FRANCOIS PUPPONI : "LA FRANCE A UN PROBLÈME AVEC SON ANTISÉMITISME"

FRANCOIS PUPPONI : "LA FRANCE A UN PROBLÈME AVEC SON ANTISÉMITISME"

 

"Je pense que globalement, ce pays a un problème avec son antisémitisme, et qu'on n'arrive pas à gérer ce sujet-là", a reconnu dimanche le député du Val-d'Oise et ancien maire de Sarcelles, François Pupponi, interrogé par Elie Chouraqui dans son émission "Elie sans interdit" sur i24NEWS, dédiée à la problématique de l'antisémitisme en France.

Reconnaissant d'une part que "la France n'est pas antisémite mais qu'il y a des antisémites", le député a souligné que le passé collaborationniste de certains Français et de l'administration française, prenant pour exemple la rafle du Vel d'Hiv, a "laissé une tache indélébile sur notre histoire, la France a honte quelque part, a peur, et donc ce sujet-là nous empêche d'avancer". Face à cela, il existe également une culpabilisation "vis-à-vis des communautés musulmanes qu'on a pu coloniser", a-t-il ajouté.

"Je pense que le vrai problème qui est à la source de toutes ces fractures et de l'antisémitisme, c'est le délitement de la République, il faut que le modèle républicain se ressaisisse. Ce serait la solution à l'antisémitisme et à tous les autres problèmes", a pour sa part estimé Noémie Halioua, journaliste, et auteur de "L’affaire Sarah Halimi".

Le Premier ministre français Edouard Philippe a dénoncé en janvier "une nouvelle forme d'antisémitisme violente et brutale". Ce constat alarmant a été par la suite appuyé par un bilan de la place Beauvau publié début février qui a révélé d'une part la diminution des actes antisémites en 2017, mais d'autre part une augmentation de 26% des actions violentes visant les Juifs.

Cet antisémitisme trouve ses racines dans "des vieux clichés très enracinés qui remontent à loin", "qu'on retrouve sur les réseaux sociaux" et qui "alimentent cet antisémitisme du quotidien", a jugé Frédéric Potier, préfet et délégué interministériel à la Lutte Contre le Racisme, l'Antisémitisme et la Haine anti-LGBT (DILCRAH). "Je crois que les clichés sur le complot juif, sur le Juif qui possède de l'argent, sur le Juif qui est dans les médias, sont encore aujourd'hui à l'œuvre" et se trouve en "arrière-fond" de ce que l'on nomme le nouvel antisémitisme, a-t-il précisé.

Une hypothèse soutenue par M. Pupponi qui a affirmé être confronté quotidiennement a un antisémitisme lié à la "souffrance sociale" de gens qui "considèrent que le Juif, lui, a tout, qu'il n'a pas de problèmes, qu'il a de l'argent, donc ce n'est pas normal". "Il y a une sorte de haine, de jalousie qui se transforme parfois en violence extrême".

"Pour moi il y a deux antisémitismes: l’antisémitisme chrétien, d'extrême droite, on en voulait aux Juifs parce qu'ils avaient tué le Christ, et il y a l’antisémitisme d’aujourd’hui qui est un antisémitisme arabo-musulman d’importation qui n’a rien avoir avec l’histoire de France", a pour sa part jugé Mme. Halioua.

Selon l'ancien maire de Sarcelles, ces deux définitions restent encore une fois liées pas une même origine: "C'est ça qui est terrible dans l'histoire de l'Humanité, c'est que les deux autres grandes religions monothéistes considèrent que les Juifs sont responsables de tout. Globalement c'est toujours la même histoire: ils ont tué le Christ, ils sont en Israël aujourd’hui donc ils ont pris notre terre, ils font du mal aux Palestiniens, ça remonte de très loin. Donc la genèse antisémite est la même, après chacun habille son antisémitisme comme il le veut".

Evoquant les données de l'Etat concernant les actes antisémites, M. Potier a toutefois relevé que les chiffres évoqués étaient imparfaits, car "quand on est victime d'insultes, il est parfois difficile d'aller porter plainte. "On n'est pas suffisamment bien accueilli", justifie-t-il par un manque de formation des policiers, des gendarmes et des magistrats.

"C’est que la France a un problème avec son antisémitisme", a aussitôt rebondi M. Pupponi. "Je ne dis pas que la France est antisémite, mais il y a des antisémites en France. Trouvez-moi un délit où il faut que ce soient les victimes qui dénombrent le nombre d’actes dont ils ont été victimes. Il n'y a que l’antisémitisme!", a-t-il martelé.

L'écrivain, Morgan Sportès, auteur du livre "Tout, tout de suite", questionné sur l'origine de cette résurgence de l'antisémitisme, explique en partie ce phénomène par la crise économique actuelle, basée sur une "ère du vide". "Ces jeunes générations décervelées", sont "dans le vide donc ils se remplissent de n'importe quoi, ils cherchent une cause, et une transcendance", a-t-il analysé. "Ils sont dans la nullité, dans une vie misérable. Ils étaient en taule à 15 ans et en sortent à 20. Ils ne trouvent que des boulots minables, ils trouvent des stages minables", a-t-il renchéri.

Cette "frustration", comme l'a décrit ensuite Mme Halioua, engendre le retour du religieux dans la société, a poursuivi M. Pupponi, qui a constaté la disparition progressive du "vivre ensemble" notamment dans les écoles des France, et de l'amplification du communautarisme.

"Pourquoi notre pays n’est pas capable d’ouvrir les yeux, de comprendre ce qu'il se passe et de réagir ? On a un problème je pense avec l’islam en France. On ne sait pas aborder le problème de l’islam. La France n’a pas été capable de mettre en place un dialogue avec la communauté musulmane de France. Et à l’intérieur de cette communauté, des réseaux rigoureux et radicaux se développent et les choses sont en train de déraper. Et la France est incapable de réagir", s'est-il insurgé.

Pour Mme Halioua, cette "omerta" s'explique par la "une crainte de stigmatiser les musulmans et de faire monter le Front national". "Je pense que les gens ont peur de mettre de l'huile sur le feu", a souligné M. Sportès, "j'ai l'impression qu'on revient à cet espèce de délire des guerres de religions, et ça fait vraiment peur !".

"En 2018 on est trop faibles, parce que notre république est faible aujourd'hui", a estimé M. Pupponi, réclamant des règles pour les musulmans de France, au même titre que le judaïsme et le christianisme qui ont été encadrés par des lois françaises.

"Aujourd’hui pour être rabbin ou prêtre en France, on respecte des règles. Aujourd'hui en France n’importe qui peut devenir imam", a-t-il dénoncé.

"Ce n'est pas une honte de mettre des règles, c'est une République forte qui dit que si on veut continuer à vivre ensemble il faut que chacun respecte des règles", a-t-il conclu.

 

Source : i24news

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