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La Grande-Bretagne cette colonie française qui a mal tournée

 

La Grande-Bretagne cette colonie française qui a mal tournée

 

Laurent Brayard

 

Le mot est de Clémenceau qui avait beaucoup de réparties et d’intelligence, il s’applique dans toute sa véracité aux événements du Proche-Orient qui secouent la région depuis près d’un siècle.

Lorsque le 18 juillet 1947, le navire Exodus 47 se présente près des côtes de la Palestine, la marine britannique arraisonne le navire qui comprenaient environ 4 500 candidats à l’émigration, des juifs dont beaucoup de survivants de la Shoa. L’histoire fit le tour du monde et personne ne peut ignorer le nom de cet étonnant navire qui comme le Titanic est entré dans la légende. C’est clandestinement que ces juifs s’embarquent pour la terre promise, alors que la Grande Bretagne contrôle la Palestine sous mandat depuis la fin de la Première Guerre mondiale. Le fait est important, ceux qui se souviennent de l’histoire de Laurence d’Arabie, savent que durant la Grande Guerre, l’Empire Ottoman en partie moribond avait pris le parti de rejoindre le camp de l’Allemagne et de l’Empire Austro-Hongrois. La Palestine à cette date, ainsi que la majeure partie du Proche-Orient était sous le contrôle des Turcs.

Les Français et les Britanniques s’engagent dans une expédition balkanique sensée prendre à revers l’ennemi, soutenir les Serbes, les Grecs et les Roumains ralliés aux alliés pour vaincre la Bulgarie et les Ottomans dans la région. Cette expédition sera en partie un désastre, notamment sanitaire et c’est après bien des combats que les alliés devaient percer dans cette région. Plus loin, au Proche-Orient, les alliés, Britanniques en tête qui sont déjà installés en Egypte et qui contrôlent le point stratégique du Canal de Suez, sont face au danger d’une invasion des Ottomans. C’est ainsi, qu’après bien des méandres que les alliés firent alliance avec les tribus du désert de l’Arabie et certains chefs locaux pour « libérer » ces pays des Ottomans.

Cette alliance ne fut pas sans la trahison finale des alliés, qui après la prise de Jérusalem, puis la déconfiture totale des Turcs sur ce front, vont s’installer sans vergogne dans la région et se partager des territoires à un moment où, déjà, le pétrole était un enjeu colossal et qui ne fut pas perdu de vue par les alliés, qu’ils soient Français, Américains ou Anglais. En Syrie, suite à la révolte arabe, le Prince Fayçal devient Roi d’un royaume syrien indépendant qui ne fut pas reconnu par les alliés… Malgré le statut d’allié du Prince et son entrée en vainqueur dans Damas en 1918, il se trouva chassé par les Français ayant obtenu un mandat sur la Syrie. Dans l’indifférence générale et l’absolue négation du droit des gens, la France envahissait le pays en 1920 et établissait sa main mise sur le Liban et la Syrie.

Plus au Sud, reliant l’Egypte, les Britanniques malgré les promesses diverses faites tant aux Arabes, qu’aux Palestiniens et aux Juifs, s’installaient en Jordanie et Palestine dans le but avéré de contrôler les premières routes du pétrole, via l’Arabie Saoudite se proclamant indépendante et l’Irak. Là les Britanniques s’installent par la force et écrasent en 1920 les forces locales. L’Irak libéré de l’occupation Ottomane fonda un royaume en 1921 et n’obtînt qu’avec peine son indépendance en 1932. Nous comprenons mieux pourquoi les irakiens eurent la tentation de se rallier au camp de l’Axe en 1941… En Palestine, les Britanniques resteront dans la région jusqu’en 1948. Le mandat, chose méconnue, fut obtenu suite à la déclaration de Balfour en novembre 1917, alors ministre des Affaires Etrangères se déclarant favorable à la création en Palestine d’un foyer national juif.

