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Declaration de Avishai Hattab

Declaration de  Avishai Hattab

« 1967, la guerre des six jours éclate en Moyen-Orient », ça semble si loin de la Tunisie, et pourtant notre pays, tous comme les autres pays arabes ont été secoués par la fièvre ce jour là. Emportés, émotifs que nous sommes par les paroles des chefs d’Etats Arabes qui déclaraient jeter Israël dans la mer – et nous voyons aujourd’hui que ce sont leurs propres peuples qu’ils jettent dans un océan de sang – nos grands-parents se sont empressés de chasser leurs voisins de confession juive. Ces dernies furent attaqués, insultés, leurs biens incendiés et leurs synagogues saccagées. Personne n’a pris le temps, ne serait-ce un instant de se dire que ces juifs là ne sont justement pas partis en Israël et que même s’ils ont le regard tourné vers Jérusalem, tout comme nous de part notre religion nous avons les yeux tournés vers la Mecque et vers Jérusalem, ils ne sont point impliqués dans la guerre qui faisait rage là-bas.

Personne ne s’est demandé où est-ce qu’ils partiront renvoyés de chez eux. Et justement c’est en Palestine, qu’on prétend vouloir reprendre qu’ils sont partis. Viendra-t-on après les critiquer de l’avoir fait ?

« Mon grand-père était un destourien, il a longtemps milité pour l’indépendance de la Tunisie, sa Tunisie, et pourtant en 67, il a été attaqué, ainsi que toute sa famille, cela a commencé à midi et Bourguiba n’a pris des dispositions pour nous protéger que vers 15h ». Témoigne un jeune juif Tunisien et il continue « Mes parents n’ont jamais pensé quitter un jour la Tunisie, ce jour là, ils ont sérieusement pensé à partir en Israël, ils ne l’ont pas fait, mais depuis, nous vivons avec les valises prêtes, en cas où l’on nous attaque de nouveau. Ce que nous avons vécu ce jour là a fait que nous soyons contents qu’Israël existe, au moins, si l’on nous chasse de chez nous, on a où aller, un pays qui nous préservera nos droits et assurera notre sécurité ».

Ceux qui lisent ma note se demanderont sûrement pourquoi j’aborde aujourd’hui le sujet et pourquoi je remonte si loin dans l’histoire. En fait, c’est le sujet lui-même qui revient en force et qui s’impose.

D’abord, nous vivons une renaissance, non seulement sur le plan politique, mais aussi intellectuelle et culturelle et nous ne pouvons bâtir cela sur des fondements de haine et de racisme. Depuis la révolution, les vidéos circulantes ont médiatisé et mis à nue ce qui a toujours existé chez nous. On y entend alors « Yhoudi Kaleb – Chien de juif », « Yhoud tharbouni – des juifs qui nous tuent »… et je passe. Amalgame avec ce qui se passe en Palestine ? Cet amalgame commence à fatiguer nos compatriotes, et ils n’ont que raison. D’ailleurs, nous voulons que le monde apprenne à nous respecter et à nous accepter. Pourquoi sommes nous vexés ou en colère qu’un chrétien ou qu’un juif ne se sente point concerné par notre bataille face l’Islamophobie et nous trouvons normale notre indifférence par rapport à ce que subissent chez nous les juifs tunisiens ? Nous n’aimons pas qu’on nous dise sale arabe et nous acceptons entendre sale juif ou chien de juif. Nous essayons de démontrer que l’Islam n’est point la religion de la haine et nous aimons répéter que les juifs sont responsables de tous les malheurs du monde…

Je précise que je suis pro palestinienne et que j’ai toujours milité pour cela, mais je ne veux pas que la Tunisie paye le prix du conflit israélo-palestinien et que son peuple sombre dans la haine et le racisme à cause de ça. J’ai participé aux manifestations condamnons les crimes percutés par Israël et à la fac, je me suis privée de tous mes samedis pour traduire à mes amis palestiniens arabophones leurs cours étudiés en français. Seulement, je considère que mes batailles ne doivent point être sélectionnées ou sélectifs car je me considère humaine avant d’être musulmane ou arabophone – je précise cela car on est arabophones et non pas arabes en Tunisie – et tous comme je condamne les crimes d’Israël, je me dis aujourd’hui que je ne peux demander aux chefs de l’Etat hébreux de lever la main sur la Palestine quand je vois ce que font subir les chefs d’Etats arabes à leurs peuples. Pour continuer à trôner sur les puits de pétrole, ces derniers préfèrent faire couler un fleuve de sang…

La question juive tunisienne, est aujourd’hui remise en actualité par les propos circulant sur le net, les massacres des présidents arabes et l’envie des juifs tunisiens de participer à la construction de la Tunisie, envie retenue de peur d’entendre encore une fois que c’est Israël qui les utilise pour s’immiscer en Tunisie et qu’ils sont ses bras ici.

