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Tunisiennes: état d’alerte maximum !

 

 

Tunisiennes: état d’alerte maximum !

 

 

Les femmes arabes s’interrogent encore aujourd’hui sur la voie à choisir pour un véritable parcours des droits de l’Homme et de la démocratie. Machiavel disait à juste titre que  » la meilleure forteresse des tyrans c’est l’inertie des peuples » et pour les femmes du monde arabe, l’heure est à l’action et à la vigilance, car aujourd’hui, rien n’est encore acquis. En Tunisie le modèle paritaire féminin est en danger. L’Etat est peu fiable, l’économie à genoux, les récupérations de tous bords font loi, le pouvoir islamiste en place tire parti de l’argent du Golfe et muselle par la terreur le citoyen. Autant dire que se tailler une place « au féminin » quand on est une tunisienne laïque et moderniste relève de l’exploit!

Un état moderne est à reconstruire deux ans après la Révolution du jasmin, mais embrassera-t-il pour autant de plein gré la parité ?

Les profonds remous politiques qui ont secoué le monde arabe permettaient d’espérer une nouvelle lecture démocratique de l’enceinte géopolitique de la région. Pour beaucoup, la fenêtre du « jasmin » augurait de nombreuses attentes démocratiques pour la défense des droits citoyens, des droits de la personne, du pluralisme politique et de la liberté de la presse qui faisait cruellement défaut depuis des décennies. Pourtant, l’espoir a très vite laissé place aux désillusions, notamment chez les femmes, car le fait révolutionnaire, aussi heureux soit-il, a plongé les tunisiennes, pionnières en matière de parité, dans un état d’alerte maximum face à la régression insidieuse, alimentée par la doctrine passéiste du pouvoir islamiste.

Quotidiennement, les acquis des femmes tunisiennes sont remis en cause par un pouvoir politique interprétant les textes religieux en ne laissant aucune ambivalence sur le rôle dévolu à la tunisienne dans le futur islamiste du pays, qui d’égale de l’homme sera reléguée à complémentaire!

Une démocratie au féminin qui se déconstruit dans la douleur

Travestir la religion pour les besoins de la politique est l’acte premier du régime islamiste en place. Quand on prend dieu en « otage » tenir tête relèverait de l’impiété. C’est sur ce discours que le gouvernement embrigade les populations « vulnérables » qui, à défaut d’autres références et de réflexion s’en remettent à Dieu. Depuis toujours l’homme a interprété les versets coraniques en donnant une dimension masculine du divin, « l’homme étant présenté dans toute sa suprématie et la femme dans une posture inférieure » explique l’universitaire et exégète coranique tunisienne Mongia Souahi. La femme serait la moitié de l’homme, elle n’aurait pas le droit d’étudier de travailler, de faire de la politique. Une interprétation erronée largement utilisée par le pouvoir en place.

Pourtant la femme est aimée et choyée dans le Coran, insiste Mongia Souaïhi, l’une des rares islamologues femmes dans le monde arabo-musulman à avoir traduit le Coran « Dans le hadith Nabawi et dans le comportement du prophète et de ses amis, les femmes étaient respectées en tant qu’être humain à part entière ; Khadija elle-même était professeur, c’était une femme d’affaires une politique. Il y a eu des femmes qui se sont opposées à Omar Ibn El Khattab. Il y a eu des femmes qui se sont élevées contre Mouaawi Abousofiene ; elles étaient activistes et elles ont parlé des problèmes qui taraudaient leur société. Rien dans les écrits ne prouve « que la femme est la moitié de l’homme » explique l’islamologue. Mais, comme dans toutes les religions monothéistes qui sont dominées par les hommes, et dans toutes les sociétés qui se réfèrent à ces religions, les femmes sont considérées comme un être de seconde zone. Les exégètes du 18e et du 19e ont malheureusement largement abondé dans ce sens et rares sont ceux qui ont pris la défense des femmes à l’exception du tunisien Mohamed Tahar Ibn Achour.

