Israel, la Russie et le reste du monde. Les faits, l’analyse et les photos

Israël, la Russie et le reste du monde. Les faits, l’analyse et les photos (012909/18) [Analyse]

Par Stéphane Juffa © Metula News Agency

 

Avec Jean Tsadik et Michaël Béhé

Cela a pris quelques jours mais nous sommes maintenant capables de répondre à la quasi-totalité des questions émanant des évènements du 17 septembre, de l’attaque par l’Armée de l’air israélienne (Khe’l Avir) d’objectifs à Lattaquié en Syrie et de la suite d’occurrences ayant conduit à la perte d’un avion de reconnaissance russe de type Iliouchine 20.

 

Plus que cela, nous avons réuni et créé des photographies et des cartes illustrant ces situations et, et c’est encore plus important, nous avons percé à jour leurs mobiles politiques et stratégiques.

 

Tout commença, quelques heures avant le raid des Hébreux, par un accord conclu entre Vladimir Poutine et Recep Erdogan, à l’issue duquel le président russe renonça à son opération militaire murement préparée, qui avait pour but de réduire la poche d’Idlib. Les quelques 80 000 combattants qui s’y opposent au régime de Bashar al Assad, de même que trois millions de civils syriens, sont temporairement épargnés. La Pax Poutina ne règnera pas totalement sur l’essentiel des parties significatives de la Syrie, et cela constitue un amer revers pour le Tsarévitch.

 

Nous avions à élucider les raisons de cette volte-face et c’est désormais chose faite. Craignant une opposition bien plus efficace que lors des opérations anti-rebelles précédentes, l’Armée gouvernementale syrienne avait préparé et amené à proximité du front des quantités de gaz chlorin, dont elle entendait faire un usage intensif en vue d’anéantir rapidement la résistance adverse.

 

Déjà Moscou s’évertuait à dénoncer a priori les soi-disant subterfuges qu’invoqueraient les rebelles afin de "persuader la Planète" que les gouvernementaux utiliseraient ce gaz de combat. C’était sans compter avec les renseignements accumulés par les Occidentaux et leur détermination à intervenir à nouveau dans le confit si Assad allait au bout de son intention.

 

Les Occidentaux, particulièrement les Américains et les Français, avaient publiquement articulé cette menace. Considérant le risque que le maître du Kremlin est parfois dur d’oreille, les bâtiments de guerre de la Coalition Occidentale effectuèrent le même jour des tirs d’avertissement en direction des concentrations de gaz chlorin aux abords des villes d’Homs et de Hama, à 70km environ de la côte méditerranéenne. Cela explique le relevé russe de tirs de missiles à partir de la frégate française Auvergne. Il y en eut probablement d’autres, depuis les airs ou des navires de l’OTAN, notamment britanniques, nombreux sur zone.

 

Or en dépit du déploiement d’une armada considérable dans le bassin oriental de la Méditerranée, il était clair que les forces occidentales disponibles dans la région surpassaient celles de Vladimir Poutine. On a compté une trentaine de navires ultramodernes de la Coalition à distance de frappe de la Syrie ; ce, encore sans compter les flottes U.S. et leurs porte-avions, alors que les Russes ne disposent pas de porte-avions opérationnels.

 

Dans ces conditions, le Tsarévitch, qui est téméraire mais pas suicidaire, n’allait pas risquer un engagement armé. Même s’il laissait les Occidentaux tirer sans intervenir, comme lors de leur intervention précédente à la mi-avril dernière, la preuve serait apportée que ses compagnons d’armes, Assad, les Iraniens et le Hezbollah, auraient eu recours à des gaz de combat, en dépit de toutes les assurances que Poutine avait personnellement données.

 

Dans le même temps, les Iraniens, par un hasard du calendrier ou afin d’exploiter l’attention portée à Idlib ainsi que l’état d’alerte élevée du contingent russe dans la province de Lattaquié, s’attelaient à l’organisation d’un convoi de camions. Ceux-ci avaient pour mission de transporter les armes et munitions amassées dans des entrepôts au cœur de la ville de Lattaquié vers le Liban afin de les remettre à leurs supplétifs du Hezbollah.

