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Maman Haya et ses enfants, par Albert Simeoni

 

Maman Haya et ses enfants.
 

Les relations mère/enfants, père/fils ont été souvent marquées par des conflits.

Des conflits qui reposent pour la plupart du temps sur des quiproquos, des incompréhensions, des malentendus, des mots blessants, des remarques insupportables à un age ou une maman se doit d’être sage et compréhensible.

Certains de ses conflits mère/filles, mères/ fils débutent dans la plupart des cas vers l’âge de l’adolescence entre 14 et 18 ans. L’âge dit bête. Un âge où l’adolescent tente de se démarquer de ses parents en créant ce qu’on appelle autour de lui un cercle, son espace de liberté . Que faut t’il comprendre par ESPACE… ?

Son environnement, ses plates bandes, son espace interdit aux autres; à ses parents en premier.

Un espace où il pense pouvoir tout gérer, sans que personne ne vienne lui rappeler ce qui est bien ou pas bien. Il s’estime être déjà libre avant sa majorité et prêt à prendre ses responsabilités. A assurer, à gérer son quotidien.

L’adolescent montrera son hostilité sur tout ce qui vient de chez ses parents qu'il pense être un abus de gérance.

Il n’a donc plus besoin de se faire conseiller et impose souvent ses vues contre vents et marées. D’où parfois les fugues et les querelles sans fin.

Il estime que ses parents ne lui font pas confiance entre 14 et 18 ans. Entre sa paranoïa et la réalité des choses de la vie, il parit sur la méfiance. Plus apte à écouter les conseils d’amis de quartier, d’école que le bon jugement de ses parents et même de ses frères et sœurs.

D’où son refus d’obéir, de créer une coquille et ses réflexions du genre ‘…Vous n’êtes plus dans le coup… !’ Il estime lui l’être. C’est la désobéissance et la rébellion.

Maman a usé du frottoir pour se faire entendre et respecter. A usé nos fesses par ses fessées afin de ramener de l’ordre dans notre foyer.
Nous n’en sommes pas morts et nous ne portons pas de stigmates. Elle avait bien raison car nous étions indisciplinés tout enfant et les trapézistes que nous étions ont eu fort affaire avec elle.

Prendre l’armoire pour tremplin, puis s’agripper au lustre pour se balancer et ensuite tomber sur le matelas ( filet de réception) pour amortir notre chute; n’était pas d’actualité dans une chambre qui mesurait 3 mètres sur 2.

Notre seul protecteur était le dessous du lit en fer ( moula).

Le nerf de bœuf était caché derrière elle lorsque nous dépassions l’heure du soir, l'heure prescrite pour rentrer à la maison. Cela ne nous a jamais tués.

Sans jamais hurler, nous craignons cependant son timbre de voix, elle usait de diverses menaces comme allait se plaindre de nos agissements à papa qui était doux comme un agneau.

Plus tard, vers mes 20 ans, une jeune fille a eu la sordide idée de m’appeler au téléphone alors que je déjeunais.

Maman leva le combiné et la voilà se transformait en inspecteur de police. Un interrogatoire en règle. Qui êtes-vous… ? Qui sont vos parents… ? Quel âge avait vous… ? Etc….Manquait que les empreintes digitales, la taille et la couleur des yeux.

Mon amie ne m’a jamais plus rappelée.

Maman marquait son autorité d’une façon peu cavalière. Après avoir fini, elle me questionna…

’…Ech’qoun el makssoufa e’di… ? ‘ Qui est cette demie portion… ?
‘…Ma future fiancée… !’
‘…Enti khraa fi termic ou thab tokh’tob… !’ ‘…Tu as la merde entre tes fesses et tu veux déjà te marier… ?’ Fin du chapitre.

Mes autres frères étaient logés à la même enseigne. Nous avons compris alors que tout devait se faire à son insu. Et le jour où j’ai reçu des lettres d’une autre amie à Marseille, maman les déchirait après les avoir lu. Ce qui me mettait dans une rage folle.

‘…Je dois tout savoir… !’ C'était l'inquisition aprés celle d'Espagne.

Elle avait ses petites voisines de quartier qui venaient aussi l’informer de nos fréquentations.

Maman jugeait que les filles étaient des sangs sues, des ‘…BLEOUET FI YEDEM SENSLET…’ petites diablesses porteuses de menottes… ! Entendez par là, des filles qui veulent s’accrocher que coute que coute au garçon. Elle n’a jamais trouvé une fille, une copine, à son gout.