Pas de démocratie sans égalité !

C’est le slogan lancé par les femmes du Monde arabe et notamment les tunisiennes à la sortie des révolutions. Aujourd’hui, du pays du jasmin aux rivages du Nil, rien n’est gagné mais tout est à perdre. Car le monde Arabe se recroqueville dans un obscurantisme rétrograde.

Sophie Bessis, Secrétaire générale adjointe de la FIDH estime qu’ «une démocratie sans égalité des sexes serait une démocratie tronquée».

L’histoire de la Tunisie démontre que c’est grâce à Bourguiba que les droits des femmes ont été inscrits dans le code du statut personnel. Bourguiba avait un projet de société durable qui inscrivait les droits des femmes au même titre que ceux des hommes. Le régime de Ben Ali, critiquable sur bien des plans, a poursuivi dans cette voie en améliorant le code du statut personnel. Aujourd’hui tout ceci est  insidieusement remis en question, le pouvoir utilisant un double discours, l’un pour l’étranger, « le code du statut personnel ne sera pas révisé », l’autre pour l’auditoire tunisien, « les femmes tunisiennes ont trop de droits ». En fait que veulent changer les islamistes du code de la famille ? C’est rendre légale la polygamie, interdire l’adoption plénière, revoir les règles du divorce, et réintroduire la tutelle matrimoniale. Ce sont là les points qui fâchent dans une société musulmane moderne et historiquement laïque, points que les islamistes retoucheront au nom de Dieu si les tunisiennes ne sont pas vigilantes.

Entre espoir et crainte, la révolution du printemps arabe version féminine, est encore en train de se chercher la place qu’elle mérite d’avoir. Et pour faire face, la femme de la rue, mais aussi la femme intellectuelle et celle de la classe nantie, doivent peser de tout leur poids sur l’autel de la laïcité et de la parité. Un travail laborieux mais nécessaire car l’’islamisation radicale a planté « sa tente » dans la région et la Tunisie en subit les stigmates, mettant en péril les acquis des femmes qui ont toujours été un modèle pour l’Afrique et le Monde.

Partout dans le monde arabe face aux secousses du printemps arabe, le combat des associations de défense des droits des femmes pour l’égalité est plus important que jamais. Car l’heure est grave et il faut être vigilant pour préserver les acquis. Il faut refuser les conceptions qui relèvent du passé. La tâche est lourde pour les modernistes face au conservatisme Car la Révolution de la place Habib Bourguiba et la place Tahrir a lâché ses démons !

Après le printemps, l’hiver pour les femmes

L’un des défis majeurs pour les Tunisiennes.au cours de cette post-révolution tourne principalement autour de la question du pouvoir et de leur statut. Et ce n’est pas une question de chiffre : Qu’importe si le Parlement tunisien compte 23% de femmes contre 20% pour le Parlement français s’il s’agit de femmes qui ne représentent pas la population dans sa globalité et qu’elles ne s’expriment que dans le sens du pouvoir islamiste qui les a intronisées!

Car c’est bien là le leurre politique d’Ennahda. Les femmes libérales exigent que la Constitution tunisienne soit garante des Droits des Femmes avec deux articles non négociables : La séparation du religieux et du politique et l’égalité entre les femmes et les hommes dans tous les domaines, conformément à la CEDAW et à la levée des réserves annoncée par l’ancien pouvoir et qui doit être concrétisée… Il est indispensable que les réformes politiques garantissent le caractère constitutionnel et irrévocable de ces droits qui sont les garanties indispensables pour restaurer la confiance entre les différents acteurs politiques et les convaincre qu’aucune des parties ne sera dépossédée des promesses de la révolution de janvier 2011.

Si la Tunisie a créé un néologisme dans le monde arabe avec sa révolution, il reste qu’elle n’est pas finie. Car la libération des peuples et des femmes sont inséparables. Toute société qui reposerait sur un lien de domination hommes/femmes est une société qui bloque la dynamique sociale.

