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MAMAN HAYE.

Envoyé par albert 
Re: MAMAN HAYE.
22 novembre 2011, 09:54
LE RETOUR DES JOURS HEUREUX.





Meiha z’al ma grand6mère disait aussi ‘…Kol ghzir i ji bél Kssam… ! Chaque enfant né avec sa part de bonheur… !’


Justement en 1960 ma sœur naissait. Et le hasard a voulu qu’en cette année là, le premier janvier 1960, nous changions d’appartement, du coup des deux pièces étroites et étriquées, ma famille se retrouvait avec 8 pièces. Un château dont je ne vous raconte pas le confort.
Nous avons pu grâce au triplement de notre espace, inviter des amis et même organiser des anniversaires et surboums. Nous étions logés comme des pachas à la rue du LIMOUSIN. Mémé avait sa chambre, d’ailleurs elle se perdait souvent d’entre ces 8 pièces, confondant tout. Plus tars, nous avons accueilli sa sœur Louisa, une forte en gueule, qui a trouvé encore plus fort en gueule qu’elle. Moi. Du coup, elle s’est mise au vert.

Le cadet et moi avions la notre, le troisième ainsi que le quatrième tandis que ma sœur avait la sienne. Sans compter la chambre à coucher de mes parents.

Des fenêtres qui donnaient sur la grande avenue H. Bourguiba nous surveillons la vie du quartier.
Les années difficiles se diluèrent en années de joie et de bonheur. Nous avions, comble de plaisir, la télé noire et blanc ainsi que l’ancienne vieille horloge suspendue au mur au dessus de la boite à images, seule relique sauvée de la poussière mais qui avait rendu l’âme depuis l’époque de la mouise.

Papa reprenait gout à la vie, il redevenait patron de sa petite boutique de marbre. Les méchouis revenaient alors qu’ils avaient disparus depuis pas mal de temps, adieu les mhamess et les farinettes, les mets à base de farine, les repas des indigents, adieu les comptes, maman ramassait le fric qu’elle mettait dans une boite en fer caché dans une soupente. Son coffre fort souvent violé par mon père. Il posait l’échelle à l’insu de maman et hop une petite liasse de dinars qui allaient rejoindre le tiroir caisse des frères KTORZA de la brasserie Suisse. Les amis retrouvèrent l’ancien Ayouche avec bcp de joie.

Papa rentrait tous les soirs avec des cageots de fruits embarqués dans sa vieille Citroën. Mais plus de boukha à la maison. Il se rattrapait dehors modestement.

Papa était un vrai clown à la maison, ses mimiques et ses blagues nous procuraient une grande joie. Il était devenu le maitre heureux de la maison, heureux que tout a changé en si peu de temps. En trois ans.
La cheuka est redevenue plus grande que nature, très belle, les bracelets de papier tous coloris suspendue aux murs en passant par les lustres, en l’honneur des sts rabbins Chimone et Meir, revenaient en grandeur plus que nature seul le mouton de Pâque n’était plus à l’honneur. Il n’était plus à la mode.

Maman oublia pour un temps sa machine à coudre, elle s’offrait des vêtements de marque. Mémé Meiha lui disait ‘…Allaich él fssed… ? Pourquoi ce gaspillage, ce qui faisait dire à mon père cette phrase ‘…Yeji ye métné… ! Cesse avare que tu es… ! On en rigolait. Meiha n’était pas en reste et tjs ces ‘…Allaich el fsséd.. ! Meiha se retrouvait aussi avec sa petite commode à maquillage et tjs ‘….Allaich…. !’ Elle participait aux émissions de télé et tjs ‘…Allaish…. !’ Papa répliquait ‘…In yaddin zamour omoc… ! Et la vieille qui riait aux larmes. Meiha adorait mon père. Lui aussi. Mémé fut gâtée par des belles robes et bien chaussée.

Ce fut aussi les années dans lesquelles mes frères, après l’obtention de leur bac immigrèrent en France. Ils revenaient tous les trois mois de vacances. Papa et maman allaient souvent les rejoindre dans le studio du troisième frère, le second était logé dans la cité. Puis ce fut le tour de ma sœur d’aller les rejoindre. Ils terminèrent leurs études avec les honneurs, tous les trois dentistes.

