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Opinion : Les nouvelles règles du jeu au Moyen-Orient

 

Opinion:Les nouvelles règles du jeu au Moyen-Orient

 

par toma

 

 

 

 

 

MADRID – Il n’est pas encore certain que le printemps arabe aboutisse à l’avènement de démocraties crédibles dans le monde arabe. La poussière n’est toujours pas redescendue après des mois de soulèvements à Tunis, au Caire, et ailleurs, mais les révoltes arabes ont d’ores et déjà un impact sur la structure stratégique du Moyen-Orient.

Jusqu’à il y a peu, la région était divisée en deux camps : un alignement arabe modéré incohérent et affaibli et un « axe de résistance » formé par l’Iran, la Syrie, le Hamas et le Hezbollah et opposé aux desseins de l’Amérique et d’Israël dans la région. Ayant adopté une stratégie « zéro problème » vis-à-vis ses voisins, la Turquie s’est rapprochée de la Syrie et de l’Iran avec l’objectif d’assoir son rôle de leader au Moyen-Orient.

Le printemps arabe a révélé la fragilité des fondations sur lesquelles repose l’ensemble de l’Axe de résistance, le poussant au bord de la rupture. Le premier a en sortir fut le Hamas. Craignant les conséquences de la chute de ses s à Damas, le Hamas s’est tactiquement retiré de l’axe et a laissé l’Egypte le mener vers la réconciliation avec l’Autorité Palestinienne pro-occidentale selon des termes qu’il avait refusé d’accepter sous l’égide de l’égyptien Hosni Moubarak.

La Turquie est réellement en faveur d’une solution à deux états au conflit Israélo-Palestinien et d’un système régional de paix et de sécurité, alors que l’Iran et le Hezbollah ne veulent ni l’un ni l’autre, refusant à Israël le genre de paix avec le monde arabe qui finirait par isoler l’Iran. Malgré son amer conflit avec Israël, la Turquie, contrairement à l’Iran, n’est pas un ennemi inconditionnel de l’état juif et ne rejetterait pas un accord avec le gouvernement de Benyamin Netanyahu. Des discussions sont d’ailleurs en cours entre les parties afin de restaurer des relations plus normales.

L’Iran et la Turquie ne partagent pas non plus de vision commune concernant la région sensible du golfe. La Turquie, dont le traité signé en 2008 avec le Conseil de Coopération du Golfe en a fait un partenaire stratégique des monarchies de la région, s’est affirmé sans équivoque pendant la crise du Bahreïn, intimant l’Iran de cesser ses intrusions subversives dans les affaires de la région. La stabilité et l’intégrité territoriale des états du golfe est une priorité stratégique pour la Turquie ; ce qui n’est clairement pas le cas pour l’Iran.

De même, en ce qui concerne le Liban, la Turquie ne partage pas non plus l’inquiétude de l’Iran sur une possible interruption du soutien du Hezbollah dans l’hypothèse d’un effondrement du régime syrien. Et l’Iran et la Syrie, pour leur part, n’apprécient guère les aspirations du Premier ministre Recep Tayyip Erdo ?an à agir en tant que négociateur au Liban, qu’ils considèrent comme leur pré carré stratégique. Cela explique que le Hezbollah ait rejeté l’initiative turco-qatari de médiation après la chute du gouvernement libanais de Saad Hariri en janvier 2011.

L’engagement de la Turquie en faveur de transitions démocratiques pacifiques dans le monde arabe l’a éloigné de son allié syrien, Bashar el-Assad – dont les pratiques répressives agréent totalement à l’Iran et au Hezbollah – et l’éloigne plus encore de l’Iran. L’Iran veut s’assurer que des élections libres installent de véritables régimes islamiques dans le monde arabe, tandis que la Turquie estime que son propre style politique, une synthèse entre Islam et démocratie, fondée sur des valeurs laïques, devrait finir par prévaloir.

Ce glissement reflète non seulement des différences idéologiques mais aussi un désaccord sur les objectifs d’un changement de régime. L’Iran attend des nouveaux régimes qu’ils se rallient à son action pour modifier radicalement l’équation stratégique régionale par une politique de confrontation avec les Etats-Unis et Israël tandis que la Turquie attend des nouveaux régimes qu’ils poursuivent des politiques de paix et de sécurité.

Project Syndicate, 2011.

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