Aujourd’hui, la bataille est enclenchée et le bras de fer n’est pas encore gagné. Les femmes doivent être à l’écoute de tous les discours politiques diffusés dans les médias, être à l’affût du moindre indice qui met en péril les Droits des Femmes et la Démocratie.

La révolution a libéré la parole mais non les femmes

Aujourd’hui, tout le monde parle ; Toutefois en politique ce ne sont pas ceux qui parlent qui gagnent mais ceux qui ont les manettes du pouvoir,  même si c’est par l’argent et la force qu’ils les ont obtenues. Pour le nouveau régime islamiste en place, la manne financière (venant de l’étranger et destinée sinon à déstabiliser, du moins à faire rentrer le Maghreb dans un islam plus radical) est importante et les militants du parti Ennahdha, forts de décennies d’opposition exilée, restent bien structurés, capables de faire du prosélytisme dans les zones les plus reculées du pays, proposant un programme politique flatteur pour la frange masculine de la population. Qu’importe les répercussions effroyables pour les femmes.

Le parti islamiste a bien peaufiné son programme. Et il en révise l’emballage, façon marketing, à chaque fois qu’il y a des écarts décriés par le peuple tunisien ou la communauté internationale. Une stratégie de façade pour contrecarrer les attaques et garantir que le contrat CDD du parti islamiste Ennahdha, devienne un CDI.

Appuyés par les financements de certains pays « amis » (Qatar et Arabie Saoudite) désireux de wahhabiser la région, avec, au moins à l’origine, la complicité tacite des Etats Unis, l’étau se resserre de plus en plus sur la population moderniste tunisienne. Et les dérives mafieuses de l’ancien régime ou les arguments primaires d’un populisme rétrograde feront long feu et alimenteront ce travail d’endoctrinement des consciences populaires dont le cœur de cible reste les populations vulnérables devenues majoritaires dans le pays !

Paradoxalement, les femmes sont aussi responsables de ce qui arrive. Car l’élite intellectuelle et la petite bourgeoisie que l’on voit déambuler et scander des slogans dans les rues, celle qui craint de perdre ces acquis de plus de cinquante ans, ce n’est pas la femme de la Tunisie profonde. Cette femme, elle est reconnaissable entre toutes et pourtant on l’a longtemps cachée. C’est la femme du rif, celle qui se lève dès potron-minet et jusqu’au soir travaille sans réel espoir d’une vie meilleure. Celle qui vit dans les zones les plus stériles et reculées du pays sans eau sans électricité, sans mari parti à la ville chercher du travail. C’est aussi cette femme de la banlieue ou des bidonvilles de la capitale qui n’arrive pas joindre les deux bouts et qui accepte des petits boulots saisonniers. C’est la laissée pour compte de trois régimes successifs et qui n’en a que faire de la constitution. Car rien ne changera pour elle !

Elle ne sait pas ou à peine lire et écrire, elle ne connait pas ses droits, et cette révolution une nouvelle fois l’aura oubliée. Quand le lien social est cassé et que le visage de la Tunisie au féminin se révèle si contrasté, que la pauvreté est beaucoup plus profonde que l’on pense, que l’hermétisme et l’individualisme sont à leur comble, l’endoctrinement religieux est aisé. Surtout s’il est accompagné de quelques billets pour aller « bien » voter quitte à faire le lit de l’islamisme.

Comment unifier toutes ces femmes tunisiennes autour d’un projet équitable et démocratique qui les incluent toutes dans leur diversité sociale ? Comment parler à toutes ces femmes, quel dénominateur commun leur trouver ? Pour l’intellectuelle, la démocratie rimera avec parité, pour la moins nantie, elle rimera avec pain.

Femme populaire, femme vulnérable : Femme Ennahda !

Qui sont ces filles d’Ennahda qui envahissent peu à peu le visage politique et social du pays ? À première vue, elles ne ressemblent en rien à la fille de Bourguiba ni à celle de Ben Ali.

