
Circoncision rituelle à Bordeaux : deux médecins suspendus après la mort d’un nourrisson
Par Marie-Hélène Hérouart, Le Figaro Bordeaux
Le 25 mai, un enfant de deux mois est décédé des suites d’une circoncision organisée à Bordeaux par le Centre de circoncision rituelle. Deux de ses médecins ont été suspendus par le conseil national de l’Ordre des médecins, mardi dernier.
Dans la religion juive, la tradition veut que les jeunes garçons soient circoncis dès le huitième jour après leur naissance. Appelé «brit milah», ce rite est le plus souvent réalisé par un rabbin circonciseur. Une pratique religieuse qui n’est, en principe, soumise à aucune loi. «Des médecins jouent sur cette ambiguïté, en faisant valoir leur statut, pour réaliser des circoncisions rituelles qui sortent du champ médical», a déploré mardi dernier le conseil départemental de l’Ordre des médecins de la Gironde.
Et pour cause : le 25 mai 2022, un nourrisson de tout juste deux mois est décédé des suites de sa circoncision lors d’une session organisée à Bordeaux par le Centre de circoncision rituelle. Plusieurs plaintes ont également été déposées par des familles contre un deuxième médecin de cet organisme auquel l’Ordre reproche d’avoir pratiqué des circoncisions ayant «entraîné des douleurs atroces» sans avis ni suivi médical et sans prescrire des antalgiques aux enfants. Ces deux médecins ont été suspendus par le conseil départemental de l’Ordre des médecins pour une durée de trois ans, mardi 27 mai. Le premier est visé par une information judiciaire ouverte en 2022 par le parquet de Bordeaux pour «homicide involontaire», tandis que le second devra répondre du chef de «blessures involontaires» envers sept enfants.
Un nourrisson décédé
Selon nos sources, la séance du 25 mai 2022, après laquelle un nourrisson est mort, s’était déroulée dans une villa louée à cet effet, comme d’ordinaire. La plupart des enfants présents ayant largement dépassé l’âge de 8 jours (âge auquel un nourrisson ne se souviendrait pas de la douleur de la circoncision selon les mœurs juives), un médecin généraliste était présent. Il a prodigué des anesthésies aux enfants.
Or, bien que ce docteur soit juif, son statut de médecin l’oblige à respecter les lois de la médecine, même dans le cadre d’une tradition religieuse. C’est à ce titre que l’Ordre des médecins lui a interdit d’exercer pour trois ans en lui reprochant d’avoir pratiqué une anesthésie qui «excédait sa compétence» et «ne pouvait être mise en œuvre que sous la responsabilité d’un médecin anesthésiste-réanimateur». L’instance a retenu également le manque de moyens techniques, notamment de réanimation, à disposition dans les locaux utilisés.
Une accusation que ce médecin généraliste conteste, estimant qu’il était parfaitement compétent pour effectuer ce geste qu’il qualifie d’anesthésie locale. Il prévoit ainsi de déposer un recours au Conseil d’État pour faire lever sa sanction. «Je suis médecin depuis 47 ans et ce n’est pas pour tuer des gens. J’ai été très attristé par ce décès. Perdre un enfant, il n’y a pas pire», a-t-il ainsi confié au Figaro, en refusant toutefois de commenter la procédure en cours. Contacté, le Centre de circoncision rituelle (qui continue à pratiquer dans plusieurs villes de France) a refusé de répondre à nos questions.