons appliquer ce [qui est exigé de nous], les sanctions doivent être en fait annulées.

De fait, l’autre partie affirme qu’il ne lui appartient pas de lever certaines sanctions. Nous répondons que [concernant ces sanctions] nous ferons valoir nos droits [légaux] pour y mettre fin. Mais concernant [les sanctions qui] relèvent des gouvernements américain et européens – celles-là doivent être totalement levées ».

Relations Iran-États-Unis

Une autre question est celle de la manière dont [les Américains] parlent des questions non reliées au dossier nucléaire. Les femmes et les hommes de l’élite américaine parlent de la même manière que le faisaient les Anglais au 19e siècle. Cela montre que [les Américains] retardent de deux siècles par rapport au monde et à l’histoire. Le monde a changé, et les superpuissances n’ont plus les capacités et la puissance de faire ce qu’elles faisaient alors.
D’un autre côté, la partie avec laquelle ils traitent actuellement est l’Iran. Ce n’est pas un pays arriéré sur un quelconque continent, auquel les Américains peuvent se permettre de s’adresser comme ils le souhaitent. Non. L’Iran est [un pays] qui a des capacités connues et d’autres capacités qui ne sont pas [encore] connues, mais qui seront bientôt visibles, lorsqu’elles seront mises en œuvre.

Il est inconcevable que vous [nous] menaciez sans arrêt.

Les Américains affirment qu’ils attendent du gouvernement iranien qu’il agisse différemment. Différemment de quoi ? Différemment [de la manière dont l’Iran a agi dans le] passé ? Non. Cela ne se produira jamais, [parce que] cela signifierait violer les règles islamiques et renoncer à notre fidélité envers les valeurs islamiques. C’est ce qu’ils entendent par “différemment”. Cela ne se produira jamais. Personne ne fera jamais une telle chose – ni le gouvernement, ni le Majlis, et ni les représentants officiels. Et même si quelqu’un faisait une telle chose, le peuple et le régime de la République islamique ne seraient pas d’accord avec lui. Ce qu’ils entendent par « différemment » est que l’Iran entrera dans le cadre de la politique américaine dans la région.

L’Amérique a une certaine politique et certaines positions dans la région. L’une d’entre elles est que l’administration américaine devrait profiter du contrôle absolu sur la Syrie et sur l’Irak, et qu’elle attend de l’Iran qu’il entre dans ce cadre. Cela non plus ne se produira jamais.

Ils attendent de nos hauts-représentants, de notre gouvernement et de nos politiciens qu’ils agissent dans l’intérêt de cette politique. Cela ne se produira jamais. Parmi les choses qu’ils disent et qui nous irritent, il y a le fait que l’accord sur le nucléaire a créé des opportunités pour l’Amérique, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Iran. Cela fait partie du discours américain. Je dis à vos collègues au sein du gouvernement et aux personnes responsables ne pas laisser les Américains tirer profit de telles opportunités à l’intérieur de l’Iran et de tout faire pour empêcher l’Amérique de saisir de telles opportunités à l’extérieur de l’Iran. Plus les Américains seront proches de ces opportunités, plus l’humiliation, la misère et l’arriération se répandront parmi les nations.

J’ai dit ce qui suit, et je l’ai souligné : aucune négociation ne se tiendra avec la partie américaine, hormis sur le dossier nucléaire. Je l’ai dit tant aux représentants du ministère des Affaires étrangères qu’aux autres responsables. La raison en est que la position américaine est diamétralement opposée à la nôtre.

Notes :

[1] Voir le discours de Rohani le 30 août 2015, President.ir/fa
[2] Farsi.khamenei.ir, 3 septembre 2015.

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