Ces femmes sont les filles du nikab, du voile, de la burka, ces coutumes vestimentaires d’un autre temps étrangères aux mœurs de la Tunisie moderne, en parfait désaccord avec son histoire récente et son héritage de carrefour des civilisations. Des traditions qui viennent de loin, de ces pays ou « démocratie » est une insulte et « esclavage » la philosophie de la classe dominante ; mais qui gagnent inexorablement du terrain. Idéologie et doctrine religieuse qu’importe, quand il y a un vide tout est permis, surtout pour prendre le pouvoir.

Le travail de ces mouvances conservatrices d’un autre temps date de plusieurs décennies; ce n’est pas un phénomène nouveau, en tout cas, pour les laissés pour compte de la Tunisie. Même si le Monde et une certaine frange de la population se sont longtemps fourvoyés dans cette image idyllique de carte postale d’une Tunisie stable et développée. Plusieurs visages de cette même Tunisie étaient cachés, et entre faux discours politiques et condescendance du Nord, on a tous fini par les occulter totalement. Deux ans après la révolution, les tunisiennes sont désemparées et désunies. Les deux franges de la population se sentent trahies. Et l’espoir même d’une cohabitation entre elles, qu’elles soient du bord moderniste ou de l’aile islamiste, reste illusoire. Les antagonismes sont flagrants par méconnaissance de l’autre ou par méconnaissance tout court. Or quand on méconnait ses droits, comment pouvoir les défendre ?

Pour ces femmes qui se sont rangées dans les mouvances islamistes, le retour à la polygamie ne serait pas inquiétant au contraire, certaines l’appelle de leurs vœux. C’est véritablement cette catégorie-là qui est en danger. Ces femmes ne sont pas encadrées, elles ne sont pas sensibilisées, elles ne sont pas formées politiquement. Et sont une cible facile pour les islamistes. Tout simplement parce que c’est une catégorie de personnes martyrisée du temps de Ben Ali. Aujourd’hui, Ennahdha profite de l’héritage terrible de Ben Ali qui a sali l’image de la Tunisie tout en ayant réprimé les poches de pauvreté de son pays.

Bien entendu, c’est par l’éducation que les évolutions pourront s’ancrer ; mais là, nous sommes dans l’urgence. Et il faut agir, vite pour contrecarrer le lavage de cerveau qui s’insinue dans la société. Les femmes doivent bénéficier d’une véritable liberté d’expression qui seule peut leur donner les moyens de communiquer leurs convictions à cette partie de la population qui n’a pas eu la chance de les écouter, couche défavorisée, exclue du système scolaire et de l’emploi et qui pourrait être tentée par l’antiféminisme. Pour cela, il faut donner la parole aux femmes compétentes dans tous les domaines, car le danger vient de l’ignorance, du paupérisme et de la cupidité.

Démocratie libérale, essoufflements et manque de vision

Le discours des libéraux est confus et ne laisse paraître aucune stratégie inclusive sur le plan social. Il ne coupe pas avec l’islamisme, et certains pour accaparer le pouvoir ont fait la cour à l’électorat islamiste, trahissant ainsi les électeurs qui leurs avaient fait confiance.

Il est crucial que les libéraux sensibilisent les jeunes aux pratiques démocratiques pour les prémunir contre la propagande de la récupération islamiste destinée à reproduire les schémas de la dictature théologique. Stratégie d’endoctrinement religieux qui est déjà mise en place, avec les écoles wahhabites, Rached Ghannouchi n’ayant pas caché qu’il allait travailler les mentalités à la base voire dès la prime enfance car « ce sont les enfants qui nous intéressent, la génération Bourguiba et post Ben Ali, c’est trop tard »…

Face aux enjeux politiques, libéraux et démocrates, qui n’ont que la parole et la rhétorique pour seuls arguments et qui nagent dans une logorrhée sans fin, sont incapables de se réunir autour d’une table et de décider d’une stratégie nationale pour sortir le pays de l’impasse : le modèle démocratique libéral en Tunisie restera une utopie. Entre individualisme politique et incapacité de décrypter et de trouver des solutions aux réalités sociales qui plombent le pays, l’opposition court droit dans le mur et la Tunisie moderniste risque alors de sombrer dans une théocratie théologique pour plusieurs années.

