Interview Ftouh Souhail de Tunisie
Lph : Ftouh Souhail, vous êtes musulman, avocat au barreau de Tunis. Vous vous décrivez comme un « homme libre, citoyen du monde ». Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous et vos activités?
Ftouh Souhail : Oui c’est vrai, je me définis comme un homme libre et « citoyen du monde ». La religion n’a pas lieu d’être citée. Ma profession n’on plus. L’opinion libre, vaste, et lucide à laquelle nous donnons corps n’est en effet l’apanage de personne.
Lorsque je m’exprime c’est en tant que citoyen et militant pacifiste et je ne représente pas la position de mon pays. Je respecte tous ceux qui sont des vues différentes. L’indépendance d'esprit reste néanmoins quelque chose de fondamental pour moi.
Je m’attends à plus de compréhension de la part de ceux qui ne partagent pas mes positions, et qui ne sont pas forcément habitués aux traditions démocratiques. Je suis toujours ouvert au débat.
J’ai un grand respect pour Israël, pour son histoire millénaire profonde et le parcours courageux de son peuple et si je le défends, c’est indépendamment de mes convictions religieuses, car je déteste l’injustice et le mensonge et, malheureusement, Israël subit l’injustice et elle est victime de mensonges grotesques.
En tant que tunisien maintenant, je ressens avoir une dette envers Israël, un pays qui, au début des années 1950, a appuyé avec force au sein de l’ONU les aspirations nationales tunisiennes pour l’indépendance. Habib Bourguiba sait quelque chose. Aujourd’hui hélas, le nom de votre pays n’apparaît pas dans les cartes géographiques tunisiennes et les livres scolaires ; je trouve cela est une injustice.
Dans le cadre de mes activités, j’ai lancé un Blog « Tunisie-Israel » affilié à l’Association Mondiale Israélite de Tunisie( AMIT) qui contient également des mises à jour sur les relations bilatérales qui sont malheureusement faibles. Ici nous voyons Israël loin des clichés du Proche-Orient. Je le gère en partenariat avec un confrère à Netanya. J’ai la chance aussi de collaborer avec sites et Blogs excellents.
Nous déplorons grandement les faibles moyens dont nous disposons pour lutter seuls contre les esprits obtus continuent de croire qu’Israël est la source du mal.
Lph : Vos écrits sont ouvertement pro-israéliens. Dans le climat actuel et compte-tenu de vos origines, cette position est doublement courageuse. Quelles sont vos motivations ?
Ftouh Souhail : Mes écrits ne sont pas « pro israéliens ». Mais le vent en poupe est « anti-israélien ». Pire encore, nous assistons à une offensive anti-juive qui se déploie tout azimut au Monde arabe et ailleurs et qui requiert une réponse énergétique de pas par des intellectuels arabes. Une lutte collective est nécessaire aujourd’hui pour n’en pas calmer, mais stopper cette vague antisémite qui vise Israël.
Rappelons-nous la fin des années 30 début 40 en Europe. Israël n’existe pas encore pour défendre les juifs victimes des pires atrocités. Cela a coûté très cher tellement qu’encore aujourd’hui on en parle. Aujourd’hui, le Monde arabe et musulman vit la même période sombre que celle vécue en Europe d’avant guerre.
Les islamistes radicaux pro palestiniens (et certains de leur complices en Europe) veulent aujourd’hui terminer le « travail » d’Hitler. Aujourd’hui, l’islamisme totalitaire, bien caché, derrière la « cause palestinienne », veut en finir avec tous les juifs avec l’aide d’un "nouvel Hitler" musulman cette fois.
Nous ne pouvons pas rester les mains croiser devant les appels inflexibles à la destruction d’Israël. Je ne peux pas défendre l’indéfendable : un projet islamiste qui veut dévorer les juifs .Je ne peut pas soutenir une cause qui appelle à éradiquer de la « Palestine » les Israéliens, de faire de ce pays, une terre judenrein - vide de Juifs.
Un Sondage le mois dernier m’a particulièrement iniquité. Il a montré que 49% des Palestiniens sont en faveur d'attentats contre les civils juifs à l'intérieur des frontières d'Israël. Ce sondage était réalisé par "Media Review Analysis" avec la fondation Konrad Adenauer et il était publié à Ramallah.
En Mars 2009, un autre sondage, conjointement réalisé par l'institut israélien Trumann et l'institut palestinien PRS, a donné presque le même résultat ; 54% des Palestiniens se sont prononcé en faveur d'attentats en Israël contre des civils.
