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La synagogue de Sfax Beith-El de nouveau profanée - Par Camus Bouhnik

 

La synagogue de Sfax Beith-El de nouveau profanée - Par Camus Bouhnik

 

Vendredi soir j'ai reçu un coup de fil d'un ami Sfaxien, Habib. Son message plus qu'éloquent m'a attristé : la Synagogue Beith-El est de nouveau profanée. Le but est sans doute un vol, mais le résultat est la violation d'un lieu de culte. Les tabernacles jetés à terre en disent long quant au respect que les impies ont pour la maison de Dieu.

 

D'après l'éducation reçue en Tunisie Dieu est Un, Unique et Eternel : Shémaâ Israël Adoshem Eloquénou, Adoshem Ehad. En entrant à la Synagogue une inscription attire mon attention avec évidence : Daâ lifné mi ata omed : sache devant qui tu es (debout, en ce moment et en ce lieu). La réponse est incontestable, je suis devant Hashem et dans ces circonstances je dois me conduire avec considération et chaleur.

Quand j'entre dans une Cathédrale, une Basilique ou une Mosquée au cours d'un voyage touristique, j'ai la perception que je suis dans un lieu vénérable et je me conduis en conséquence, respect et décence. Abraham notre ancêtre a enfanté deux fils, Israël et Ismaël. Leur Seigneur est Un, Unique et Eternel. La confession islamique a viré d'un autre côté, mais ne nie pas la confession juive qui est à l'origine des trois confessions.

Je ne connais pas de Tunisiens niant les vérités ci-dessus citées. Je vous respecte, vous me respectez, nous vous respectons. Chacun d'entre nous est né dans la religion de ses parents, dans leur couleur. Personne ne choisira qui seront ses parents, sa confession, son sexe ni sa race. Je suis comme je suis né, tu es comme tu es né un point c'est tout. Cette tirade ayant pour but d'honorer les croyances mutuelles, je passe au prochain alinéa.

 

Nous avons grandi en Tunisie dans une belle convivialité entre Juifs, Musulmans et Chrétiens. Plus tard nous n'avons pas rejeté les athées, libres-penseurs, bouddhistes et autres. Nous sommes tous amis, voisins et chacun fait dans son nid ou dans son lieu de culte ce que Bon lui semble. Les Musulmans nous offraient leurs gâteaux lors de l'Aïd, nous leur rendions des manicottis et des makrouds à Pourim. Les Chrétiens acceptaient avec plaisir nôtre couscous et tout aurait pu continuer dans ce sens pendant des centaines d'années.

Je rappelle à mes amis Musulmans que les Juifs sont arrivés en Tunisie après la destruction du Premier Temple, il y a de cela 2600 années. Bien avant la conception de la religion islamique. L'Indépendance de la Tunisie après le Protectorat français vieux de 75ans a barré les privilèges des Juifs devenus une minorité depuis belle lurette : les nouveaux décrets ont convaincu les Juifs de quitter La Tunisie : nos droits révoqués, nos cimetières nationalisées, nos fonctions dans l'administration interdites nous n'avions pas d'autres solutions que partir. Et nous avons quitté vendant nos maisons et nos affaires pour une bouchée de pain. Même si nous aurions reçu des bonnes propositions, il nous avait été défendu de sortir de Tunisie avec une grosse somme d'argent.

 

Baroukh Hashem la bonne étoile nous a guidé et chacun de nous a majoré sa situation économique, a rehaussé sa formation intellectuelle et les nouvelles générations sont encore plus avancées que nous. Pourtant nous n'avons pas oublié La Tunisie, la Terre qui nous a accueillis, nous parlons les langues maternelles, le français et l'arabe tunisien ces deux mamelles dont nous avons tété nos premiers mots. Nous citons les proverbes tunisiens pleins de philosophie et nous écrivons des scénarios pour des scènes basées sur la culture tunisienne et ses proverbes. (Visitez notre site http://www.amit4u.net )
 
OK. Nous pensons à La Tunisie, avec nostalgie. En est-il de même pour les Tunisiens ? Ou bien toute convention n'existe plus avec ceux qui étaient leurs voisins ? J'ai gardé des contacts d'amitié avec plusieurs tunisiens et nous nous entendons à merveille. Toujours est-il que je suis triste d'apprendre que parmi les Tunisiens que j'ai quittés sans l'ombre d'une querelle ou d'un malentendu, vivent des hors-la-loi qui ont perdu tout respect, pour eux rien n'est sacré : symbole, emblème, drapeau, lieu de culte ou religion.

 

Nous avons suivi la révolution du jasmin, l'abdication de Ben Ali et nous étions avec vous moralement, mentalement. Certains faits ont enlaidi cet enthousiasme : c'étaient le pillage de la Synagogue d'El Hamma, les manifestations des Salafistes devant la Grande Synagogue, Avenue de Paris à Tunis et trois fois la profanation de la Synagogue Beith-El de Sfax. La dernière s'est passée il y a une douzaine de jours. Un peuple si charmant devrait vomir ces mauvaises herbes de son sein. Impossible d'être un pays démocratique sans arrêter ces faits qui sont une hshouma vis-à-vis de la philosophie tunisienne si éclairée.
 

J'ai parlé de ce sujet plusieurs fois, les actes ont été parfois niés. Pourtant mes sources sont sures et je crie encore une fois, avec l'espoir que les personnes de bon sens sortiront de leur mutisme et diront : "çà suffit, c'est contraire à la dignité que nous inculquons à nos enfants". J'ai l'impression que personne ne m'écoute. Plus je crie, moins je n'entends la résonnance de mon écho :

Ahna naâtou oussarak yenzadou : plus on crie, le nombre de voleurs augmente (Dicton populaire tunisien).

J'ai déjà vu qu'on se torchait le cul avec le drapeau israélien, ô suprême profanation. Je ne l'aurais jamais pensé pour aucun drapeau de nulle nation. La semaine dernière j'ai vu le drapeau tunisien profané à La Manouba. C'est ce qui se passe quand on se tait. Se taire c'est devenir complice.

 

Ceux à qui ce sujet est important sont priés de dire leurs pensées ou de les écrire. Il est possible d'envoyer un fax à Monsieur le Gouverneur de Sfax et de le prier de faire intervenir la police locale ou de lui parler de vive voix. On m'a dit que c'est une personne aimable et qui vous écoutera.
 

Monsieur Mohamed Ali Jendoubi
Téléphone : 21674402100, 21674402105
Fax : 21674403628, 21674403620
 

Avec mon amitié,
Camus Bouhnik

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