Réformer la pensée arabe s’agissant des femmes et se rappeler que depuis l’antiquité, l’histoire est tissée par les femmes

Depuis la fondation de Carthage qui a résisté aux invasions, le rôle des femmes tunisiennes a toujours été prédominant. Avec la phénicienne Didon qui a fondé Carthage, mais aussi les Saintes comme Sayda Manoubia, toutes ont marqué l’histoire de ce petit pays aux grandes âmes. L’histoire contemporaine suite à la révolution du printemps est moins indulgente, car il y a véritablement une régression dans les mentalités depuis la prise de pouvoir islamiste.

Les femmes ont toujours compté, la Révolution tunisienne, celle du jasmin, celle qui devait augurer le réveil arabe, s’est faite par les hommes mais aussi par les femmes. La Tunisie est bien le seul pays du Monde arabe à avoir porté sur les épaules des hommes des femmes, lors des manifestations pour éradiquer la dictature.

Les femmes étaient au premier rang, défiant tout danger, elles ont fait la révolution, elles se sont battues avant et après la révolution et aux côtés des hommes pour avoir la loi sur la parité. Paradoxalement malgré leur plein engagement, les femmes n’étaient pas nombreuses en tête des listes électorales (et donc en position d’éligibles). Un état de fait qui prouve encore une fois le machisme refoulé de la Tunisie, pourtant aguerrie aux périodes précédentes de Bourguiba et Ben Ali favorables aux femmes. « On peut avoir des droits mais si la mentalité n’est pas prête, que l’on n’a pas la culture pour, alors tout cela ne servira à rien, la femme passera toujours après l’homme »! Bien que le Coran soit écrit pour tous, c’est le wahhabisme, le soufisme, le sunnisme, le chiisme qui en modifient voire en altèrent la compréhension. Dans certains pays arabes, ce cliché perdure, la femme est soumise dans l’ombre. Pour s’en sortir, il faut des femmes qui interprètent le coran à leur façon  » … je suis une révolutionnaire dans le milieu, en Tunisie j’ai eu un très bon accueil, mais dans d’autres pays arabes j’ai reçu des lettres de menaces, des lettres anonymes où l’on menaçait mon intégrité physique » explique l’islamologue Mongia Souahi. Dans plusieurs colloques on m’a apostrophée en me taxant de non-croyante, de pro-occidentale… Une bataille longue et difficile, aujourd’hui rendue plus périlleuse avec la prise de pouvoir par les islamistes, mais que les libéraux et les démocrates du pays plébiscite. Le chemin sera long mais vital pour les femmes arabes.

La situation exceptionnelle des Tunisiennes dans le monde arabe a certes été entamée par la propagande islamiste des chaînes satellitaires arabes et leurs dérives obscurantistes. De plus en plus de femmes se sont voilées mais de nombreuses parmi elles se disent démocrates aussi et ne sont pas prêtes de renoncer à leurs droits.

La situation de flou artistique politique et les errements des dirigeants en place ont eu raison du rêve révolutionnaire. Pire encore, la femme en plus de devenir un alibi religieux est également instrumentalisée politiquement. Une façon pour le régime en place, de faire diversion en laissant d’obscures Imams prêcher le nécessaire confinement de la femme tunisienne qui idéalement serait reléguée à n’être qu’un objet de consommation sexuel. Des discours d’un autre âge, dans un pays qui n’a jamais été ni de près ni de loin confronté à l’obscurantisme barbu ou voilé.