 

Cette cargaison comportait non seulement les missiles les plus modernes que l’industrie perse soit capable de produire, mais également, le Renseignement israélien en avait acquis la certitude, des machines-outils et des composants électroniques capables d’améliorer la précision aléatoire des missiles déjà entre les mains des Hezbollani au pays des cèdres.

 

Indépendamment de la crise d’Idlib, les deux critères rigides présidant aux décisions d’intervention de l’état-major hébreu étaient réunis : l’existence d’une menace majeure et l’urgence d’agir.

 

A Jérusalem, on savait certes qu’on allait devoir procéder au cœur du dispositif russe en Syrie, protégé par le fameux système antiaérien et antimissiles S-400 opéré par les militaires de Poutine et non par ceux d’Assad. Mais dans la capitale de l’Etat hébreu, on était plus que convaincu de disposer des contremesures électroniques protégeant les appareils du Khe’l contre cette menace.

 

C’est là un autre point capital à saisir : les soldats de Tsahal, y compris ses pilotes, ne sont pas des kamikazes. Chaque mission est conçue afin que tous puissent réaliser leurs objectifs avec succès, et ensuite, même dans le pire des scénarii possible, retourner à leurs bases sans encombre.

 

C’est ainsi que si Israël ne possédait pas les contremesures du S-400, elle n’aurait pas envisagé cette opération. Les Hébreux ont aussi développé la capacité de faire apparaître sur les écrans radars de ses adversaires, par des moyens électroniques, des chasseurs-bombardiers qui n’existent pas dans la réalité. On crée ainsi la confusion chez l’ennemi, incapable de distinguer entre les vrais avions et les faux, incapable de savoir quels sont les objectifs qui sont réellement attaqués et, par conséquent, enclin à gaspiller ses missiles dans toutes les directions.

 

Et c’est compte-tenu de ces assurances, qu’à 21h42 précisément, le lundi 17 septembre, quatre F-16 volant entre Chypre et la côte syrienne ont largué leurs missiles sur plusieurs objectifs du périmètre de la ville de Lattaquié. A 21h38, la femme officier israélienne chargée de liaison avec le contingent russe en Syrie, avait informé son interlocuteur dans sa langue maternelle qu’un "raid visant des objectifs iraniens dans le nord de la Syrie était en cours". Trop tard, évidemment, pour permettre aux soldats du corps expéditionnaire de Poutine de faire quoi que ce soit.

 

A 21h50 tous les missiles des F-16 détruisaient leurs cibles avec une précision chirurgicale et une efficacité maximum. Les photos ci-après en disent long sur les motivations de l’AFP, de ses clients francophones, mais également des media israéliens Haaretz et I24News, qui retraçaient les évènements que nous rapportons ici sous le titre emprunté à l’organe de propagande gouvernemental d’Assad [SANA], annonçant : "Syrie: le système anti-aérien intercepte des missiles tirés vers Lattaquié". C’était à peine moins triomphal que le communiqué de Spoutnik, claironnant : "La DCA syrienne aurait repoussé une attaque de missiles dans les alentours de Lattaquié".

 

Lattakie

Crédit : ImageSat International

 

lattaquie

Crédit : ImageSat International

 

S’ils entendent cesser de se couvrir de ridicule, il serait temps que ces joyeux campeurs comprennent une fois pour toutes, qu’en l’état des rapports de forces existants, à moins d’un incident extrêmement imprévisible, la défense antiaérienne syrienne ne possède pas la capacité d’intercepter un missile israélien. S’ils ne font pas confiance à la Ména, s’ils ne savent pas lire, qu’ils regardent au moins les images.