Si on fera des sondages similaires dans les pays arabes, on trouvera hélas les mêmes résultats ou pire encore parmi les populations arabes fanatisées qui soutiennent avec aveuglement les palestiniens et qui réclameront aussi et approuveront encore aujourd’hui les attentats visant des civils en Israël.
Quand ne viendra pas ensuite me dire que vous êtes « pro-israélien » ou « pro-sioniste » ! Nous sommes tout simplement en première ligne dans la défense de la liberté et contre le fascisme islamique. Je dois dire ici que chaque peuple a le droit de mener une vie normale et sereine. Le Peuple Juif a le droit de vivre en sécurité et en liberté en Israël.
Nous menons donc une lutte légitime contre une idéologie politico-religieuse qui prône un second génocide du juif, tant qu’ il est vrai que ce mot "lihoudi" (du genre, le sale Juif) est toujours une source de mépris dans les pays musulmans.
Il est temps pour nous d’en finir avec la haine justifiée par la cause palestinienne. Ceux qui soutiennent systématiquement les revendications palestiniennes devront avoir conscience des projets mis au point par tous les nazis islamistes qui sont derrières. Et ceux des médias arabes qui hurlent « sauvez les terroristes ! » doivent savoir qu’il n’y a aucune équivalence morale entre les nouveaux nazis qui veulent exterminer les juifs et les israéliens qui défendent leur pays et leurs maisons. Il faut choisir entre le bourreau ou sa victime : il n’y a pas de question de rester neutre.
Lph : Beaucoup de vos articles sont publiés dans la presse juive ou qui se réclame du courant pro-israélien. Vous arrive-t-il de participer à des débats ou d'exprimer vos idées sur un terrain plus hostile ?
Ftouh Souhail : Je vois que vous insistez toujours sur l’expression « pro israélien », bien qu’on passe par un nouveau cauchemar antisémite de plus.
Quand le monde fanatique cessera de provoquer et de bombarder les civils israéliens, que le nabot iranien cessera de clamer qu'il veut "effacer Israël de la carte", que les Palestiniens cesseront de soutenir des fous furieux qui utilisent les femmes et enfants comme bombes volantes ; à ce moment là je serai « pro palestinien ».
Contrairement à se que vous suggérer dans votre question, il n’est pas possible de participer à des débats libres dans cette partie du monde .Les journaux et les stations de télévision arabes sont fermés devant ceux qui portent une opinion différente sur ce qui se passe réellement au Proche Orient. Pensez vous que les medias arabes sont démocratiques ? Pensez vous que vous pouvez donner librement votre avis, par exemple, dans ces journaux sur le rapport Goldstone ? Ou vous pouvez expliquer avec honnêteté ce qui s’est réellement passe sur le Navire terroriste turc Mavi Marmara ? Pensez vous qu’il est possible, sur un plateau de télévision arabe, de contester la version palestinienne autour de la mort de Mohammed al Dorra ? Ou alors de rappeler que historiquement le tombeau de Rachel et le Caveau des Patriarches faisaient partis du patrimoine du peuple juif ?
Les médias arabes sont , soient sous contrôles étatiques (impossible d’y accéder puisqu’ils sont conçus pour la langue du bois) , soient des médias privés (comme Al Jazz ira) alors motivés par des considérations purement idéologiques et qui interdisent à leurs employés d’élargir les cercles de réflexion.
J’aimerai bien voir une évolution réelle de la presse arabe (comme il y ‘a dans le reste du monde) mais hélas cette dernière est entre les mains d’une poignée d’individus totalitaires qui découragent les partisans des mouvements libéraux pour la paix. Le genre de presse qu’il y’a en ce moment est censé promouvoir les guerres des conquêtes arabes perdues. Nous voyons chaque jour des chefs de guerres sur nos écrans qui s’expriment librement pour enflammer la rue Arabe.
Seuls les pires antisémites ou les radicaux pro palestiniens sont les bienvenus dans ces médias pour étayer leurs mensonges et faire leurs plaidoyers anti-juifs.
En plus, la stratégie des médias arabes consiste à minimiser ou d’ignorer la souffrance de l’autre parti, puisque les Juifs ou les Israéliens ne sont pas vus ici en tant qu’individus. Outre leurs investissements dans la désinformation, ces médias « idéologisés » ne sont animés de nul souci d’objectivité, de nul devoir d’impartialité, et de nulle éthique, et se retrouvent complices dans la corruption de l’information.
Lph : Il y a quelques temps vous avez fait l'objet de menaces. Craignez-vous d'être victime de représailles de la part d'Islamistes radicaux ?