Alors oui, il faut réagir afin de défendre les droits déjà acquis. Et c’est là que des initiatives comme celles d’Enda, ONG qui facilite le microcrédit pour les femmes peut intervenir en vue d’autonomiser économiquement la femme vulnérable, lui permettant ainsi de choisir son destin et de commencer à exister dans le tissu sociétal.

Le modèle bourguibien avait donné un vrai coup de fouet pour lutter contre la pauvreté, la discrimination, pour une meilleure vie sociale. L’accès à la santé et à l’éducation sont les piliers du développement durable au féminin. Et pour reprendre la parole d’un philosophe arabe, « éduquer un homme c’est éduquer un individu, éduquer une femme c’est éduquer tout un peuple » !

Les tunisiennes sont décidées à faire entendre leur voix, elles veulent rester un modèle pour la région, conscientes que leur Tunisie pourrait être un laboratoire démocratique pour le monde arabe. Pour cela, il faudra proposer un projet de société qui parle à toutes « les Tunisie ». Un projet de cohabitation qui serait une alternative viable pour tous en souvenir et en hommage à tous ces martyrs de la révolution, aux militants tombés sous la violence politique religieuse, de Bouzizi à Chokri Belaid sacrifiés sur l’autel de la liberté politique.

Mais combien faudra-il de Chokri Belaid pour faire changer les mentalités, faire comprendre que l’émancipation de la femme ne se fera jamais contre mais avec l’homme ? Aujourd’hui, il faut des actions concrètes en faveur des populations civiles, des jeunes et des femmes. Créer de l’emploi pour générer des revenus. Répondre aux racines de ce mal qui a embrasé la région, cette même désespérance sociale qui au lieu d’être éteinte s’est encore plus enflammée, deux après les révolutions.

La Tunisie est encore un champ exploratoire. La question des femmes dans le Monde arabe est et restera toujours très complexe et il faudra toujours tenir compte des diversités culturelles et des disparités sociales. Pour autant, toutes resteront esclaves de cette situation accablante tant que les mentalités à leur égard ne changeront pas.

Donnons-leur un droit à l’éducation, à l’autonomie financière, responsabilisons les en tant que citoyennes. Se dire que ce sont les mères et les femmes qui vont élever et former les hommes de demain. Les réduire et les invisibiliser fragilisera l’homme de demain, celui qu’elles portent en leur sein.

Avec des politiques d’égalité homme femmes, la société toute entière est gagnante. Si on a du souffle que l’on est aidées, que l’on se met en réseau, que l’on se respecte les uns les autres, qu’on admet la pluralité d’opinion dans tous les forums du Monde et les grandes instances internationales, on finira enfin par comprendre que la dimension genre est très importante qu’elle fait partie intégrante des questions de développement » explique la tunisienne Soukeina Bouraoui Présidente de Cawtar centre de recherche pour la femme Arabe. Aujourd’hui, s’il y a changement, il ne pourra se faire que par la société civile et pour la société civile. La voix du peuple, celle des indignés est la plus forte. Elle fut l’instigatrice des mouvements de libération dans la région. Aujourd’hui, le pouvoir est dans l’éducation, l’information, la formation, le réseautage et le Networking. A terme, cela finira par faire plier les courants politiques et religieux les plus rétrogrades.

Les femmes ne défendent pas que la cause des femmes mais la cause de la liberté. Il est plus qu’évident aujourd’hui qu’il faut élargir le combat féministe à un combat universel.

Pour autant, le rôle des femmes bien qu’important, n’est pas suffisant, il leur faut rallier à elles, le politique pour faire pression et espérer un jour changer les choses« il ne faut pas laisser tomber l’action politique. Mais au contraire, tenter de concilier le politique avec l’associatif et le civil avec des initiatives locales concrètes et des réflexions globales » qui amènent de réelles solution sur le terrain, ajoute Emna MnifPrésidente du Mouvement Kolna Tounes.

De notre envoyée spéciale en Tunisie: Fériel Berraies-Guigny

http://webzine.unitedfashionforpeace.com

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