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Slogans antisémites: les juifs tunisiens exhortent les autorités à réagir

Slogans antisémites: les juifs tunisiens exhortent les autorités à réagir

 

 

De Cécile FEUILLATRE (AFP) 

 

TUNIS — La discrète communauté juive tunisienne est montée au créneau et a porté plainte pour exhorter les autorités à réagir suite à des slogans antisémites scandés lors d'une manifestation à Tunis, troisième incident de ce genre depuis le début de l'année.

"C'est la troisième fois que ce genre de choses se répète, c'est trop. Je n'accepte plus et j'ai donc porté plainte" ce mercredi, a déclaré à l'AFP Roger Bismuth, le représentant de la communauté juive, qui compte quelque 1.500 personnes en Tunisie (contre 100.000 à l'indépendance en 1956).

"Justice doit être faite", a souligné M. Bismuth, qui avait été reçu la veille par le président de l'Assemblée constituante Mustapha Ben Jaafar.

Des slogans anti-juifs ont été scandés dimanche lors d'une manifestation d'islamistes avenue Bourguiba pour réclamer l'inscription de la charia dans la Constitution.

Sur une courte vidéo circulant sur internet, on peut voir un orateur à l'allure de prédicateur criant: "Préparez-vous au combat contre les juifs!" tandis que la foule crie "Allahou Akhbar".

Selon M. Bismuth, il a également été crié "égorgez les juifs".

Des incidents similaires s'étaient produits en janvier lors de la visite en Tunisie du chef du gouvernement palestinien du Hamas, Ismaïl Haniyeh, et en février lors d'une tournée d'un prédicateur radical égyptien.

S'ils n'étaient pas passés inaperçus, ils n'avaient donné lieu à aucune plainte. Cette fois-ci, l'incident de l'avenue Bourguiba a été immédiatement dénoncé par la classe politique dans son ensemble, et l'indignation a dépassé la communauté juive.

L'Association tunisienne de soutien des minorités (ATSM), une association créée après la révolution pour défendre les minorités ethniques, religieuses et sexuelles, a été la première à déposer plainte mardi auprès du procureur de la République de Tunis.

Retrouver le coupable

"On veut que le coupable soit retrouvé. Il y a une vidéo qui circule, on le voit avec son mégaphone, en plein jour, à quelques mètres du ministère de l'Intérieur", s'est indignée la secrétaire générale de l'association, Raouda Seybi.

"Ces incidents se répètent, on ne peut plus dire qu'il s'agit d'actes isolés, on ne va pas attendre maintenant le passage à l'acte", a-t-elle ajouté.

"On veut sensibiliser l'opinion publique. On risque tous de devenir un jour ou l'autres minoritaires avec l'ambiance actuelle", a-t-elle souligné, en référence à la montée en puissance des radicaux islamistes.

Les autorités tunisiennes ont réassuré que les juifs étaient "citoyens tunisiens à part entière". Elles ont estimé que les incidents étaient des "actes isolés" ou des "dérapages", selon le parti islamiste dominant Ennahda.

Pour Gilles Jacob Lellouche, qui fut le seul candidat juif à se présenter sur une liste lors des élections du 23 octobre, la question dépasse la petite communauté juive de Tunisie.

"Il était temps de réagir, il faut bousculer les autorités, qui ont fait preuve d'inertie en général, pas seulement par rapport aux juifs", a-t-il déclaré à l'AFP.

"Les Tunisiens en ont ras le bol, quelle que soit leur origine ethnique et religieuse, de tout ce qui se passe dans le pays. Il faut endiguer le mal avant que le sang coule", a-t-il ajouté.

"Les appels à la haine peuvent tomber dans des oreilles mal averties, avoir un impact sur des esprits faibles qui un jour voudront faire un coup d'éclat", a-t-il souligné.

"Ca peut commencer par les juifs. Et puis ça peut être un chrétien, un artiste, une femme" a mis en garde M. Lellouche, auteur d'une lettre ouverte d'un "Tunisien ordinaire" pour demander aux autorités d'"affronter leurs responsabilités".

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