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Le hijeb crève l’écran en Tunisie

L'animatrice d'El Watanya 2 porte le hijeb

 

Le hijeb crève l’écran en Tunisie

 

 

 

 

 

 

Après des décennies d’interdiction et de répression, voici que le hijeb fait une entrée spectaculaire dans les médias tunisiens en général, et sur le petit écran en particulier. Considéré comme «habit sectaire» (libess taiyfi) sous le dictateur Ben Ali, le hijeb (voile islamique) a été interdit dans les administrations, les écoles, les universités.

Les femmes qui portaient le voile étaient souvent harcelées par la police, lors de campagnes sporadiques mais de plus en plus espacées quand le règne de Ben Ali tirait vers sa fin. Et voici que ce «fichu foulard», selon l’expression du défunt roi du Maroc, Hassen II a fini par s’imposer dans l’espace public et dans les médias de masse en Tunisie.

La veille de l’Aïd, la chanteuse Imen Chérif a ainsi fait son numéro sur la télé nationale, dans une robe vert pistache et en hijeb, dans une émission consacrée à la fête de la fin de Ramadan. Cas isolé ? Dans une émission enfantine diffusée le 2eme jour de l’Aid, à savoir le 31 août 2011, et toujours sur el Watanya, c’est cette fois-ci l’animatrice elle-même qui porte fièrement le hijeb. S’agit-il-il d’apporter des gages de bonne foi à une proportion grandissante de téléspectateurs sensibles aux signes de religiosité ou une simple question de représentativité pour notre télé? Quoi qu’il en soit, les Tunisiens assistent en direct à un sacré retournement de situation. D’autant plus que cette même chaîne participait à des campagnes de dénigrement virulentes contre des journalistes comme Khedija Ben Guenna, d’Al Jazeera, considérée comme un étendard vivant des femmes voilées.

Pour rappel, quelques semaines à peine après la fuite de Ben Ali, les autorités transitoires ont permis aux femmes voilées de garder leur hijeb pour leur photo de leur carte d’identité nationale. On rappellera également que les services de police interdisaient aux hommes de porter la barbe, fusse-t-elle une simple barbichette, plus léniniste qu’islamiste. C’est dire que les flics de Ben Ali ne faisaient pas vraiment une différence entre les sexes quand il s’agissait de répression. Puisque même les hommes étaient visés par des mesures clairement attentatoires aux libertés individuelles. Et les services de sécurité du dictateur ratissaient large pour raser les attributs pileux masculins du paysage.

Reste à savoir si les laïcs radicaux qui ne perdaient aucune occasion de s’ériger contre ce qu’ils considéraient comme «un signe obscurantiste ostentatoire importé et contraire à nos traditions» vont réagir aussi vivement dans la Tunisie d’après le 14 janvier. Mais quand en France, les «minorités ethniques» se battent pour avoir plus de visibilité à la télé, peut-on décemment exclure d’un média public une proportion grandissante de la population tunisienne ? Et après tout, El Wataniya, comme son nom l’indique, n’appartient-elle pas à tous les Tunisiens ? Ou doit-on considérer le hijeb comme un signe d’appartenance politique et qui s’inscrit, à cet égard, dans le cadre d’une campagne électorale qui ne dit pas son nom ?

Walid Ben Sahbi

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