Le Liban face aux tensions régionales au Moyen-Orient
David Bensoussan
L’auteur est professeur de sciences à l’Université du Québec
L'Iran : acteur clé des turbulences régionales
L'Iran joue un rôle central dans l'instabilité du Moyen-Orient, nourrissant des ambitions religieuses et stratégiques visant à éradiquer Israël, territoire historiquement revendiqué par l'islam et considéré comme ne pouvant être régi par une entité non islamique. Parallèlement, la République islamique cherche à affaiblir l'influence géopolitique des États-Unis, perçus comme une puissance "satanique", tout en poursuivant son rêve de restaurer son antique stature impériale régionale.
L'Iran s'appuie sur des réseaux de milices et de groupes armés implantés en Irak, en Syrie, au Liban, à Gaza et au Yémen, prolongeant ainsi son influence déstabilisatrice. Il affronte également une rivalité séculaire avec les communautés sunnites, stimulant ainsi des alliances pragmatiques entre Israël et plusieurs pays sunnites soucieux de contenir l'encerclement iranien.
La course de Téhéran vers le nucléaire a poussé la communauté internationale à signer l'accord des 5+1, qui prévoyait la levée partielle des sanctions économiques en échange d'une surveillance des installations nucléaires. Cependant, la coopération iranienne avec l'Agence internationale de l'énergie atomique est restée partielle, renforçant les doutes sur les véritables intentions iraniennes. Les fonds débloqués par cet accord n'ont pas été dirigés vers le bien-être de la population iranienne, mais ont servi à armer les milices pro-iraniennes dans la région.
En avril et octobre 2024, l'Iran a intensifié les hostilités en lançant des centaines de missiles balistiques sur Israël, en grande partie interceptés par les défenses israéliennes. Les représailles israéliennes du 25 octobre ont ciblé et affaibli le système de défense iranien aux abords des centres nucléaires, des installations pétrolières et des usines de fabrication de carburant solide pour les missiles balistiques, ouvrant la voie à des frappes potentielles plus ciblées et dévastatrices.
Le Hezbollah au Liban : un État dans l’État
Au Liban, le Hezbollah, fort de 150 000 missiles, est une milice qui incarne un État parallèle répercutant les objectifs de l'Iran et paralysant la scène politique nationale. Le 8 octobre 2023, le Hezbollah s'est joint au conflit contre Israël, suivant l'attaque meurtrière du Hamas qui a coûté la vie à 1 200 Israéliens et entraîné la capture de 250 autres. Les assauts répétés du Hezbollah ont provoqué des pertes humaines et le déplacement de 70 000 Israéliens.
En réponse, Israël a mené une campagne de destruction de grande ampleur contre les bases de missiles du Hezbollah, réduisant considérablement son arsenal. Les infrastructures souterraines du mouvement chiite à Beyrouth et les institutions financières liées aux fonds iraniens ont été également visées. Les incursions israéliennes au Sud du Liban ont démantelé des cachettes et des tunnels destinés à des attaques futures ainsi que les postes d’observation, marquant un tournant stratégique. Plus d’un million de personnes du Liban du Sud ont migré vers le nord du pays.
Le Hezbollah affaibli a récemment laissé entrevoir la possibilité d'une trêve distincte de la situation à Gaza, signe de la pression exercée sur cette organisation. Le gouvernement libanais, quant à lui, se dit prêt à honorer un cessez-le-feu, bien qu’il n’ait pas respecté les clauses de la résolution 1701 de l’ONU lors des précédents accords.
Au Liban, de plus en plus de voix s’élèvent contre l’emprise du Hezbollah sur les destinées du pays.
Israël : une stratégie de défense affirmée
Israël admet aujourd'hui que la permissivité passée qui a permis au Hezbollah de constituer un arsenal conséquent a été une erreur stratégique. Pour Israël, la neutralisation de cette menace est devenue impérative. L'Europe et les États-Unis se félicitent de la réduction du risque posé par les missiles du Hezbollah, dont la portée menace également le continent européen. Par ailleurs, Israël a prouvé sa capacité à contourner les systèmes de défense russes S-300, affaiblissant leur crédibilité, un facteur rassurant pour l'Occident.
Israël semble déterminé à agir en regard des ambitions nucléaires iraniennes indépendamment de l'aval de l'administration Biden si Téhéran persistait à l’attaquer.