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Moi, juive d’Afrique du Nord, par Chochana Boukhobza
Victimes de la barbarie nazie, nous voici piégés par les barbares islamiques qui nous dénient le droit de vivre, quel que soit le pays choisi, Israël ou ailleurs. Je me suis longtemps tue, perdue dans le récit des Femmes d’Auschwitz. Mais j’ai suivi la guerre, les incohérences des soulèvements, manifestations, flambées de haine de nos rues. J’ai vu mes amis vaciller d’indignation, de stupeur, de colère ou de rage, mes amis livides de chagrin, impuissants à faire taire le tam-tam et les vociférations. J’ai moi-même arraché dans les rues, des affiches qui me brûlaient le cœur, qui insultaient mon âme, qui me tuaient à petit feu. Le 7 octobre était partout, à Paris, Londres, Berlin, New York, et ce n’est pas fini, semblable à un tsunami, une deuxième vague se prépare, je le sais, j’en suis sûre. Mais je sais aussi que nous sommes désormais plus nombreux à nous être ressaisis, à décider de prendre la parole, à vouloir combattre, quitte à nous faire boxer, quitte à nous faire isoler professionnellement, socialement. Oui, nos rangs se sont reconstitués, vaille que vaille. Il faut du temps pour se fabriquer une armure, du temps pour manier l’ironie, du temps pour se dire, deux mille ans d’accusation de déicide ont été remplacé par celle de génocide. Est-ce qu’on va finir par nous lâcher les baskets un jour ? Est-ce qu’on va enfin comprendre que nous avons donné au monde les plus grands chercheurs, médecins, poètes, musiciens, tant de prix Nobel, tant de philosophes, de mécènes, mais que cela ne suffit pas, ne suffira jamais, nous serons toujours poursuivi par la haine, la jalousie, la rancœur, toujours accusés du pire, alors que c’est nous qui avons traversé ce pire, perdus nos familles, nous qui avons été démembrés génération après génération.
Un CPI qui s’est enraciné dans le pays de l’apartheid, et on se demande bien pourquoi, pourquoi dans ce pays et pas ailleurs. Procureur de la CPI, Madame Fatou Bensouda, procureur de la Cour Pénale internationale, Monsieur Karim Khan… Vous voyez ce que je veux dire ? Les cinq États parties qui ont déféré la situation dans l’État de Palestine : l’Afrique du Sud, le Bangladesh, l’État plurinational de Bolivie, les Comores et Djibouti… Non mais, je rêve, là je rêve…. On dirait à l’envers, la visite de la Croix Rouge internationale à Terezin…
On nous a chauffé les oreilles (je dis nous, car Israël et les juifs de la diaspora sont dans le même bateau, sionistes ou non sionistes, sans distinction, rappelez-vous le martyr de la pauvre Madame Sarah Halimi) avec l’accusation de « déplacement de la population », donc il aurait fallu bombarder les Gazaouis dans leurs maisons ? On nous a accusé d’affamer et d’assoiffer les Gazouis, mais Israël a fait entrer des centaines de camions à Gaza, et quel peuple, citez-moi en un, un seul, quel peuple a nourri son ennemi, alors qu’il envoyait au combat, sa jeunesse, ses forces vives ? Car ces camions de vivres, ne sont pas des dons de la Croix rouge, (on sait bien qu’elle ne fait rien, celle-là), mais des camions de vivres donnés par Israël.
Il nous fallait des preuves pour démonter le mensonge et des images surtout. Or les seules qui sont parvenues jusqu’à nous durant ces seize mois de guerre, sont les ruines des maisons de Gaza, et les images en noir et blanc enregistrées par drones, de terroristes éliminés.
Désormais, depuis que Hamas a accepté de libérer les otages, nous savons à quelle propagande nous avons eu affaire, nous avons vu des armes, des autos flambant neuves, des terroristes bâtis comme des colosses, et des foules ni amaigries, ni décharnées, ni vacillantes, ni tremblant sur leurs pieds. Mais des otages dans un état pitoyable. Et avec nous, le monde a vu, et certains commencent à comprendre qu’ils ont été roulés dans la farine, même si la haine du juif reste aussi vivace, qu’énigmatique. Le monde a vu l’association Hamas, Djihad islamique qu’il a combattu à Mossoul. L’idéologie reste puissante, mais c’est notre faute, notre faute d’avoir considéré dans nos pays, comme fou, celui qui maniait le poignard, qui jetait des voitures bélier dans la foule, qui égorgeait nos professeurs, nos dessinateurs, notre jeunesse dansante au Bataclan.
Moi, juive d’Afrique du Nord, dont la famille a éjectée parce que juive, je sais une chose sûre, une chose que les barbares ne savent pas ou dont ils n’ont encore pas pris conscience : les juifs qui seront repoussés de leurs pays natal, iront renforcer Israël, malgré la guerre. Et en refusant aux soldats israéliens qui se sont battus depuis le 7 octobre, le droit de circuler dans le monde, vous les renforcerez dans leur détermination de se battre jusqu’au dernier, jusqu’au bout pour défendre le bout de terre sur lequel ils vivent.
Voilà, j’ai dit.
Et je ne me tairai plus.
Les images insoutenables de la restitution des otages exigent qu’on monte en première ligne désormais.
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