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Si vous voyez un flic... tirez ! Chroniques de Gaza-sur-Seine

 

Si vous voyez un flic... tirez ! (1ère partie)(info # 012608/11) [Exclusif]

Par Jean-Paul Ney © Metula News Agency

Chroniques de Gaza-sur-Seine

Permettez-moi de vous raconter une histoire, une histoire de journaliste, plutôt une histoire de reporter, c'est à dire celle d'un journaliste qui ne reste pas derrière son bureau à attendre les communiqués et autres dépêches de l’AFP.

C'est une histoire qui va vous donner le tournis, en apprenant ce qu'il se passe réellement en France ; cette histoire est impartiale, les faits ne sont ni amplifiés ni déformés, simplement rapportés, dans la meilleure tradition de la Ména. Ces faits ne sont passés par aucun filtre parigo-médiatico-politique, aucun rédacteur en chef "aux ordres" (d'une certaine pensée) n'aura pu y apposer ses modifications ou son veto (appelons un chat, un chat : la censure).

Un rappel d’abord : Lors des émeutes récentes de Londres, un message avait été diffusé via la messagerie BlackBerry, puis sur les réseaux sociaux ; la teneur en était assez explicite : "Que tout le monde, de tous les coins de Londres, se rassemble dans le cœur de Londres (centre) OXFORD CIRCUS.

Les magasins vont être dévastés, donc ramenez-vous pour choper des trucs (gratos). Que les flics aillent se faire foutre, allons les dégager avec notre émeute ! : Oh, C’est une guerre raciale là, donc si vous voyez un frère… SALUEZ-LE ! Si vous voyez un flic… TIREZ !".

Cette histoire commence un soir d'hiver parisien, plus exactement, le 25 novembre 2007 à Villiers-le-Bel. Quelques jours auparavant, deux adolescents sont tués dans une collision avec un véhicule de police.

Les media éviteront soigneusement d'insister sur le fait que les deux gamins roulaient vite, très vite, sur une mini-moto, sans formation, sans casque, et en totale violation du code de la route. Que dit la loi ? "Les engins à moteur (mini-motos, moto-cross, pit-bike, dirt bike ou quads), dont la vitesse peut excéder, par construction, 25 km/h, et qui ne sont pas soumis à réception CE, ne sont pas conçus pour circuler sur la voie publique ou dans les lieux ouverts à la circulation ; ils n’y sont donc pas autorisés".

Le choc a eu lieu sur la voie publique, et, selon un médecin spécialiste de ces questions, "s'ils avaient porté des casques homologués, les adolescents seraient sans doute en vie ce jour".

Pourtant, rien n'y fait, Villiers-le-Bel s'enflamme. Les rédactions envoient leurs meilleurs reporters, ceux qui ont déjà connu les émeutes de 2005 et ceux qui sont allés couvrir des conflits, "interdits aux stagiaires et aux jeunes JRI". L'ordre est clair, nous savons tous que ça va faire mal et que ça risque de durer...

Il est 22h et je fonce dans le 93, casque lourd et gilet pare-balles, oui, ça tire déjà sur les flics à Villiers-le-Bel, ce que me confirme un policier des Renseignements Généraux.

J'arrive dans le chaos, effectuant une inspection visuelle de la situation, ainsi que du poste de commandement. Prenant mes marques, je file un équipage d'une bac [Brigade Anti-Criminalité] départementale rappelée en renfort. Je croise les policiers de la Bac 75N de Paris, puis ceux de la CS, la compagnie de sécurisation, tout le monde est sur le front. Les véhicules brûlent, des vitrines sont éclatées, des pillages ont eu lieu dans le centre-ville.

Je me trouve à quelques mètres d'une compagnie de CRS qui avancent vers des barricades en feu, non loin d'un rond-point. Après avoir fait face à plus d'une centaine d'individus cagoulés ou masqués, les arrosant de projectiles divers, dont des billes de roulement en métal, des pommes de terre bardées de clous, des bouteilles et des éléments de barbecue, l'avancée des flics pour une mission de restauration de l'ordre se fait d’abord sans encombres majeures.