Et comme le disait maman Haya ‘…Ba’hyét él terki… !’ Grâce à mes reprises… !’ Alors que ce temps lointain était révolu.
Papa me fit la surprise un jour, de m’offrir ma première voiture en 1968. Une petite fiat.
En 1970, je faisais ma rentrée auprès de lui dans la boutique. Ce fut le grand départ. L’envolée.

Les mois qui ont suivi furent des mois de vacances à Juan les Pins. Nous étions devenus des vacanciers d’outre mer. Avec bcp de francs français dans les poches. Nous nous sommes privés de rien. Cannes a fait connaissance de notre vieille PEUGEOT FAMILIALE, stationnant entre des limousines et des Cadillac devant le grand casino de Cannes et oui lorsqu’on est paysan on le reste même chez l’ancien Prince Régnier.

Maman était toujours aux commandes. Elle était la grande timonière. Celle par qui nous sommes sortis de l’indigence. Elle le restera tjs parce que sa voix et ses conseils ne seront jamais absente de nos oreilles.

Heureux et bien servis, nous le fumes et toujours encore avec nos enfants.

Maman par la suite a rattrapé tout ce qu’elle a manqué, juste récompense pour son travail, sa mission et son devoir.


Re: MAMAN HAYE.
23 novembre 2011, 04:20
Albert vient de m'informer du décès de sa MAMAN HAYE à 2 heures du matin.

Il demande de poster ni condoléances ni commentaires.

Pièces jointes:
Maman-Haye-b.JPG
Re: MAMAN HAYE.
23 novembre 2011, 14:30
Re: MAMAN HAYE.
25 novembre 2011, 03:14
Re: MAMAN HAYE.
01 décembre 2011, 09:05




MamAAAn….
Maman….

Ta voix me manque.
Tes gestes me manquent.
Ton visage.
Ton parlé.
Tes remarques.
Ta joie de vivre.

Je marche sur la terre
Alors que tu dors dans ses entrailles.
Toi, qui par les tiens a fait un beau travail
Maman, nous voilà sans toi.
Une partie de nous est absente, Maman.
Comme je m’attriste.

Je n’ai plus de portes à pousser.
J’ai seulement retenu un numéro de carré
Quelque part là bas où dorment les bienheureux.

Ta voix maman me manque.
Avant j’avais du courage
Maintenant, je n’en ai plus.
J’attends avec patience
Que le temps et non l’oubli fasse son œuvre.

Maman, ta voix maman me manque.
Tes gestes…Ton visage…
Tout maman me manque.

Je vais bcp écrire sur toi
Maman, je vais bcp écrire sur toi.


Re: MAMAN HAYE.
02 décembre 2011, 08:07
KANDIL.
Pièces jointes:
KANDIL.gif
Re: MAMAN HAYE.
02 décembre 2011, 08:12
MAMAN HAYA Z'AL allume une veilleuse.


hebergeur d'image
Re: MAMAN HAYE.
03 décembre 2011, 11:45
J’ai réuni ici les êtres chers qui ont vu grandir maman Haya.


Il était une fois MEIHA ET CHOUÂÂ



CHOUÂÂ.



hebergeur d'image


MEIHA


hebergeur d'image



1900 .

Quelque part à Tunis,du coté de la RUE ACHOUR Meiha et Chouââ, après s’être unit devant le Cady du quartier et devant le rabbin, s’installent dans une chambre du . Un quartier pauvre de Tunis. Leur nouveau foyer.

De cette union naissent trois enfants, deux filles et un garçon.
L’histoire si simple aurait pu s’arrêter là si le destin n’avait pas mis son grain de sel. Un grain de sel amer, tragique, un grain de sel bien noir, un grain de sel qui allait mettre cette famille dans la plus grande des afflictions.

Chouââ le papa était poissonnier associé avec un certain Berda. Il gagnait peu mais cela suffisait à faire nourrir sa petite famille. Meiha ne travaillait pas, elle était la maman de toutes les économies.
La chambre donnait sur une cour. Sur les cotés de cette cour, d’autres chambres. Une fontaine commune et un wc en commun. C’est ce qu’on appelait à l’époque une maison dite arabe.

