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Le grand délire

Des Français faisant la queue devant un bureau d’allocations familiales

Le grand délire (info # 010310/14) [Analyse]

 

Par Ilan Tsadik et Patricia La Mosca©Metula News Agency

 

 

Bien aimé le discours prononcé par Emmanuel Valls dans la Grande synagogue de Paris à l’occasion du Nouvel an israélite. Nous, de re-souligner que ce gouvernement français est le plus authentiquement philosémite de la Vème République, et que le Président François Hollande - entre deux textos à ses maîtresses, ses anciennes maîtresses et son ex-femme -, ainsi que son 1er ministre, sont des amis de cœur d’Israël et des Juifs.

 

Kipa sur la tête, dans sa rhétorique simple et accessible, il n’y avait pas de "eux et nous" dans les vœux prononcés par Valls devant ses "frères" juifs. Il faisait penser à Nicolas Sarkozy d’ "avant" au musée de la Shoah à Jérusalem. Avant qu’il ne tombe éperdument amoureux de l’émir du Qatar et de ses pétrodollars, dont il aura un besoin croissant dans sa Reconquista, et plus encore ensuite s’il est élu et qu’il entend redresser la France à la dérive. Ce qui ne laisse rien présager d’encourageant pour les futures relations franco-israéliennes.

 

On a surtout retenu la déclaration explicite du 1er ministre affirmant qu’il n’existait pas de différence entre l’antisionisme et l’antisémitisme et il fallait que cela soit exprimé dans ces termes au sommet de l’Etat pour remettre la synagogue au milieu du village.

 

Il a annoncé avec détermination de nouvelles mesures énergiques destinées à combattre l’antijuivisme. C’est bien, mais cela reste dans la dynamique visant à placer un flic derrière chaque Juif de l’Hexagone, voire des espions qu’il compte infiltrer parmi les mouvements djihadistes afin de prévenir des assassinats du genre de celui de Toulouse.

 

Nous, alors, de répéter que c’est insuffisant et que cela ne constitue pas le remède nécessaire pour juguler la montée vertigineuse de l’antisémitisme islamique au pays des Lumières.

 

Parce que la classe politique francilienne persiste à deviser sur une réalité qui n’est pas celle de la France et qui fait le beurre – oui je sais… mais c’est volontairement maladroit – de Marine Le Pen et de ses solutions simplistes que les Français saisissent.

 

Preuve en est, la manifestation contre l’islamisme qui a été organisée sans lésiner sur les renforts médiatiques devant la Grande mosquée de Paris. Le but consistait, à l’occasion de la décapitation d’Hervé Gourdel, à mobiliser les musulmans contre la montée en puissance du Califat Islamique, qu’à Paris, on est désormais prié d’appeler DAESH afin que personne ne sache réellement de quoi on parle.

 

Ce rassemblement national a attiré "quelques centaines de personnes" à en croire l’AFP, qui sait être beaucoup plus précise lorsqu’il s’agit de comptabiliser les Palestiniens morts durant Rocher Inébranlable. Même et surtout lorsqu’elle répète, pratiquement dans chaque dépêche consacrée à Israël, ces statistiques issues du Hamas, qui sont évidemment erronées, particulièrement lorsqu’elles expriment que largement plus de la moitié des victimes étaient civiles ; sans le moindre égard pour l’analyse détaillée des données disponibles, qui conduit à conclure que près des deux tiers des morts et des blessés étaient des miliciens islamistes appartenant à des groupes terroristes armés.

 

Valls combat l’antisémitisme tandis que l’agence de presse semi-officielle de l’Etat français, de même qu’un grand nombre des journalistes de ce dernier l’attisent. L’AFP allant jusqu’à répéter ses bilans controuvés dans ses câblogrammes consacrés à la neutralisation des deux terroristes d’Hébron ayant massacré les trois étudiants halakhiques, qui s’étaient, de surcroît, acharnés sur leurs dépouilles jusqu’à leur enlever tout aspect humain.

 

Mais pour l’agence semi-officielle française, le meurtre, dans cette affaire, a été commis par les soldats de Tsahal lorsqu’ils "ont tué deux Palestiniens", sans mentionner, au mépris de toutes nos règles déontologiques, qu’ils avaient refusé de se rendre et que c’étaient des terroristes islamistes : "Israël tue deux Palestiniens accusés du meurtre de trois adolescents juifs".