 

Toujours à propos de missiles israéliens et de photographies, et pour prolonger quelque peu cette parenthèse : lors de leurs raids, les chasseurs-bombardier du Khe’l Avir ne lancent pas des grappes de missiles. Ils n’en ont pas la capacité. Chaque engin ainsi largué a une adresse extrêmement précise – moins de 30cm du point d’impact prévu -, lors, si des missiles étaient abattus en route, les cibles ne pourraient pas être anéanties. Sur les deux images suivantes, on distingue la destruction du Boeing 747 de la compagnie Iranian Fars Air Qeshm, lors du raid précédent, le samedi 15 courant, sur l’Aéroport International de Damas. Un avion civil qui a également acheminé des armes à l’Aéroport International de Beyrouth. On observe que les avions situés à quelques mètres de distance, de même que les entrepôts, sont intacts. Les armes et les munitions contenues dans le 747 ont ainsi pu être détruites avant leur déchargement. Si nous l’avions intercepté en vol, nous aurions commis un acte de piraterie aérienne sans, de plus, avoir été en mesure de démontrer qu’il transportait un chargement militaire.

 

lattakie

Crédit : ImageSat International

 

Hariri

Sur cette autre carte, présentée cette semaine par M. Netanyahu à l’Assemblée

Générale de l’ONU, on voit les emplacements de trois entrepôts souterrains du Hezbollah

 à Beyrouth. Ils sont tous situés à moins de 800 mètres d’un terminal de fret de

l’Aéroport Rafiq Hariri, dans la banlieue chiite surpeuplée du sud de la capitale libanaise.

En cas de déclenchement d’un conflit armé, il est évident qu’Israël aurait à détruire ces

entrepôts, au risque d’occasionner de nombreuses pertes civiles. Il s’agit d’un cas d’école

d’utilisation de civils comme de boucliers humains pour la protection d’une activité guerrière

Crédit : Binyamin Netanyahu

 

Retour à Lattaquié. A 21h50, l’Iliouchine 20 de reconnaissance se trouve à plus de 200km des F-16 qui sont déjà sur le chemin du retour. A partir de 21h52, la DCA syrienne, hystérique, tire 27 missiles dans toutes les directions. A 22h10, l’un de ces missiles abat le vénérable quadrimoteur à hélices. Contrairement aux affirmations mensongères de ministère russe de la Défense, à ce moment, les pilotes hébreux sont en phase d’atterrissage sur les aéroports israéliens, à 300km plus au Sud.

 

A propos du ministère russe de la Défense et de la conférence de presse qu’il a accordée, cartes et schémas à l’appui, tout ce qui concerne les trajectoires des F-16 est délirant. On se demande à Métula si les radaristes russes, à l’instar de leurs camarades syriens, ne les ont pas vus sur leurs écrans, ou s’il s’agit d’une tentative maladroite de leurs chefs de faire diversion et tenter d’imputer, d’une manière ou d’une autre, la perte de l’IL 20 aux Israéliens.

 

La conférence de presse en question nous aura au moins été utile afin de vérifier l’information que nous avons diffusée en temps réel à l’occasion de notre breaking news, à savoir que les F-16 ont visé et détruit plus d’une seule cible à Lattaquié. Sur la carte russe [voir la photo ci-dessous], l’on distingue en effet trois objectifs atteints dans cette ville, avec la mention en russe "Frappes de 4 F-16 israéliens", avec la date et l'heure en haut, en cyrillique. De plus, l’officier qui décrit l’opération mentionne ces cibles comme des "entrepôts industriels", ce qui démontre, avec force de preuve, la collusion de Moscou avec les Iraniens.

 

target

Crédit : ministère russe de la Défense

 

Nous devons toutefois à notre tour préciser un certain nombre de choses. D’abord demander pourquoi l’Iliouchine n’avait pas activé son transpondeur spécial qui permet d’informer le sol s’il est un ami ou un ennemi. Les Syriens ne l’auraient pas visé s’il avait été correctement identifié.