C’est ainsi que l’histoire douloureuse que nous vivons commence par la promesse des alliés, Britanniques en première ligne, et en moindre mesure Français de créer dans la région un Etat juif et un Etat arabe. Ayant évincé les seconds, les alliés s’installent dans la région pour longtemps, alors qu’à cette époque, il y avait environ 9 arabes pour un juif dans la zone. En 1920 puis 1922 et 1923, les Britanniques forment toutefois un Emirat arabe Transjordanien qui deviendra plus tard la Jordanie. Cette manipulation coupait de fait l’unité historique de la Palestine et ouvrait un conflit sanglant entre les sionistes partisans d’un état juif en Palestine et les Arabes réclamant l’unité en opposition aux prétentions juives. Mandaté pour créer cet état juif, la Grande Bretagne devait bien entendu bien se garder de passer aux actes jusqu’aux tragiques événements de la Seconde Guerre mondiale.

Vaincu en 1940, les Français ne peuvent espérer se maintenir au Liban et en Syrie territoires ralliés à Pétain par ailleurs. Dès 1946, notamment par l’action du Général de Gaulle, la France quitte la région, la Syrie et le Liban deviennent indépendants. Mais en Palestine, les Britanniques s’accrochent et entendent résister à la pression des uns et des autres, notamment des Juifs. Ils ne peuvent toutefois lutter contre le court du temps et contre ce qu’ils avaient eux-mêmes finalement semés dans les déclarations et les actions du passé entre 1917 et 1923. C’est dans ce contexte qu’apparut le navire Exodus 47 sur les côtes de Palestine un 18 juillet.

Il s’agissait en réalité du Président-Warfield navire battant pavillon panaméen commandé par Ike Aronowicz et par Yossi Harel. Après 5 jours de navigation ayant quitté Sète le 11 juillet 1947, le navire se renomme fièrement Exodus 47 et arbore le pavillon israélien. La Royal Navy arraisonne le navire le 18 juillet et considérant tous les passagers comme des émigrants illégaux le navire est renvoyé en France… Le 29 juillet, les passagers refusent de débarquer réclamant d’être conduit en Palestine… Le bras de fer va durer jusqu’au 23 août, seuls 75 passagers débarquent, et les autres ainsi que deux autres navires bondés de réfugiés juifs sont détournés vers l’Allemagne et le port d’Hambourg où ils sont débarqués par la force à partir du 8 septembre. L’affaire fait un scandale international énorme, les juifs étant conduits dans des camps en Allemagne… le parallèle était très dangereux.

Dans l’opinion publique, l’affaire est gagnée, l’ONU partage la Palestine le 29 novembre 1947 et créé un état palestinien et un état juif, Jérusalem restant sous contrôle onusien. Si les Juifs s’accommodent de cette décision, les Arabes s’y refusent catégoriquement, ce qui va conduire à la guerre dès 1948 et par la destruction de l’Etat palestinien initialement prévu. 

La paternité de tous les problèmes actuels, et jamais nous ne pourrons le dire assez haut et fort, est entièrement à mettre sur le dos des Britanniques, dans de moindres mesures des Français et également de l’ONU qui déjà à peine créée générait des traités, des plans et des partages iniques, sans que les premiers intéressés fussent consultés, pour les profits d’intérêts marchands ou les intérêts de minorités ou de politiques. Jamais le colonialisme ne fut aussi dévastateur que dans cet instant, lorsque des peuples étrangers et finalement vraiment barbares, venaient avec les mots civilisations à la bouche sans se rendre compte des malheurs dont ils seraient la cause. Il est facile aujourd’hui d’accuser Israël, nous aurions fait la même chose certainement à leur place. Personne à l’heure actuelle ne changera la situation, Israël est un Etat souverain, la situation locale est catastrophique et beaucoup de nuages s’accumulent encore dans cette région. Pendant ce temps, les Britanniques, les Français et leurs alliés Américains dorment tranquillement… en rêvant de nouveau aux mirages, par le prisme déformant de la Syrie. /L

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