La sœur de Meiha se nommait Louise. Elle logeait juste au dessus d’eux. On y avait accès par des escaliers déformés en ciment et surtout mal éclairé sinon pas du tout. Louisa avait aussi une chambre et une fenêtre comme sa sœur.

Les enfants n’étaient pas encore scolarisés.

Jeune femme dégourdie dont la profession était débitante de tabac dans une grande colonne sous les arcades de l’avenue France à Tunis.


A cette époque, il n’y avait pas d’électricité mais des lampes à pétrole. Pas de chauffage mais ce qu’on appelait communément un SEKHEN. Une fenêtre en fer forgée donnait sur la cour et l’on peut imaginer le quotidien de ces enfants allant jouer dans la cour ou alors rester agrippés à la fenêtre.

Le plus grand avait 8 ans, le second 6 et la dernière Marie 4 ans.
Le couple dormait dans une petite arrière chambre et les enfants dans la salle à manger. Sur des matelas posés durant la nuit et relevés le matin.

Meiha me parlait d’une grande solidarité entre sa famille et les voisins juifs de la cour.

Voilà ce que disait maman de son papa, bien plus tard.



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A Suivre….
Re: MAMAN HAYE.
04 décembre 2011, 04:30
CHAPITRE II.

Il était une fois MEIHA ET CHOUÂÂ.









Contre toute attente, une épidémie de choléra surprend tous les quartiers environnants de la HARA.

Une hécatombe.

Meiha perd ses enfants. A cette époque pas de pénicilline et vaccins.
En deux semaines, Meiha dira ‘…Ââbit él jébèné… ! J’ai rempli le cimetière.

Tout le quartier fut donc victime de cette contagion.
Sur de la misère venait s’ajouter donc le malheur. La souffrance et la désolation.

Le couple LELLOUCHE revenait à leur début. Tout est à recommencer si ce n’est que le médecin du quartier annonce à MEIHA qu’elle n’enfantera plus.

Sur le malheur se greffent donc une tragédie, la fatalité et le désespoir. La nuit est tombée sur le couple. Elle s’est voilée de noir, couleur du deuil.

La maison se retrouve déserte de ses lumières. Le grand vide. Les volets sont fermés,La lumiére est absente dans cette chambre déjà plongée dans la pénombre.

Ils vivent leur deuil en silence, tête basse et consentant du sort que le ciel leur a réservé. Un destin écrit dans ce ciel.

Un mouchoir qui va, un autre qui revient et le silence. Ce silence pesant que seule la mort sait faire régner lorsqu’on a tout perdu.

Chez ces gens là, trois choses vont les maintenir dans un semblant de vie. Le courage, la patience, et la foi.

Déjà démunis, indigents, les voilà donc encore plus démunis par l’absence de leur enfants.

Meiha et son mari tiendront le deuil très longtemps.

Les jours passent, comme passent les moineaux au dessus des terrasses tristes.

Les années passent comme passent les saisons mornes qui n’ont plus de couleur dans ce vieil Tunis bien avant et aprés la grande guerre. Et le ciel a beau s’habiller de bleu il reste noir pour MEIHA et Chouââ.

Lui, le papa continue à vaquer à ses occupations, car il faut bien vivre et espérer alors que sa femme chante à la nuit tombée des mélodies tristes en balançant son corps de droite à gauche. ( Lorsqu’elle était chez nous, elle chantait ses mélodies preuve que des années plus tard, elle n’avais pas tournée la page de la disparition de ses enfants en bas âge.)

Elle allumera ses trois veilleuses tous les vendredis en larmoyant.

Armés d’un grand courage Meiha essaye de surmonter les événements. Elle pense au temps qui sait guérir les grandes douleurs qui peinent à se cicatriser et qui ne se cicatriseront jamais plus.

Le couple fait preuve d’une grande patience et sagesse.

Un jour, alors que Meiha sort par inadvertance sur le seuil du grand portail de cette oukala donnant sur la rue, elle remarque que deux jeunes enfants noirs, retenant mal la morve qui pend à leur nez, sont assis sur les genoux de son mari. Chouââ jouait avec eux.

