Iran-Israël : la guerre ciblée a-t-elle commencé?
Dans le contexte d'une possible intervention militaire israélienne sur les sites nucléaires iraniens, l'explosion samedi d'un dépôt de munitions près de Téhéran - qui a fait 17 morts - alimente les rumeurs les plus folles. La presse israélienne relaie largement lundi l'information provenant d'une source occidentale faisant état d'un sabotage orchestré par le Mossad.
La guerre envisagée par Israël sur le sol iranien a-t-elle déjà commencé? Oui, à en croire Karl Vick, correspondant du magazine américain Time à Jérusalem. Alors que toute la presse israélienne s'interrogeait dimanche sur la mystérieuse explosion d'un dépôt de munitions qui a coûté la vie à 17 Gardiens de la révolution près de Téhéran samedi - listant les autres affaires d'explosions suspectes par le passé - le journaliste confirme l'hypothèse du Mossad, les services secrets israéliens.
"Le Mossad l'a fait", écrit-il, citant une source non identifiée d'un "service de renseignement occidental" qui lui aurait dit : "Ne croyez pas les Iraniens quand ils disent que c'est un accident." Et selon la même source, "d'autres sabotages sont planifiés afin d'entraver la capacité de l'Iran à développer l'arme nucléaire". "Ils n'ont pas tiré toutes leurs cartouches", ajoute-t-il. Une hypothèse possible au regard, déjà, de l'histoire des deux pays, et ensuite des informations dévoilées fin octobre, quand des experts militaires américains suggéraient que les Etats-Unis organisent des opérations clandestines visant à assassiner des commandants des Gardiens de la révolution, l'organe idéologique du pouvoir iranien.
L'architecte de la dissuasion iranienne parmi les victimes
Selon la version officielle, donnée par Téhéran, il s'agit toutefois d'une explosion accidentelle. Le dépôt aurait sauté lors d'un déplacement de munitions. Les autorités iraniennes ne donnent toutefois aucune explication quant à la présence du général Moghadam sur les lieux de l'explosion. Et la petite phrase de l'agent occidental est largement reprise et commentée par la presse israélienne lundi, dont le Haaretz et le Yediot Aharonot. Et la rumeur enfle d'autant plus que le général Hassan Moghadam, considéré comme l'architecte de la force de dissuasion balistique de la République islamique, figure sur la liste des victimes. Dans ce contexte, le commentaire lâché par le ministre israélien de la Défense, Ehoud Barak, n'est pas passé inaperçu. Evoquant l'explosion de samedi, il a déclaré : "Ce serait souhaitable qu'elles [ces explosions] se multiplient."
Dans ce contexte tendu - et alors que le rapport de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), rendu public la semaine dernière, est venu confirmer les doutes des Occidentaux sur la nature militaire du programme nucléaire iranien - les Européens, réunis à Bruxelles lundi, ont affiché leurs divisions sur d'éventuelles frappes militaires sur la République islamique. "Il faut nous préparer à durcir les sanctions pour éviter toute intervention irréparable", a ainsi déclaré le ministre français Alain Juppé, qui s'était déjà opposé la semaine dernière à tout scénario militaire en utilisant les mêmes termes. Même son de cloche en Allemagne, dont le chef de la diplomatie, Guido Westerwelle, a été très clair, déclarant qu'il n'était pas question de "participer à une discussion sur une intervention militaire". "Nous estimons que de telles discussions sont contreproductives et les rejetons", a-t-il ajouté.
Washington freine l'option militaire
Problème, Londres n'envisage pas le dossier de la même façon. Le secrétaire aux Affaires étrangères, William Hague, s'est refusé à rejeter catégoriquement l'hypothèse de frappes militaires contre les installations nucléaires iraniennes. "Nous ne l'envisageons pas en ce moment, nous n'appelons pas à une action militaire ni ne la prônons. Dans le même temps, nous disons que toutes les options devraient rester sur la table", a-t-il ainsi déclaré. Des propos qui font écho aux informations parues dans le Guardian la semaine dernière, selon lesquelles le ministère britannique de la Défense préparerait des plans d'intervention pour participer, aux côtés des Etats-Unis, à des frappes ciblées.
Washington a toutefois semblé freiner ce scénario ces derniers jours, le secrétaire à la Défense, Leon Panetta, estimant dimanche qu'une action militaire aurait un "grave impact" dans la région sans pour autant dissuader Téhéran de poursuivre son projet. Barack Obama a lui promis que la communauté internationale était unie face au programme nucléaire iranien. Mais le blocage de la Russie et de la Chine au Conseil de sécurité pour imposer de nouvelles sanctions à Téhéran pourrait bien, au final, laisser place à l'option militaire.
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