Ça me révolte d’entendre parler d’un tas de pierre jetées sur les maisons de juifs tunisiens à chaque bombardement israélien sur Gaza et ça me révolte de savoir que deux fillettes juives tunisiennes, dont l’une est âgée de six ans ont été tuées suite au bombardement d’Israël sur Hammam Chot et ça me révolte de savoir que les enfants juifs subissent dans nos écoles des insultes et des agressions de par leur religion. Peut-on après les empêcher de rejoindre un pays où ils se sentent protégés et où ils peuvent vivre avec dignité ? Tout cela me révolte car je n’aimerais pas qu’un enfant musulman soit tué aux Etats-Unis car Ben Laden a fait péter les tours jumelles ou que des enfants musulmans soient humiliés à l’école car des racistes ont peur de l’Islam. Je ne suis pas la seule à crier haut et fort « dignité et respect pour les musulmans », mais je considère aussi que la dignité et le respect sont universels et que je ne peux prétendre les mériter si je ne me bats pas pour tous ceux qui s’y sentent attaqués.

Aujourd’hui la Tunisie se reconstruit et on ne peut pas marginaliser la diversité de son identité. Notre pays a toujours été diversifié, riche et constitué de mélange. Lui ôter cela, sera lui ôter son âme et personne ne voudra d’un pays sans âme. Nous avons tous le devoir de participer à le reconstruire et nous n’avons point le droit d’empêcher qui que ce soit de le faire. La citoyenneté n’a pas de religion.

Aux plus religieux parmi ceux qui lisent cette note je leur rappelle que notre religion dicte le respect des autres et même leur protection s’ils sont minoritaires là où l’on vit. Je rappelle aussi les dires de notre prophète – prières et paix sont sur lui – « qui tue un juif ou un chrétien devient mécréant aux yeux de Dieu et de son prophète ». Pour ceux qui insultent les juifs utilisant les termes d’animaux je leur réponds « Ne vous donnez pas de surnoms péjoratifs » paroles du Saint Coran. Je tiens aussi à rappeler que notre prophète – prières et paix sont sur lui – a épousé une juive, convertie certes, mais pas sa famille et il n’a jamais essayé de la retirer de sa communauté, à laquelle elle rendait fréquemment visite.

Ainsi, parce que je suis tunisienne dont l’identité est riche et diversifiée, parce que je suis musulmane dont l’essence lui dicte tolérance et respect et parce que je suis humaine et que je condamne que d’autres subissent ce que je refuse de subir, je déclare aujourd’hui que je suis prête à défendre de ma vie, un ou une juif (ve) tunisien (ne) qui se fait attaquer dans mon pays, et ce même contre un musulman si ce musulman agit en injuste. Et encore une fois, je rappelle les paroles de Dieu : « Dieu s’est interdit d’être injuste ». Je ne demande pas à mes concitoyens d’être aussi passionnés que moi, je leur demande au contraire d’être pragmatiques dans leurs comportements et réactions et de réfléchir avant de sortir une insulte, de montrer un dédain ou de s’emporter contre un juif ici croyant qu’ils œuvrent pour une cause là-bas, sur les terres sacrées.

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Vraiment un article intéressant, une prise de conscience sincère et lucide sur les questions qui se posent sur le futur de la Tunisie multiculturelle. J'aimerais bien contacter Avishai qui parle au début de l'article, ainsi comme la fille (je vois pas son nom) qui a écrit la suite. Je ne sais pas si c'est possible avoir le contact des auteurs des articles publiés ici. En tout cas, mes compliments et bonne continuation.

Vraiment un article intéressant, une prise de conscience sincère et lucide sur les questions qui se posent sur le futur de la Tunisie multiculturelle. J'aimerais bien contacter Avishai qui parle au début de l'article, ainsi comme la fille (je vois pas son nom) qui a écrit la suite. Je ne sais pas si c'est possible avoir le contact des auteurs des articles publiés ici. En tout cas, mes compliments et bonne continuation.

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