Puis soudain, c'est l'embuscade. Violente ! Cocktails Molotov, pavés, tirs à l'arme de chasse et coups de feu semi-automatiques ; plusieurs policiers seront blessés après s'être dé-encerclés grâce à l'aide de renforts arrivés rapidement sur les lieux.

Un gradé des CRS est touché au niveau de l'œil, sa pommette saigne abondamment, un autre policier s'étant porté à son secours se retrouvera face à un individu armé qui fait feu, le jeune policier de 27 ans reçoit une quarantaine de plombs dans le corps et au visage.

Le temps s'arrête pour moi, je vois ces scènes de guérilla urbaine, ces policiers blessés, j'hurle en direction de leurs collègues qui arrivent au loin, pour les avertir qu'il y a danger de mort, qu'il faut vite les secourir. Dans ces conditions, impossible de faire mon travail de journaliste : je dois sauver ma peau et celle de mes concitoyens. Ces images sont gravées à jamais dans ma mémoire, l'effet de surprise fut total.

"Il y avait une volonté de lyncher, de tuer" dira l'un de ces policiers à la presse. La presse qui, hormis une poignée de courageux confrères, n'a fait que reprendre les dépêches de l'AFP, dont le correspondant se situait bien à l'abri des projectiles.

Lors de la deuxième nuit d'émeutes à Villiers-le-Bel, des tirs de Kalachnikov seront entendus, des douilles retrouvées et des photographies de jeunes, armés de pistolets feront le tour du monde. Il est alors décidé d'employer le RAID, unité d'élite de la police nationale. Le "militant"-flingueur principal est embusqué dans l’une des tours, non loin de la ZAC. Des Tireurs d’élite de Haute Précision, les THP du RAID, sont déjà postés sur les toits alentours. La troisième nuit sera beaucoup moins violente.

"J'ai sorti mon arme, je l'ai sortie, je fais du tir à un très haut niveau. Ce soir-là, la seule fois où je l'ai sortie, nous étions vraiment en danger de mort. J'ai sorti l'arme et j'ai visé, je n'ai pas tiré parce qu'on m’a évité de le faire, pour ne pas donner d’alibi à des violences supplémentaires, et peut-être enclencher une escalade incontrôlable.

J'ai pris un plomb parce que je n'ai pas tiré, je paye cher, encore aujourd'hui, de ne pas avoir pu neutraliser cet individu qui a fait feu pour tuer. Je ne comprends pas comment il n'y a pas eu de morts dans nos rangs, on a beaucoup, beaucoup de chance. Saint Martin a dû entendre nos prières [Saint Martin est le saint-patron de la Police, selon le rite catholique. Nda.].

Je pense que les années qui arrivent seront d'une grande violence ; nous ne sommes plus respectés, parce que la justice ne fait pas son travail : les juges sont responsables, les magistrats doivent répondre de leurs actes.

Les parents n'ont pas le droit d'abandonner, ce n'est pas une excuse, c'est vraiment trop facile de s'apitoyer sur son sort à cause de la "société". Nous sommes pris entre trois feux : la justice inexistante, des politiques sans courage, et des citoyens qui nous détestent".

Lors de ces émeutes, 119 policiers seront blessés, donc cinq gravement. Aucun chiffrage exact sur les tirs directs contre des policiers ne sera établi.

Une autre histoire sur laquelle j'ai enquêté, juste après mon retour d'Afrique :

Dimanche 17 mai 2009, Cité des 4000 à la Courneuve, dans le malfamé "neuf trois" (93). Il est 2h30, et, dans le fourgon de police se trouvent deux gardés à vue, dont l'un interpellé la veille parce qu'il avait tiré à la grenaille sur les policiers.

La cité semble calme et c'est la routine pour les policiers qui doivent transporter ces délinquants vers l'hôpital de Bondy pour un examen médical, possible dans la procédure de garde à vue.

Arrivés à un rond-point, la routine va se transformer en enfer : deux véhicules bloquent le fourgon de police, puis l'un des occupants des deux véhicules tire à l'AK-47, alias la célèbre Kalachnikov, une arme de guerre.

