LES DEUX SOEURS TAKKET'S
Des marches j’en ai connu beaucoup. Dans mon immeuble, il y en avait déjà une vingtaine aux nez ébréchés. J’ai pris des marches de stations de gare, des marches quelconques, j’ai trébuché sur des marches par inattention, j’ai posé des marches en marbre de par mon ancien métier.
Bref, cependant il y a deux marches dont je garde un souvenir impérissable, les deux marches du TAKKET’S.
Une courte et une autre plus grande, la première en montant aux extrémités arrondies. Elles n’avaient rien de spéciales ces deux marches mais à force de s’asseoir dessus, nos pantalons et shorts ont fini par les user à tel point que les nez prenaient la forme de lames de rasoir. Et nous les avons aussi usés.
Ces deux marches précédaient la porte du seuil du père Krief, Loulou pour les intimes, architecte de profession et papa de Ruth. Un homme pieux, humain, pro Israël, bon conseiller et très hospitalier. Il était fort connu à la Goulette. Ses enfants, bien jeunes encore ont bien grandi et surtout d’une très grande gentillesse. Il adorait ‘monter’ à la Goulette pour y passer qqs heures le dimanche seul ou avec sa famille. L’appel de la mer y est sans doute pour quelque chose. Loulou aimait recevoir lors des chabbaths. Il tenait aussi une synagogue et si ma mémoire est bonne, il transformait son cabinet de travail en salle de prières les jours de yom tov. Bien que la BRASSERIE GOULETTOISE voisine des Krief en faisait autant durant ces jours de fêtes.
J’oublie le sujet mais si nos deux marches pouvaient raconter alors, je leur donne la parole.
La plus grande des marches
‘…Bonjour, nous sommes deux sœurs, nées qqs part mais sans être déclarées à la Municipalité et installées à la Goulette. Faites d’un matériau noble, bien posées sur ce qu’on appelle les marches du TAKKET’S ancien café goulettois, surnom que les américains nous ont affublés lors de leur passage dans notre cité. ( Take it en anglais)’
La plus grande. Toujours elle.
‘…Nous avons vieilli ensemble mais bien vieillies et nos souvenirs sont restés intacts. Muettes certes, comme toutes choses, nous écoutions cependant de drôles de confidences mais par respect pour tous ces jeunes qui nous ont piétinés, nous ne dévoilerons rien, c’est notre petit secret mignon. L’hiver nous étions réchauffées durant certains moments de la semaine par de tas de fesses recouvertes de pantalon jean et autres tandis qu’en étè nous l’étions par des shorts. Nos jeunes, nous nous en souvenons comme si c’était hier étaient nombreux mais notre mémoire défaille et nous en avons retenues que les principaux tel que Mimi Vigano, les SEBAG, Max FITOUSSI, Les frères Marzouk, les YAFFES, nos voisins d’en face ,les SITBON, FARHI, HUBERT et tants d’autres compagnons qui haussaient le ton lorsqu’ils parlaient foot italien ou français, avec REMETTER, FONTAINE etc pour les fans du foot français sans oublier leurs équipes chéries, le HAVRE, REIMS etc… et les coupes du monde. Puis les conversations changeaient, ils parlaient TENNIS, Rolland Garros, et quand passe le TENNIS, c’est le tour de France, COPPI, BARTALI LOUISON BOBET et vas y les chamailles et les querelles à hautes voix au point que nos oreilles en prenaient un coup. Et lorsqu’ils s’agissaient du sport de notre cité alors là, je ne vous raconte même pas les gestes et les paroles lors d’une défaite goulettoise en volley ou dans une autre discipline
Gilou le fils de Loulou au vu de son âge commençait à mettre son grain dans ces joutes où le sport était roi. Le jeune homme promettait. Il adorait le foot de plage. Son ami BATATA.
Nous étions au centre du bonheur et parfois aussi de la tristesse parce que bien souvent, un jeune homme éperdu pleurait son amie qui le quittait. Il ne trouvait pas mieux que de venir poser ses fesses pour gémir et se plaindre. Alors qu’un autre donnait rendez vous, pour la première fois à une autre jeune fille qui apparaissait furtivement de loin et pour ne pas s’attirer les regards curieux, elle lui faisait un clin d’œil désignant un endroit plus discret pour faire connaissance. Nous étions trop voyantes aux yeux de certaines et de certains mais pas bavardes.
Nous étions des témoins privilégiées des nouvelles chansons, les tubes, qui sortaient des transistors posés sur nous. Des concerts des auditeurs et parfois aussi des petits apéros que Loulou prenait à nos cotés. Une table deux ou trois chaises et voilà les Sitbon venir piquer qqs condiments faits maison par la maitresse de maison DOLLY.
Nous avons été les témoins privilégiés de petits flirts volaient sur nos dos et nous en rions lorsque les amoureux se bécotaient lorsque le passant s’éloigner. Nous avons été les témoins de drôles de blagues, d’anecdotes coquines qui se narraient entre copains d’abord.
Nous avons vécu un temps perdu aujourd’hui, un temps qui a marqué les fesses d’un certain nombre de jeunes goulettois et tunisois et nos narines surtout par les bons mets de Dolly la maman de nos trois amis. …Voilà… !’
Nous avons vieillies hélas.
Et nous ne savons plus où nous sommes.
Albert Simeoni
Commentaires
Je remarque la beaute certaine de cette fille sur photo..mais ne vomprend pas l' objet de ce revit.
Ils sont en Israël presque tous. Quelques uns sont décédés. Dédé était mon oncle par alliance.
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