Ftouh Souhail : Nul n’a mandaté les islamistes à définir la façon dont je dois penser.
Je ne voudrais pas ici revenir sur cette période, mais je dis simplement qu’ils essaient de nous faire peur. Sur le plan légal, ils ne peuvent strictement rien faire contre nous. C'est pour cette raison, qu'ils ont adopté la méthode du harcèlement avec l'espoir de nous faire peur. Ils ne peuvent rien faire pour nous priver de notre liberté de penser et d'expression par le moyen qu'ils emploient maintenant. C'est-à-dire, le harcèlement constant au niveau de nos opinions. Il sera toujours temps de les affronter sur le plan légal par les lois en vigueurs en Tunisie.
Les islamistes agissent comme la mafia. Curieusement, le terme de mafia viendrait de l’arabe « mu'afak » qui pourrait se traduire par ("protection des pauvres"). Selon le modèle des mafias classiques, les islamistes radicaux recourent à l’intimidation, le chantage et la menace. Les fondamentalistes musulmans veulent surtout occuper une place sur la scène politique et même la dominer. Peut importe les moyens qu’ils utilisent !
Heureusement, la Tunisie lutte efficacement contre le terrorisme. Je pense ici que le gouvernement tunisien aura toujours un intérêt à affronter les radicaux, tout comme L'Égypte ou la Jordanie qui promettent la fermeté face aux islamistes. Que ça soit à Tunis, au Caire , A Amman ou à Tel Aviv nous sommes aujourd’hui dans une stratégie de confrontation globale contre le même ennemi.
Lph : Sur Internet, une rumeur faisait de vous un personnage fictif, inventé de toutes pièces pour les besoins de la cause juive et israélienne. Que répondez-vous à cela ?
Ftouh Souhail : Vous savez, les ennemis de Peuple Juif sont constamment enfermés dans une logique négationniste : La Shoah n’existe pas ; Israël n’existe pas ; les milliers des juifs expulsées des pays arabes n’existent pas …et maintenant il prétendent qu’un militant pacifiste est une personnage fictif.
Cette rumeur a été lancée en 2008, sur des sites arabes, et le mensonge s’est vite propager (je vous ait dit que je déteste les mensonges grotesques) .Ces fous qui ont imaginés cette idée sont tellement embrigadés et décervelés par leur environnement lamentable qu’il ont du mal à croire qu’il est possible qu’un des leurs puisse avoir la générosité, le goût du partage et l’élan vers l’autre… le juif israélien.
Le plus malheureux est que récemment, je me suis aperçu que cette rumeur a été reprise par des gauchistes juifs (qui sévissent surtout à Paris). Et ce n’est pas par hasard. Depuis que je me suis manifester publiquement contre l’initiative "J-Call", pétition lancée par l'extrême gauche européenne, en mai 2010, certains gauchisants prétendent que je n’existe pas et que je suis crée pour les besoins de la « l’extrême droite », puisque je suis d’avis que cette initiative suicidaire ne servirait pas la paix au Proche Orient et encouragerait les plus fanatiques au Proche -Orient.
Ces nouveaux négationnistes juifs ont été ridiculisés de me voir faire barrage à cet ignoble appel qui prévoit la capitulation d’Israël. Beaucoup d’ailleurs de gens bien avertis ont été ému de cette initiative. Le premier ministre Benyamin Netanyahu a parlé d’"incitation à la haine".
Devant cette rumeur qui persiste à nier mon existence, je pense qu’il ne faudrait pas que je m'abaisse au niveau de ces nouveaux négationnistes. Je leur dis simplement, excusez-moi d’avoir exister messieurs les négationnistes. Et comme l’énonçait Descartes "cogito ergo sum" = "je pense donc je suis"
Lph : Quel est votre sentiment sur les dernières évolutions du conflit israélo-arabe?
Ftouh Souhail : Tout d’abord une précision importante : je ne reconnais pas la formule « conflit israélo-arabe ». Cette formule fausse est malheureusement très répandue dans le monde journalistique, notamment en Occident. Dans mes écrits je n’utilise jamais cette formule que je trouve trompeuse. Le conflit actuel est limité entre Israël et deux pays arabes (Syrie, Liban) et un pays non arabe (Iran) ou avec des entités ouvertement terroristes (Hamas, Hezbollah).