 

Ensuite, nous tenons à préciser que les Russes ne sont pas neutres dans cette affaire, pas plus qu’ils ne sont les amis d’Israël ; ce sont eux qui ont équipé la DCA syrienne avec les systèmes S-200, eux qui les ont entraînés et qui ont déployé les batteries de missiles en choisissant minutieusement leurs emplacements.

 

De plus, les armes, les munitions et les machines détruits par les F-16 avaient atterri peu de temps auparavant sur l’aéroport de Khmeimim, le seul de la région, entièrement sous contrôle russe, en provenance d’Iran. Sans l’autorisation d’atterrir octroyée par les hommes de Poutine, l’assistance à l’atterrissage, l’aide nécessaire à transférer le chargement dans les entrepôts du "Centre de l’Agence des Usines Techniques" de Lattaquié, à 16km au Nord-Ouest, sans le feu vert pour le livrer au Hezbollah au Liban – l’autoroute, la N1, passe à 700 mètres de l’entrée de Khmeimim -, Téhéran n’aurait pas été en mesure d’attenter à la sécurité d’Israël avec cette cargaison, le raid israélien n’aurait pas eu lieu d’être, et l’Iliouchine et ses 15 membres d’équipage n’auraient pas été perdus.      

 

Grâce aux centaines d’interventions de Tsahal en Syrie, l’Iran n’aura pas l’opportunité de disposer d’un port et d’un aéroport militaires dans ce pays. Téhéran n’aura pas non plus l’occasion de déployer 100 000 Garde Républicains et leurs supplétifs à proximité des frontières de l’Etat hébreu, ce qui était son plan. Les ayatollahs ont de surcroît dû évacuer leur base sur l’aéroport T4 Athias-Khirbat, à proximité de Palmyre, maintes fois frappée par le Khe’l Avir.

    

Suite au raid sur Lattaquié, Vladimir Poutine a commencé à livrer des systèmes antiaériens S-300 à l’Armée d’al Assad. Il compte en déployer huit et "couvrir" de la sorte tout le territoire syrien. Cela prendra des mois jusqu’à ce qu’ils deviennent opérationnels et que les soldats syriens sachent s’en servir. Et cela ne gênera pas les activités de l’Armée de l’air israélienne, puisqu’elle est d’ores et déjà en mesure d’aveugler les S-400, plus avancés, opérés par des Russes. A un détail près : ces systèmes sont évolutifs, ce qui obligera les ingénieurs hébreux, sur la base des informations fournies par le Renseignement, de poursuivre inlassablement la mise à jour des contremesures électroniques.

 

Il en va de la sécurité et de la survie des citoyens de l’Etat d’Israël. D’autant plus que l’Iran poursuit également sans relâche le développement de son armement et, comme le Premier ministre israélien l’a démontré cette semaine à la tribune des Nations Unies, qu’il n’a pas abandonné son projet d’acquérir la bombe atomique.

 

A ce propos, la Ména diffuse ci-après et en exclusivité les cartes de l’emplacement du site nucléaire secret – dissimulé aux 5+1 lors de la signature de l’accord de juillet 2015 - en plein cœur de Téhéran. Nos cartes sont largement plus précises que celles présentées par M. Netanyahu du haut de l’estrade onusienne. Israël fait, une fois de plus, en cette occasion, le travail dévolu à l’Agence Internationale de l’Energie Atomique dans le cadre de l’accord en question. Certains confrères mettent en doute l’authenticité de la révélation israélienne, c’est leur droit, même si la démarche est saugrenue. Quant à Yukiya Amano, le directeur général de l’AIEA, c’est évidemment sa tâche d’envoyer ses inspecteurs voir ce que ce site recèle. Ce n’est pas très compliqué de s’y rendre, notre carte est suffisamment détaillée.

 

Teheran

L’emplacement du site nucléaire secret à Téhéran

Service cartographique © Metula News Agency

 

 

 

Site nucleaire

Le détail du site nucléaire secret de Téhéran

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