Le soir même, Meiha au vu de ce qu’elle a surprit, demande à son mari s’il était d’accord à prendre une autre épouse. Elle sera la domestique, celle qui sera effacée de la maison. Elle lui cuisinera à lui de faire d’autres enfants qu’elle élèvera avec la nouvelle concubine.

Son époux refuse catégoriquement et lui dit de ne pas perdre espoir, le médecin n’est pas D ieu. D’où plus tard, cette hostilité qu’avait ma grand-mère contre les médecins, elle ne les a jamais aimés ni appréciés.

Nous sommes en 1913.

A Suivre....
Re: MAMAN HAYE.
04 décembre 2011, 05:52
La pudeur des sentiments.
Texte inspiré par Elsa.

Les sentiments d’avant n’étaient pas les mêmes que ceux d’aujourd’hui.
A cette époque dans laquelle vivaient nos aïeux, il était impensable que les enfants lèvent les yeux devant leurs parents. La honte les submergeait. Il était même impensable de répondre à un vieux ou à une vieille.

Dire à son père ou à sa mère, ‘…YE OMI EN HABEC…. !’ Dans ces années 1900 et après, était bien rare. Les enfants écoutaient et baisser souvent la tête.

Le papa portait en générale la moustache, signe d’autorité et de respect.

Lorsque les enfants commençaient à percevoir leurs premiers salaires, ces derniers étaient remis à la maman et non au papa. Les enfants se contentaient du pécule que la maman voulait bien leur donner sans qu’aucune réticence de la part des enfants ne soit soulevée.
Les enfants ne devaient jamais faire la fine bouche et ce que la maman préparait était accepté sans rechigner. La maman était celle qui servait d’intermédiaire entre le fils, la fille envers le papa. Parler directement à son papa autrefois était considéré comme une effronterie. La maman plus diplomate servait donc de trait d’union.

Cette gêne du dialogue directe avec le père était considérée comme une bonne éducation. En dernier ressort seule la parole du père était considérée comme le sceau définitif à toutes discussions.

Lorsque le papa voulait passer un message à ses enfants, la maman était seule habilitée à le faire.
D’une part, d’autre part, le papa avait la prédominance sur le mariage de ces enfants. Une fille se devait d’écouter les consignes du père et parler de mariage d’amour n’était pas branché à cette époque. Les enquêtes de voisinage sur les mœurs de tel ou tel fils ou enfant prévalaient sur toutes autres considérations. La fille ou le fils à marier ne pouvait en aucun cas refuser l’union si les parents étaient d’accord.
‘…L’amori i ji bad… !’ L’amour ne vient qu’après disaient t’ils.
La dot était aussi un argument important pour les jeunes hommes.
Au regard de notre époque, l’évolution des mœurs marquent un grand virage quant aux sentiments que l’on ressent pour ses parents. Dire ‘…Je t’aime.. !’ à ses parents est encore assez difficile sauf dans les moments pénibles et cela afin de réconforter les leurs dans leurs derniers moments. Mais jamais durant leur vie. C’est le grand dilemme. Tjs cette gêne qui poursuit les enfants. Je constate cependant que les jeunes enfants d’aujourd’hui marque dés leur jeune âge leur amour pour leur géniteurs. Ils le disent et les parents le leur retournent.
Cela est du que le mot AMOUR tend à se propager dans les nouveaux foyers. Et apprendre à une jeune enfant à dire ‘…Merci…’ Ou ‘…Papa je t’aime… ! Marque plus d’attachement à celle là ou à celui là. J’entends par exemple mon beau fils me dire ‘…PAPI JE T’AIME… !’ Là, je ressens un cadeau que je paye pour ce ‘…Je t’aime.. !’ Mon gendre en rit.

C’est la nouvelle façon des jeunes à montrer non seulement du respect mais de l’amour.
Et cela est très bien.
Je n’ai jamais dit à maman ou à papa ce mot qui habitait mon esprit. Mais que j’ai prononcé mille fois alors que maman dormait dans son grand sommeil.

M’a t’elle entendu au moins… ? Nous a-t-elle entendu dans son profond et dernier sommeil… ?

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