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Crise au Liban: Ce n’est rien comparé à ce qu’il va se passer

 

Crise au Liban: "Ce n'est rien comparé à ce qu'il va se passer"

Onze ministres libanais ont démissionné ce mercredi, entraînant avec eux la chute du gouvernement. Joseph Bahout, spécialiste de la région, pense que la crise devrait néanmoins rester politique.

Le bras de fer qui oppose le premier ministre Saad Hariri et le Hezbollah depuis des mois vient de connaître un épisode retentissant. Comme l'avait annoncé le parti chiite, le refus de Saad Hariri de renier les conclusions du Tribunal spécial pour le Liban (TSL) sur la mort de son père, Rafic Hariri, a entrainé la démission de onze ministres, membres du Hezbollah, du parti Amal et du parti chrétien libanais. 

Joseph Bahout, politologue spécialiste de la région et professeur à Sciences-Po Paris, fait le point sur cette situation critique au Liban.  

Selon vous, quelles conséquences politiques peut avoir cette démission groupée?

Constitutionnellement, la démission d'un tiers plus un du gouvernement équivaut à une dissolution. Le gouvernement libanais n'existe plus. Pour autant, un gouvernement fantôme va continuer à assurer certaines tâches régaliennes. Nous sommes face à une très grave crise de légitimité politique. Mais ce n'est encore rien, comparé à ce qui va se passer lorsque l'acte d'accusation du TSL va être publié. Surtout s'il met en cause le Hezbollah dans l'assassinat de l'ancien premier ministre Rafic Hariri.  

Les tentatives d'apaisement entamées par l'Arabie saoudite depuis des mois ont échoué. Aujourd'hui, c'est la roulette russe et on ne peut pas savoir si la balle va atteindre le coeur du Liban. 

Le Liban n'en est pas à sa première crise politique, pensez-vous que celle-ci puisse déboucher sur un conflit armé?

Nous sommes encore très loin d'une guerre civile. Nous entrons maintenant dans une période de latence institutionnelle. Il risque d'y avoir des tensions politiques, et peut-être quelques dérapages. Mais aucun des partis en présence ne souhaitent en passer par la violence. Ils veulent à tout prix rester sur le terrain politique.  

Sur le plan militaire, aucune force n'est à la hauteur du Hezbollah. Le parti pourrait donc tenter un coup de force, et mettre les institutions au pas. Mais un coup d'Etat paraît peu probable au regard de la stratégie politique du parti chiite. 

Saad Hariri pourrait-il céder aux revendications de l'opposition, et renier les conclusions du TSL sur l'assassinat de son père Rafic Hariri?

Si cela avait dû se faire, ce serait déjà arrivé. Son refus de céder a conduit à la démission de onze ministres d'opposition. Un recul de sa part est improbable, aujourd'hui personne ne bougera plus. C'est d'autant plus vrai que Saad Hariri rencontrait Barack Obama ce mercredi. Il est évident que le président américain lui a conseillé de conserver ses positions.  

Ce sont d'ailleurs ces réunions à New York qui ont incité le Hezbollah et ses alliés à agir. Constatant que les négociateurs saoudiens, européens et américains poussaient le premier ministre libanais à ne pas céder sur la question du TSL (qui est un tribunal créé par l'ONU, il faut le rappeler), l'opposition a décidé de mettre Saad Hariri au pied du mur. 

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