 

La même AFP annonçait que le Hamas niait tout lien avec ces individus, quand bien même celui-ci avait revendiqué et justifié l’assassinat, qualifiant ses auteurs de martyrs. Toute la presse des pays civilisés, et même une bonne part de celle des Etats arabes et jusqu’en Iran, relevait l’affiliation des tueurs à l’organisation de la résistance islamique de Gaza, ce qui, en toute objectivité ne fait strictement aucun doute.

 

Face à Valls se dresse une meute de confrères s’employant à démontrer, au contraire du 1er ministre, que l’on peut – et même que l’on doit – être anti-israélien, sans être antisémite pour autant.

 

C’est devenu une antienne des chaînes de télévision françaises et des stations de radio, c’est soutenu par des gens disposant d’un très large accès aux media, à l’instar de Pascal Boniface, Alain Gresh, Edwy Plenel, et cela se ressent même dans un récent délire journalistiquede Christophe Barbier sur l’Express.

 

C’est également dans le ton de l’émission populaire de Ruquier "On n’est pas couché", qui joue à Monsieur Propre tout en lâchant les cadors Aymeric Caron et Léa Salamé, qu’il stipendie, à coups d’arguments burlesques, contre tous les invités qui omettent de fustiger Israël. Ce fut récemment le cas de Bernard-Henry Lévy, courageux, qui voyait chaque argument proposé par ses contempteurs frénétiquement applaudi par l’ensemble d’un public au comportement étonnant.

 

L’air du temps médiatique français consiste à exonérer et victimiser systématiquement la communauté musulmane tout en stigmatisant le comportement des Israélites.

 

La couverture du rassemblement devant la Grande mosquée, qui, aux dires de l’Express, moins "euphorique" que l’AFP, avait réuni "quelques dizaines" de personnes – et qui regroupait largement plus de, journalistes et de cameramen que de participants d’après Patricia La Mosca -, illustre bien ce phénomène. Quelques dizaines de manifestants pour dire non aux égorgeurs de journalistes, de randonneurs et de coopérants parmi 7 ou 8 millions de musulmans conviés par les plus hautes autorités de leur culte, c’est maigre. Ca n’a pourtant fait réagir presque personne dans la presse, qui s’est contentée de mettre en exergue la démarche des gens présents, leur prêtant des micros bienpensants et les présentant comme les porte-paroles évidents de la majorité des mahométans.

 

Cela n’allait pas sans rappeler la grande manifestation de Mélenchon, il y a quelques mois, complètement bidouillée de manière à faire croire qu’elle réunissait des milliers de partisans alors qu’ils n’étaient qu’une poignée.

 

Il y avait de quoi virer Mélenchon, les journalistes et cameramen complices, le directeur de l’info de  Tf1 et le patron de la chaîne, car modeler l’opinion des téléspectateurs en leur présentant une fausse réalité participe d’une manipulation et la manipulation constitue une infraction à la démocratie.

 

Quelques dizaines de musulmans devant la Grande mosquée contre quelques dizaines de milliers hurlant "mort à Israël" sur les grands boulevards, qu’on a à peine entendus à la TV, cela devrait suffire à expliquer à Christophe Barbier que les Israélites français n’ont pas peur de la situation délétère qui prévaut mais qu’ils en ont marre de lui et de ses potes.

 

Il ne suffit pas d’avoir épousé une juive pour se permettre d’écrire : "L'alya ne peut être qu'une démarche religieuse, motivée par la foi et non par un raisonnement politique, social ou sécuritaire. Une alya laïque a pu se justifier quand il s'agissait de bâtir l'Etat d'Israël, mais son avatar actuel est une imposture".

 

L’Etat d’Israël, une imposture ? Non seulement ce pauvre Barbier ignore tout du canevas de la société israélienne et du fait qu’il n’y a aucun ministre juif orthodoxe dans la coalition actuelle, mais sa "constatation spontanée" est pratiquement un appel au génocide ; car à la question hypothétique "que faire d’une entité étatique constitutive d’une imposture qui tue des enfants arabes innocents ?", il me semble que les réponses qui s’imposent, à tout le moins sur le plan intellectuel, sont : la combattre et l’anéantir.

 

Au temps pour les cinq millions d’Israéliens laïcs de l’ "avatar" en question ; on considérera que nous sommes les victimes collatérales d’un génocide salutaire !

 

Si l’on ajoute à cela qu’Hervé Morin, un noircisseur coutumier des pages du Monde, considère que nous, Israéliens, prenons du plaisir à maltraiter nos voisins arabes, l’on a presque fini de dresser un échantillonnage représentatif du paysage médiatique français. D’ailleurs la Ména avait réussi à le faire condamner en première instance pour ces propos racistes, avant de voir la sanction étrangement gommée en appel.

