Le Duden, célèbre dictionnaire allemand, recommandait il y a quelques semaines dans son édition internet de ne plus utiliser le terme « Juif » (Jude en allemand), « perçu comme discriminatoire », et prônant plutôt des expressions telles que « personnes juives », « concitoyens juifs », ou « personnes de confession juive ». Après tout un débat sémantique et une controverse, la rédaction est finalement revenue sur sa décision.
En effet, bien que le mot « Jude » ait pu être vu et utilisé comme une insulte pendant la période nazie, la décision du Duden a été rejetée en majorité, a rapporté La Croix.
Début février, Daniel Botmann, directeur du Conseil central des Juifs, écrivait ainsi sur les réseaux sociaux : « Peut-on dire Juif ? Oui ! S’il vous plaît, pas de ‘concitoyens juifs’ ou de ‘personnes de confession juive’. Simplement JUIFS. Merci ! »
Jüdische Allgemeine, un média juif allemand, a lui aussi rejeté la position du dictionnaire, écrivant que « ce sont plutôt les non-Juifs qui trouvent ‘discriminatoire’ le terme ‘Juif’ et qui sont mal à l’aise à l’idée de prononcer ce mot – ‘à cause du souvenir’ et caetera. »
Mgr Ulrich Neymeyr, président de la sous-commission pour les relations religieuses avec le judaïsme de la Conférence épiscopale allemande, a, pour sa part, avancé que « ne pas désigner un Juif comme Juif serait une capitulation devant l’abus du mot ».
Une porte-parole de Duden, interrogée par le journal allemand Bild, avait justifié le choix des équipes du dictionnaire par une analyse de données linguistiques. « Selon nos estimations, des alternatives de désignation sont recherchées, notamment par les hommes et les femmes politiques, en raison de la connotation négative du mot ‘Juif’ (par exemple son utilisation comme terme injurieux) », a-t-elle déclaré.
Face à la controverse, le dictionnaire a finalement fait marche arrière mi-février, modifiant à nouveau sur son site la définition. Ainsi, la nouvelle précise que « les mots Juif/Juive font l’objet de discussions depuis des décennies au sein de la communauté linguistique » et que « le Conseil central des Juifs en Allemagne, qui porte lui-même le terme dans son nom, se prononce en faveur de son utilisation ».