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Les Israéliens convaincus d'une frappe contre l'Iran

 

Les Israéliens convaincus d'une frappe contre l'Iran

 

Le discours pugnace prononcé par Benjamin Netanyahu devant le lobby pro-israélien Aipac à Washington a convaincu l'opinion publique israélienne qu'une guerre avec l'Iran est désormais plus qu'une hypothèse.

Le Premier ministre israélien a notamment fait référence à l'Holocauste, citant une lettre de 1944 par laquelle les Etats-Unis rejetaient une demande de responsables juifs de bombarder le camp de concentration d'Auschwitz. Le message était clair: Israël ne peut compter que sur lui-même pour se défendre.

"En tant que Premier ministre d'Israël, je ne laisserai jamais mon peuple vivre sous la menace de l'anéantissement", a dit Benjamin Netanyahu à l'Aipac après son entretien avec Barack Obama à la Maison blanche.

"Nous avons donné du temps à la diplomatie, nous avons laissé du temps aux sanctions. Nous ne pouvons plus attendre davantage", a-t-il dit.

Ce discours n'est pas passé inaperçu en Israël, où analystes, commentateurs et anciens responsables militaires ont noté le durcissement de ton de Benjamin Netanyahu à l'égard de l'Iran, que l'Etat juif accuse de chercher à se doter de la bombe atomique.

"Le pistolet n'est pas seulement chargé, son cran de sécurité a été enlevé", a déclaré à Radio Israël Uzi Dayan, ancien général et conseiller à la sécurité nationale.

Israël a maintes fois répété qu'il ne laisserait pas Téhéran se doter de l'arme nucléaire et cherché à convaincre Washington d'accroître la pression sur l'Iran pour qu'il renonce à son programme.

Pour les experts israéliens, les sanctions économiques imposées par les Etats-Unis et l'Union européenne ne seront efficaces que si elles sont couplées à une menace sérieuse de frappe militaire.

"OBTENIR" OU "DÉVELOPPER"?

Certains Israéliens ont longtemps pensé que les déclarations va-t-en guerre de leurs dirigeants, qui se sont dits prêts par le passé à bombarder l'Iran avec ou sans l'aide des Américains, étaient une menace en l'air.

Aujourd'hui, les mêmes estiment que Benjamin Netanyahu est allé trop loin dans la surenchère verbale pour rester les bras croisés si Téhéran ne renonce pas clairement à ses ambitions.

"Netanyahu a renvoyé l'image d'un homme qui a pris sa décision", écrit l'éditorialiste David Horovitz sur son site internet, TimesOfIsrael.

Barack Obama a appelé Israël à laisser les sanctions porter leurs fruits et s'il a redit pendant son entretien avec Benjamin Netanyahu que toutes les options étaient sur la table, les mots choisis par les deux hommes traduisent une nette différence d'approche qui pourrait avoir de lourdes conséquences sur le calendrier.

Le président américain a ainsi parlé d'empêcher l'Iran d'"obtenir" la bombe atomique; le Premier ministre israélien de l'empêcher de la "développer".

Cela signifie qu'Israël n'entend pas permettre à Téhéran de se doter des équipements nécessaires à l'assemblage d'une bombe, expliquent des officiels israéliens. En d'autres termes, Tsahal pourrait juger nécessaire de frapper militairement l'Iran beaucoup plus tôt que l'armée américaine.

"Nous voulons que l'Iran soit privé de la capacité à développer une bombe, pas seulement qu'il renonce à son programme nucléaire", dit un responsable sécuritaire sous le sceau de l'anonymat.

"DOCTRINE BEGIN"

L'approche israélienne est fidèle à la "doctrine Begin", du nom de l'ancien Premier ministre Menachem Begin, qui avait fait bombarder en Irak la centrale nucléaire d'Osirak en 1981 sur la seule suspicion qu'elle pourrait un jour servir à produire du plutonium pour des têtes nucléaires.

Ce raid aérien avait été présenté comme une démonstration qu'Israël "ne permettrait en aucune circonstance à un ennemi de développer des armes de destruction massive menaçant le peuple israélien".

Le discours de Benjamin Netanyahu devant l'Aipac est, à ce jour, le témoignage le plus explicite de son adhésion à cette doctrine de frappe préventive.

Reste néanmoins au Premier ministre israélien à convaincre son opinion publique du bien-fondé d'une guerre. Un sondage a montré la semaine dernière que moins d'un Israélien sur cinq est favorable à ce que Tsahal bombarde l'Iran seule.

"L'Israël d'aujourd'hui ne souscrit pas (à la doctrine Begin)", souligne Uri Dromi, ancien porte-parole de feu le Premier ministre Yitzhak Rabin, qui compare l'escalade verbale entre Israéliens et Iraniens à l'atmosphère qui avait précédé le début de la Première Guerre mondiale.

"Il (Netanyahu) nous prépare à la guerre mais je ne suis pas sûr qu'on y soit prêts. Ce n'est pas un calcul, c'est un pari", dit-il.

Beaucoup d'Israéliens doutent que leur pays soit préparé aux conséquences d'une guerre, qui se traduirait très certainement par des représailles de l'Iran et, peut-être, de ses alliés du Hezbollah au Liban.

Cela ne tient donc pas du hasard si, quelques heures après le discours de Benjamin Netanyahu à Washington, le ministre de la Défense civile, Matan Vilnai, a envoyé ce message par sms: "Israël a la capacité opérationnelle d'intercepter des missiles d'où qu'ils viennent. Aujourd'hui, chaque citoyen sait qu'il a la responsabilité de se préparer à faire face à une situation d'urgence."

Avec Dan Williams et Allyn Fisher-Ilan, Tangi Salaün pour le service français, édité par Gilles Trequesser

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