Elle jugeait encore que notre âge et nos situations ne supportaient aucune union pour le moment. Donc exit toutes les filles avant que nous ayons 30 ans.

Sur ce point là elle avait raison.
Mes frères étaient étudiants et moi, je m’emmerdais quelque part dans un bureau de comptabilité. Nous étions donc pas prêt pour nourrir une poule bien belle et bien faite.

A 30 enfin, je choisi ma future femme. Plus tard ce fut le cadet, puis le benjamin, puis ma sœur et enfin le dernier. Le rass bou tabiss.

Ce fut pour nous l’entrée dans la galère. Nous avons tout entendu d’elle après nos mariages. Elle qui prenait de l’âge et avec son âge grandissait la paranoïa.

Nous avons combattu toutes les situations contre une maman qui clamait son amour pour nous. Un amour possessif, contraignant, étouffant. Tous les entendus sont passés. Une fois elle est gentille, en parlant de ses belles fille, une fois elle est méchante, une fois vous êtes des PD, une fois ‘…NOMCHI KOBARRA ÂÂLIKOM lorsque arrivait son anniversaire. Ou lorsqu’elle était invité durant les grandes fêtes. Sa présence à table nous donnait des sueurs froides. Et j’usais de moult stratagèmes pour divertir l’assemblée de frères et d’épouses réunis. Et même malgré cela, elle avait tjs un gentil mot pour soulever un tsunami.

Nous vivions par moment l’enfer en sa présence tant son caractère était autoritaire et indépendant. Elle ne savait pas se taire. Sauf que pour dire une connerie à table souvent pour humilier. Parfois, quoique bien rare pour complimenter.

Elle n’avait pas encore compris que nous étions des hommes mariés, père de famille et pour certains d’entre nous grand-père. Nous étions ses petits enfants et à ce titre, elle s’obligeait à nous le rappeler souvent au risque de se voir couper la conversation au téléphone. Elle avait la fâcheuse habitude de nous rabaisser en certaines circonstances.

Plus tard, j’ai compris qu’il fallait la confronter sur son terrain et lui faire comprendre que le temps, de la soumission, est révolu. Elle usait de comédies envers nous, et à chaque fois qu’elle voyait que la réplique ne lui convenait pas, elle haletait et nous parlait de son cœur. Un cœur bien loin d’être cardiaque puisque cela fait 12 jours, qu’elle se trouve dans le coma et que son rythme cardiaque oscille entre 14. 8 et 14/ 9.

Depuis 6 mois, depuis ses diverses hospitalisations, nous avons eu affaire à une autre maman, contrainte à l'oisiveté.

La maladie rend les gens vulnérables, fragiles,soumis, délicats et à cause de celà, maman est devenue la plus adorable des mamans. La plus belle des mamans, la plus tendre des mamans, la plus affectueuse des mamans.

Elle nous étonne encore par son courage. Et toutes les fois que nous allons la voir, nous sommes prit d’un grand frisson. Ce frisson, ce sentiment qui touche notre cœur et fait trembler notre âme et laisse nos yeux larmoyer parce qu’on se dit qu’il n’est pas possible qu’un tel monument soit allongée sur un lit de fortune.

Nous avons fait table rase de ce passé. Nous lui devons bcp de choses aussi. Moi 150 cl de sang, mes frères leurs diplômes et leur situations.

Nous lui devons les valeurs morales qu’elle nous a inculquées. Pas sa force morale et cette volonté à vaincre. Nous ne pouvons jamais l’égaler sur bcp de points.
Nous ses enfants chéris, ne pourrions jamais faire ce qu’elle a entrepris pour nous.

Maman est un Titan, quelqu’un qui ne s’oubliera pas.
Et autant de fois que nous lui demandons pardon à son chevet autant de fois, nous ressentirons plus tard son absence après sa longue vie.

Les enfants sont souvent ingrats envers leurs parents mais nous avons la certitude d’avoir accompli envers elle notre devoir de fils et de fille avec bcp de fierté. Maman n’a jamais manqué de rien. Jamais.

Auprès d’elle nous sommes des nuls, des zéros pointés avec des bonnets d’ânes. Alors pour ceux et celles qui pensent que par moment leur maman les fait chier, pensez à ce mot lorsqu’elle tombera dans un coma profond qui dure et qui nous rend petits très petits devant elle.

Merci MAMAN, nous t’aimons.

Albert Simeoni

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