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Parfums d’Orient, les hammams s’adaptent aux clients parisiens

 

Parfums d’Orient, les hammams s'adaptent aux clients parisiens

 

Traditionnels, bobos, naturistes: les hammams se développent et s'adaptent à leur public parisien, jetant un parfum d'Orient sur la capitale où ils retrouvent un rôle qui tend justement à disparaître dans les pays musulmans.

On est très loin de l'époque où le hammam de la Grande mosquée de Paris régnait en monopole. On en compte aujourd'hui une trentaine. "Cela correspond à une mode", explique Pascal Meunier auteur de deux ouvrages consacrés au sujet.

L'origine des hammams (eau chaude en arabe) remonte à la conquête de la Turquie où les Arabes découvrent les bains romains et grecs. Ils les adoptent en les adaptant.

Mais alors que les Romains construisaient de grands thermes publics au centre-ville, les Arabes en érigent de plus petits et disséminés pour les rendre accessibles au plus grand nombre. Ils vont notamment mettre en place un nouveau système d'adduction pour ne pas se laver dans une eau stagnante et sale, selon M. Meunier.

Ce photographe, diplômé de sciences politiques, qui a découvert les hammams à Damas, observe que ces lieux de convivialité sont paradoxalement de moins en moins courus en Orient, sous les effets de la modernité.

Dans ces pays, les hammams "représentaient la salle de bains du quartier à une période où les familles ne disposaient pas de douches et de baignoires chez elles", confirme Georges Nataf, commerçant de Saint-Denis, qui a créé le Hammam Pacha.

"On allait au hammam une à deux fois par semaine pour se chauffer et guérir les douleurs rhumatismales", explique encore M. Nataf.

Ce Juif originaire de Tunisie a eu l'idée de son Hammam Pacha à Noël 1987 en recevant une amie maghrébine "déprimée, qui avait une envie folle d'aller au hammam pour se détendre".

Dès le mois suivant, M. Nataf lance son projet, tablant sur les 270.000 Maghrébins habitant alors en Seine-Saint-Denis.

Au départ, il n'y avait qu'une centaine de clientes. Toutes Maghrébines. Avec le temps, ce petit coin d'Orient lové au fond d'une cour attire surtout des Européennes. Le concept évolue et près de la salle des vapeurs et de repos, il y en aura d'autres pour le massage, les soins de peau et les produits de beauté.

"On est parti dans un sens et on s'est retrouvé dans l'autre", s'étonne encore M. Nataf. Une séance photos avec des mannequins, une série d'articles et quelques tournages de films ("Une pour toutes" de Claude Lelouch) et le succès ne se dément pas.

Depuis, une trentaine d'établissements ont ouvert à Paris.

Mais il y a un monde entre le hammam de Pigalle, lieu de rencontre libertin, et celui de Barbès bien plus proche de l'Orient et de sa rigueur morale.

Dans tous les cas "on va au hammam comme au cinéma ou au théâtre: c'est pour se détendre, se rencontrer, enterrer se vie de jeune fille", observe Anne Decroq, employée au Cent Ciels à Boulogne.

Le succès vient aussi d'une multitude d'expositions consacrées ces dix dernières anées à l'Orient, observe-t-on à la Sultane de Saba, fondé par une esthéticienne dont le grand-père tenait un hammam à Fez.

Enveloppés dans les vapeurs, les clients flirtent parfois avec l'illégalité, dénonce M. Nataf pour qui certains hammams sont des "bordels dissimulés". Il a mis fin à la mixité "pour ne pas avoir à faire le policier".

Certaines femmes rechignent aussi à avouer qu'il n'est pas prudent de dire que l'on travaille dans un hammam. "Pour ma famille, je suis aide soignante", confie ainsi une employée d'un hammam.

Par Amer OUALI

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