Conte et légende de TUNISIE - LA DAME NOIRE, par Albert Simeoni

Conte et légende de TUNISIE.

LA DAME NOIRE.

Vous connaissez tous l’histoire de la DAME BLANCHE, cette apparition que certains automobilistes ont rencontré sur leur parcour par certains soirs d’hiver. Mais vous ignorez qu’il existait aussi il y a très longtemps LA DAME NOIRE , elle sévissait autrefois dans le quartier de juif de la HARA.

Elle apparaît dans les années noires, qd la HARA vivait dans sa misère et de son indigence.

Par un matin d’hiver, Rina, qui élève une marmaille, ne pouvant offrir à ses enfants, des plats ‘de riches’, leur servait souvent des ragoûts qu’on appelle ‘plat de rassasiement ou de consistance’, des plats simples, de semoule, de pois chiches. La pomme de terre prenait une place importante pour gaver ses petits ventres, qui loin de gémir, se contentaient de ce que leur maman cuisinait. Le seul morceau de viande était destiné au CHABATH..Les boulettes étaient sans viande, la farce, comme on dit chez nous, était FALSSOU. Hachich ( herbes)

Le 17 janvier 1899...Alors qu’elle descend faire son marché sur la place dite ‘...Batha Chloumou’...Rina remarque un vieil homme assis dans un coin de la rue Nej el DIN...Devant cet honorable monsieur, habillé d‘une ‘cachabiyé’, un marchand ambulant de légumes, assez usé, elle remarque une botte de salade qu’elle ne connaît pas. Elle lui pose la question ‘...Yé BABA , qolli e’di ech’noué … ? ( Papa, c’est quoi ces feuilles vertes…?) Le vieux ‘...Mé nédri aliyé yé mimti, jari mché léb bléd ou jebli zouz qatat… !’( Je n’en sais rien pauvre dame, mon voisin vient d’arriver du bled et m’offre ces deux bottes…!) ‘...Lél bïe… ?’ ( Elles sont à vendre…?) ‘..Eye, sourdi… ! ( Oui un sou) Rina paie sans savoir ce qu’elle a acheté. Elle se dit qu’une nouvelle salade relèverait le quotidien de sa famille. Elle rentre chez elle, pose son filet dans un coin et oublie les salades. Trois jours plus tard, elle se rappelle de son filet et de ses deux oubliés. Qui ont entre temps ont séchés. Elle réfléchit et elle décide, comme guidée par une voix intérieure, de les piler au maximum. Yed merej fi yédé, ou RINE terhi ( un manche à pilon dans sa main et notre dame, pille) Au bout d’une demi heure, elle obtient une poudre verte.

‘...Ech béch nââmel biyé él ghabra e’di… ? ( Que vais je donc faire avec cette poudre )...Elle réfléchit et toujours inspirée par son instinct de très bonne cuisinière, elle se dit qu’elle va la cuire.

Elle verse deux cuillères d’huile d’olive dans la poudre puis s’arrête...elle obtient une soupe noire liquide. Aucun goût. Elle pense encore et elle reconnaît qu’il lui faut bcp plus de cette plante. Elle redescend et combe de chance, le vieux était tjs assis à la même place et là, dix bottes de salade sont étalées à ses pieds. ‘...Quadech… ? (combien… ? )Sourdi ou ness… !’ Un sous et demi. Elle les prend toutes et se met au travail. Elles laissent sécher son achat durant une semaine. Puis, elle pile ses bottes. Elle obtient 400 grammes de poudre verte. Elle refait la même opération, faite initialement sauf que là, elle rajoute une gousse d’ail, une autre cuillère d’huile, un peu de tomate écrasée, un pincés de sel, chwiyé kamoun, tchiché harissa et comme on dit chez nous ‘..TEQLA AALA RABI… !’ (Elle s’en remet à D ieu) Elle laisse mijoter le tout sur le feu let au bout de trois heures de cuisson, elle obtient une texture toute noire. Assez épaisse. Elle goûte et et là, elle risque de tomber à la renverse.

L’odeur de ce ‘ragout’ va se nicher dans les narines de sa voisine. Rina lui fait goûter la sauce noire. l’autre est émerveillée par ce velouté. ‘..Loucen djid tarf merguej… ? Et si tu rajoutais un bout de merguez… ?’ Si tôt dit sitôt fait. Le soir, la famille découvre avec ébahissement ce nouveau ragoût. Rina est au comble de la joie, enfin, elle va diversifier le menu de la famille. Surtout que son ragoût se mange avec le pain et avec les doigts.
La voisine peu discrète, se confie à son autre voisine ‘...Loucen taref chnoué doqt âand Rina teoué tébel...Shan eqhal… !’ ( Si tu sais ce que j ‘ai goûté chez Reine, tu deviendra folle,..Un ragout noir ) !’ L’autre Taita, dure d’oreille comprend MRAA KAHLE… ! (Une dame en noire.)..Au bout d’une semaine, tout le quartier de la HARA s’en émeut, il voulait apercevoir la DAME EN NOIRE sortir de chez RINA.

La rumeur s’amplifie et certains hommes, bien inspirés, font le guet devant la maison de RINA pour croiser cette fameuse dame en noire. Hélas, point de dame en noire. Mais notre RINA, profitant de la rumeur, demande à son beau frère FRAJI de lui prêter son local pour ouvrir une petite gargote. Le bof accepte et RINA deux mois plus tard, ouvre un petit resto à l’enseigne ‘..MRAA EL KAHLE… !’ Et comme tout ces hommes, voulaient voir cette créature, ils ont tôt fait de déchanter mais une fois assis et voulant à tout prix l’apercevoir, Rina profitant de leur crédulité, leur servait un plat de LA DAME EN NOIR…( Sourdi) .Mais revisitée . Elle rajoutera plus tard, qqs feuilles de laurier dans sa cass’driyé ( sa grande marmite) Son plat devient célèbre à tel point que son affaire prospère au-delà de ses espérances. Elle changea au bout d’un an l’enseigne de sa boutique pour devenir ‘...DAR EL MLOUKHIYE… !’

Ainsi est née LA MLHOUKHIYE.

PAR ALBERT SIMEONI. BREITOU
CONTE ET LÉGENDE DE TUNISIE.

Commentaires

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53 années 8 mois
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Un grand merci ,pour ce partage, un voyage dans les années de ma tendre enfance, belle histoire avec une moralité, qui donne a réflechir ,

Connaissez vous le plat fed el hajalla ? El dfina ? 

bonne journée Monsieur ,encore merci 

Cordialement 

Linda

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