Le 500e parrain de Marine Le Pen est un élu... franco-israélien

La 500ème signature

Sylvain Semhoun, bien connu des Francophones de Jérusalem en sa qualité de délégué d’Israël de l’Assemblée des Français de l’étranger a créé le buzz en offrant la 500ème signature nécessaire à Marine Le Pen pour les présidentielles. Sylvain nous a contactés hier (mercredi 14 mars) et a tenu à exposer ses motivations à Israël7.

Incrédule, j’ai appris hier (mercredi 14 mars) qu’un ressortissant français, un Juif, habitant de surcroit à Jérusalem, a offert la 500ème signature nécessaire à Marine Le Pen pour se présenter aux élections présidentielles. Lorsque j’ai vu la photo et lu le nom de Sylvain Semhoun, bien connu à Jérusalem comme l’un des délégués d’Israël pour l’Assemblée des Français de l’étranger (voir ici), j’ai écarquillé les yeux. Au même moment, Sylvain cherchait à me contacter pour exposer ses motivations à Israël7. Moi aussi, comme tous les organes de presse dans le pays, je cherchais à l’interroger.

« Sylvain, c’est quoi cette histoire que tu as offert la 500ème signature à Marine Le Pen pour qu’elle puisse se présenter aux présidentielles ? Et en vertu de quoi tu es habilité à signer ? Tu n’es pas maire ou élu local ? » C’est ainsi qu’au téléphone, j’ai exprimé ma stupéfaction à Sylvain et nous avons convenu de nous rencontrer pour en parler.

En Israël, beaucoup connaissent Sylvain Semhoun pour son activité politique française. Il a aidé beaucoup de ressortissants français dans le pays à bénéficier de leurs droits en assurant des permanences aux consulats de France à Haïfa, à Jérusalem et à Tel-Aviv et en se déplaçant également dans les villes éloignées du centre du pays. C’est la conception du travail politique dont se prévaut Sylvain, de se soucier de la base et des gens en faisant cas de leurs préoccupations.

Sylvain a été délégué de l’UMP en Israël et s’est efforcé en faveur de Sarkozy pour les élections présidentielles de 2007. Avant son Alyah, il y a plus de 20 ans, Sylvain a été actif au centre droit en France.

Question : Alors que t’arrive-t-il Sylvain ? Tu es passé au FN maintenant ? Tu es conscient du tumulte que tu as engendré ? « Un Juif en Israël sauve la mise pour Marine Le Pen ». Même un scénariste à l’imagination la plus délurée n’aurait trouvé mieux.

Sylvain : Non. Je ne suis pas du tout passé au FN. Je suis un vrai démocrate, un républicain et mon engagement le prouve. Il n’est pas normal que plusieurs millions de Français désirant voter pour un candidat ne puissent le faire. C’est absurde. On ne pourra plus parler de démocratie en France si une telle chose se produit. La démocratie permet par le truchement des consultations électorales à ce que les courants d’opinion puissent s’affronter dans la sérénité. Sinon, cette confrontation se reportera dans la rue et ce sera la catastrophe et la guerre civile. L’article 4 de la Constitution de la Vème République définit cela très clairement : « … la loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation.»

Question : Sylvain, attends. Tu es quant-même conscient du tollé chez pas mal de Juifs en France et même ici qui te disent que Le FN, c’est un repère d’antisémites et de négationnistes ? Il y a des mecs là-bas qui ont un passé sulfureux avec qui les militants juifs de Bétar se battaient férocement.

Sylvain : « En France depuis le début des années 2000, il y a eu une vague d’antisémitisme sauvage sans précédent et qui se poursuit jusqu’à présent. Ce ne sont pas les gens du FN qui en sont à l’origine, mais les milieux de la gauche antisioniste qui ont incité les meutes contre les Juifs par leurs campagnes de calomnie contre Israël. C’est vrai que le père Le Pen est un antisémite notoire. Mais des antisémites, pas des moindres, tu peux en trouver dans toutes les formations politiques, à droite et à gauche. Alors pour cela tu vas les empêcher de se présenter aux élections: les Verts, Mélenchon, le PC, le PS, la Joly ?