Nous par exemple, en Afrique du Nord on n’a pas de conflit avec Israël. Non plus l’Egypte, ou la Jordanie, ni même les pays arabes du Golf qui entretiennent le plus souvent des relations non déclarés avec Israël. Pourquoi alors généraliser et dire que le conflit est « israélo-arabe » ? Cette formule n’est plus valable au moins depuis 1979. De tant plus que pour nous particulièrement en Tunisie ou même au Maroc, nous avons une importante communauté en Israël, qui nous lient avec Israël. Nous ne pouvons pas les nier ou sacrifier pour les beaux yeux des palestiniens. Pour moi un tunisien qui est en Israël ou ailleurs passant avant les autres.
Sur les dernières évolutions du conflit « israélo-palestinien », je réalise aujourd’hui malheureusement que les efforts israéliens pour avancer vers la paix sont vus du coté palestinien comme des signes de faiblesse. Ces gens ne comprennent pas les concessions ni la main tendu. On a vu que tous les retraits (Gaza, Sud Liban) ont encouragé les attaques. Les concessions israéliennes ont attisé l'hostilité des groupes terroristes comme le Hamas et le Hezbollah.
Même si chacun de nous aspire à une « véritable Paix », on ne peut pas – de mon point de vue continuer dans la politique munichoise des concessions. Car le jour où, D. en préserve, ils auront des fusées capables d'atteindre Tel Aviv, y compris avec tête chimique ou nucléaire, leur folie ne leur interdira pas de s'en servir.
Je pense qu’il faut tirer les conséquences des évolutions de la situation sécuritaire actuelle où le territoire a été donné littéralement aux terroristes les plus acharnés (Hamas à Gaza, et Hezbollah au sud Liban) sans que les israéliens puissent reçoivent rien en retour, autres que les roquettes et les attentats suicides.
Mr Netanyahu a le choix entre la poursuite de la politique du retrait unilatéral qui encourage le terrorisme à avancer plus ou, au contraire, une gestion politique plus ferme et plus adaptée à la réalité du terrain. Je pense qu’il est un politicien assez intelligent et doué pour faire le bon choix.
J’estime aussi que Mr Netanyahu va prendre progressivement ses distances par rapport à Hussein Obama (qui est déjà en mal de popularité dans son pays) et il va écouter l’opinion publique israélienne. Obama est un homme dangereux et cynique qui joue à double face. Il veut simplement plier Israël par étapes.
Je condamne de ma part cette interférence injustifiée dans les affaires domestiques d'un Etat souverain et j’insiste sur le droit des populations juives à vivre et circuler librement sur l’ensemble du territoire.
Lph : Quel message souhaiteriez-vous faire passer à nos lecteurs, francophones d'Israël?
Ftouh Souhail : Tout d’abord je voudrai leur rendre hommage pour leurs efforts de maintenir et perpétuer la culture et la langue française en Israël. Par leur riche contribution à l’essor de l’économie de ce beau pays centrée sur les activités technologiques, l’innovation, et l’accroissement de la prospérité, ils ont prouvé leur amour éternel pour Israël et ils ont admirablement surmonté les énormes difficultés.
En second lieu, je souhaiterai que la nouvelle année civile 20110 soit pour les francophones d'Israël - et pour l’ensemble des francophones à travers le monde – une année de mobilisation pour notre frère, lui aussi francophone, retenu en otage.
La libération du soldat franco-israélien Guilad Shalit doit être une des priorités de tous les défenseurs de la liberté du genre humain. J’ai la certitude que nos amis francophones d'Israël vont s’investir encore plus pour venir en aide à ce courageux jeune homme qui vit dans les bas-fonds de Gaza. Le cas de Shalit nous démontre encore une fois la carence du monde libre face aux méthodes abjectes du terrorisme anti-juif.
J’ai su récemment que dans les pays d’Amérique du Sud, un million de signatures ont été réunis pour demander la libération de Guilad Shalit. Nous souhaiterions que les francophones à travers le monde réunissent dix millions de signatures en faveur de cet jeune homme qui a été kidnappé en juin 2006 par le Hamas, sur le territoire israélien, et qui n'a eu droit depuis à aucune visite de la Croix Rouge.
J’espère enfin que le nouveau successeur de Mr Daniel Shek, en poste à Paris, puisse convaincre le gouvernement français et la France (qui présidera le G20 en 2011) d’exercer une pression financière sur ceux qui détiennent Shalit en violation du droit international. C’est une aberration absolue que l’argent des contribuables européens soit verser d’une façon continue aux preneurs d'otage.
Je plains la famille Shalit de tout coeur de subir une telle épreuve sans aucun soutien d'une communauté internationale uniquement favorable aux terroristes assassins.
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay
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