La riposte des policiers ne tarde pas, ils mettent en fuite les agresseurs. Cependant, pendant les échanges de feu, l'un des gardés à vue parvient à s'échapper du fourgon ; il sera rapidement rattrapé grâce à la dextérité et au courage des policiers. Dans cette embuscade, à l'irakienne, par chance, aucun policier n'a été blessé.

Trois impacts de balles et plusieurs étuis (douilles) seront retrouvés sur le fourgon de police, dont un, à la hauteur de la portière passager. "Le souffle de la mort n'est pas passé loin", commentera alors un policier. Le parquet ouvrira une enquête pour "tentative de meurtre en bande organisée" et "tentative d'évasion en bande organisée".

Quelques mois plus tard, le 26 mai 2010, les trois suspects dans cette affaire, alors en détention, seront libérés par la cour d'appel de Paris. Ces trois suspects, mis en examen et écroués, ont moins de 26 ans et un casier judiciaire déjà bien fourni. Policiers et syndicats sont dépités, l'affaire fait un mini-scandale, et la poussière retombe. La justice à trois vitesses vient de passer : celle appliquée en France, celle appliquée dans le 93, et celle appliquée pour les puissants.

L'un des magistrats du parquet de Bobigny déploie, face aux journalistes, un vocabulaire bien rodé : "Nous avons retrouvé des douilles de calibre 7.62mm, qui sont assurément des munitions de guerre, mais pas l'arme utilisée. Les impacts relevés sur le véhicule sont aussi ceux de munitions d'armes de guerre. Mais rien ne nous permet d'affirmer, pour l'instant, que ces munitions aient été tirées avec une arme de guerre. Ces munitions peuvent être tirées avec d'autres armes. Des armes trafiquées par exemple. C'était peut-être une arme trafiquée, ça peut arriver".

Etant moi-même un spécialiste des armes, auteur de plusieurs ouvrages sur ce sujet, la seule bidouille possible consiste à transformer un pistolet à blanc en arme à projectiles ; mais l'usinage n'est pas simple et il est dangereux : le système peut vous péter dans les mains.

Voilà donc ce magistrat ridicule, qui pense que l'on peut tirer du calibre 7.62mm en trafiquant une carabine à plombs... Voilà, en France, ce qui justifie de pouvoir sortir de prison après avoir été appréhendé dans le cadre d'une tentative de meurtre sur agent de la force publique...

On se trouvait toutefois au début de l'impensable avec ce qui s'était déroulé ce fameux soir : jamais une embuscade de la sorte, et pour si peu, n’avait été préméditée avant cela. Jamais l'intention de tuer un policier, de sang-froid, avec une arme de guerre, n’avait été conçue aussi près de chez nous.

"Nous sommes à Bagdad ou à Gaza, nous sommes en guerre. Chaque soir, quand je prends mon flingue et que je le mets à la ceinture, je me dis que j'ai un risque élevé de le sortir, et un risque très élevé de m'en servir. Mais face à une arme de guerre, je fais quoi ?

Le type en face peut avoir un chargeur de plus de 30 cartouches, moi, avec mes magasins de 15 bastos, au coup par coup, j'aurais du mal à riposter... Autant nous donner des pistolets à eau", confie un policier de la BAC 93.

"Tirer sur les flics" est donc devenu un mot d’ordre courant, et les "militants" de Gaza-sur-Seine n'ont pas attendu les évènements de Londres pour le mettre au goût du jour.

Les experts intermittents de la télévision, les "bobos-penseurs parisiens", et autres conseillers élyséens se sont succédé dans divers media pour relativiser un tel message.

Gauche et droite minimisent, pendant que l'extrême droite de Marine Le Pen évite tout amalgame, se contentant de marque des points, hélas...

"C'est un appel au meurtre", confirme un policier français, ex-Renseignements Généraux, "il y a des armes dans la majorité des banlieues des grandes villes européennes ; en 2005, lors des émeutes, et en 2007, seule une toute petite partie de ces armes a été utilisée, le reste est très bien caché, les poudrières sont prêtes, juste au cas où".

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