Question : Admettons Sylvain, mais pourquoi un Juif d’Israël, de Jérusalem en plus, c’est lui qui doit prendre une décision pour les Français en France sur ce sujet qui les a projetés dans la fièvre là-bas ? Tu ne vois pas l’aspect insolite, paradoxal de la chose ?

Réponse : Je suis délégué de l’Assemblée des Français de l’étranger depuis de nombreuses années. En cette qualité, je suis habilité à signer comme les maires pour les candidats aux présidentielles. Sarkozy que j’ai soutenu, pour qui je me suis démené afin que 90% des suffrages en Israël aillent pour lui en 2007. Là mon action était souhaitable et personne ne voyait à y redire, que je suis Juif et résidant en Israël, mais quand je signe pour une candidate sans pour autant la soutenir, afin de permettre à ce que 8 millions de Français puissent avoir le droit élémentaire d’élire qui ils le désirent, là le délégué Franco-Israélien que je suis, habitant à Jérusalem, ça ne va plus?

Sarkozy a tenu des propos intolérables envers Netanyahou en le traitant de menteur. Il a même voulu lui dicter de ne pas prendre Lieberman comme ministre. En Israël, on donne la possibilité à la population arabe d’élire qui elle veut et même des députés qui s’évertuent à miner la légitimité d’Israël et à se liguer avec ses ennemis, parce qu’Israël est une vraie démocratie. Voilà la leçon de démocratie qui vient d’Israël et dont je me suis fait le vecteur, que des millions d’électeurs français puissent élire leur candidat !

Question : Sylvain, on accuse déjà les Franco israéliens d’être des anti-arabes primaires et que c’est pour cette raison que tu te ligues avec des fascistes français, par haine des Arabes ?

Sylvain : Je suis natif d’Oujda au Maroc. J’ai fait partie de l’Association en Israël pour le Roi Hassan II. Je suis membre fondateur de la Fédération mondiale du judaïsme marocain. Nous versons des bourses en Israël à des étudiants nécessiteux de tout milieu, des Juifs, des Musulmans et des Chrétiens. On entretient des relations très chaleureuses avec le Maroc à tous les niveaux. C’est ça être anti arabe primaire ?

Question : Comment cela s’est-il passé avec Marine Le Pen ? Tu l’as rencontrée? Qu’est-ce qu’elle t’a dit ? Shalom ?

Réponse : Je l’ai sortie de l’impasse dans laquelle elle se trouvait. Elle m’a écouté, je crois. Je pense qu’il est important de lui expliquer ce qu’est Israël, que nous vivons dans un pays vraiment démocratique en butte à l’intolérance de l’islamisme. Je lui ai parlé du régime des retraites pour les binationaux, ce qui ne concerne pas uniquement les ressortissants français en Israël, mais dans le monde entier. Je crois que c’est important qu’on lui fasse comprendre certaines choses

Question : Tu sais qu’elle s’est exprimée pour « l’internationalisation de Jérusalem », pour la création d’un Etat arabe sur notre Terre, en Judée-Samarie, qu’elle ne saisit pas vraiment la teneur de la menace nucléaire iranienne et en matière de politique étrangère, elle n’a rien à envier à la tradition pro arabe du Quai d’Orsay ? C’est ce genre du candidat pour qui tu es parti au charbon et pour qui tu t’attires l’opprobre de milieux juifs et non juifs aujourd’hui ?

Réponse : Je ne te dis pas que je la soutiens. On a essayé d’établir un dialogue. On verra ce que seront ses positions. Elle ne semble pas changer pour le moment sur les dossiers qui nous sont cruciaux. On décidera en fonction de cela, mais ne crois pas qu’à l’UMP avec les belles déclarations creuses de Sarkozy, c’est beaucoup mieux.

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par Meir Ben-Hayoun