 

Deux problèmes se dressent ainsi devant le Chevalier Valls dans sa croisade contre l’antisémitisme. Le premier est constitué par une profession entière de journaleux qui s’est octroyée, relativement à Israël et aux Israélites, le droit de s’exprimer sans devoir de réserve ni de respect de la vérité factuelle. Comme au temps de Dreyfus, on peut tout affirmer à leur propos, sans jamais être inquiété ou presque. Cela tient du principe du droit de critiquer la politique d’un gouvernement, cependant, dans les exemples représentatifs de Barbier et Morin, on s’aperçoit que la critique n’a rien à voir avec une quelconque politique, mais qu’elle s’attache à la nature et aux croyances du peuple juif.

 

Pour devenir journaliste en France, il faut simplement pouvoir répondre "correctement" à deux questions : doit-on dire colonies ou implantations en parlant des agglomérations israéliennes en Cisjordanie ? Et qui a raison au sujet de la Controverse de Nétzarim entre Saint Enderlin et Baal-Zebud (pouah !) Ména ?

 

En répondant : "colonies", on classe définitivement le différend israélo-arabe dans la catégorie oppresseur-opprimé. On s’assure ainsi que le candidat n’écrira jamais un papier en faveur d’Israël, dût-ce être l’un de ses nombreux savants qui trouvera le remède contre le cancer.

 

En exigeant la réponse : "Saint Enderlin, évidemment", on s’assure que le nouveau venu acceptera de corrompre sa plume en dévoyant, si nécessaire, la vérité afin de n’avoir de cesse de présenter Israël comme une créature monstrueuse devant être éliminée.

 

J’exagère ? Même pas. Le second écueil dans la lutte contre l’antisémitisme participe de la reconnaissance – je sais, je suis islamophobe, c’était couru d’avance – d’un problème concernant l’islam en France.

 

Mais dans ce pays qui manque plus que tout autre chose de nuances, encore faut-il expliquer que traiter de ce problème ne signifie pas que l’on déteste les musulmans ou que l’on entende les chasser hors de l’Hexagone. Naaan, se pencher sur un problème, en le prenant au corps, c’est uniquement se donner les moyens de le solutionner. Tandis que l’ignorer, c’est semer la violence et ouvrir l’autoroute du pouvoir à Marine Machin.  

 

Patricia La Mosca, qui passe le plus clair de ses journées dans les territoires perdus de la République, témoigne de ce qu’il existe un très grand soutien dans les banlieues pour l’Etat Islamique, de nombreux musulmans considérant à la fois qu’il applique le coran comme il est juste de le faire, et qu’il est la seule organisation à protéger l’honneur des croyants.

 

Ces constatations sont encore compliquées par la prophétie selon laquelle l’islam doit gouverner le monde, et que c’est à la fois son avenir et celui du monde.

 

La Mosca se refuse de se livrer à des statistiques qu’elle n’a pas les moyens de réaliser, mais affirme que le soutien au djihadisme, à l’EI, à l’antisémitisme-base, sans discernement ou exceptions, allant de Michel Drucker à Nicolas Sarkozy, Patrick Bruel et jusqu’à Netanyahu touchent une partie importante de la population immigrée. Elle invite les sceptiques à venir consulter les murs de n’importe quelle banlieue et à consulter les graffitis. A écouter les discussions de cafés, dont les femmes sont de plus en plus exclues, et à regarder les expressions du fondamentalisme – voile intégral et prières de rues – qui vont sans cesse s’amplifiant et se radicalisant.

 

Si ce gouvernement ou le suivant entend sérieusement réduire l’antisémitisme en France, à eux de s’attaquer aux vrais problèmes qui le constituent. Sinon, les Israélites, qui ont la clairvoyance de ne pas écouter le double discours des politiciens, et qui ont aujourd’hui le choix de leur lieu de vie, vont accélérer le rythme de leurs départs vers Israël. Valls a dit que la France sans les Juifs ne serait plus la France. Et Patricia La Mosca, qui n’est pas juive et pas de droite, affirme qu’elle n’a pas envie non plus de vivre dans l’avatar de la France qu’est en train de devenir son pays, et que des millions de ses concitoyens, en particulier des jeunes, n’ayant strictement aucune sympathie pour le Front National, envisagent aussi de foutre le camp.

 

"Ce ne sont pas", dit Patricia, "les leçons d’un civisme frelaté, administrées par des barons repus de la presse qui ne sont plus en phase avec la réalité, qui vont résoudre les problèmes de la France".  

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Excellent article. Tout est dit. Enfin un VRAI travail journalistique.

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