Le tombeau des Patriarches a Hebron

Le tombeau des Patriarches a Hebron

Ayant vécu jusqu'à l'âge de cent-soixante-quinze ans, Abraham décéda. Il fut enterré aux côtés de son épouse Sara dans un champ qu'il avait acheté au lieu-dit de Macphéla, à Hébron, à l'angle duquel se trouvait une grotte naturelle qui leur servit de sépulture. Le tombeau d'Abraham et de sa famille est évoqué plusieurs fois dans la Genèse (23, 8-19 et 25, 9-10) :

        "Après quoi Abraham enterra Sara, sa femme, dans la caverne du champ de Macphéla, en face de Mambré, qui est Hébron, au pays de Canaan (...). Abraham rendit l'âme (...). Isaac et Ismaël ses fils l'ensevelirent dans la caverne de Macphéla, dans le champ d'Ephron, fils de Mambré, le champ qu'Abraham avait acheté des fils de Heth". 

A Hébron, la tradition locale conserve depuis des millénaires un imposant monument qui abrite le tombeau supposé d'Abraham et de sa famille : le Haram-al-Khalil. Construit au Ier siècle av. J.-C. sous les ordres du roi Hérode le Grand, il est demeuré à peu près intact depuis sa construction. Transformé en mosquée au XIIème siècle, le Haram-al-Khalil constitue aujourd'hui un haut-lieu des trois religions monothéistes. Il est de nouveau placé sous la garde des musulmans et son accès est limité.

 

Le sanctuaire du Haram-al-Khalil

L'ouvrage se présente comme un bâtiment rectangulaire, dont les quatre faces aveugles évoquent davantage une forteresse qu'une tombe. L'intérieur se divise en deux vastes salles, l'une aménagée en mosquée et l'autre en synagogue. Elles renferment plusieurs cénotaphes, c'est-à-dire des cercueils symboliques ne contenant pas les corps. Les ossements véritables sont supposés se trouver dans la caverne de Macphéla, c'est-à-dire au sous-sol.

Le dallage intérieur du Haram-al-Khalil est sensé recouvrir la roche de l'énigmatique caverne. Il est percé de deux ouvertures scellées, qui constituent les entrées étroites de deux puits dont l'accès est strictement interdit. Qu'y a-t-il dans ces puits ? Seules les archives historiques permettent d'en témoigner.

 

L'intérieur du Haram-al-Khalil

Le document le plus ancien qui en fait état est le récit d'une exploration faite au temps des croisades, en 1119, par des moines augustins. Les religieux dormaient sur le sol à l'intérieur du sanctuaire, lorsque l'un d'eux nommé Arnoul sentit un léger courant d'air circulant entre deux pierres du dallage. On souleva alors les pierres, et l'on découvrit une ouverture qui s'enfonçait profondément dans la roche. Arnoul fut désigné pour y pénétrer le premier, et parvint à descendre jusqu'à une petite salle souterraine entourée de murs maçonnés. Cet espace était relié à couloir long et étroit, que le religieux suivit et qui le conduisit à une seconde pièce. De forme circulaire et de grandes dimensions, celle-ci était également maçonnée. L'espace était vide, mais l'une des pierres du sol l'intrigua. Le moine la retira et constata qu'elle communiquait avec une grotte naturelle dans laquelle il pénétra.

A première vue, la caverne semblait exempte de tout objet mobilier. Mais Arnoul repéra bientôt quelques ossements dispersés dans la poussière du sol. Il aperçut également l'entrée d'une seconde grotte, dans laquelle étaient déposés d'autres ossements humains.

Sur l'une des parois de la première cave naturelle était gravée une inscription qu'il ne put déchiffrer. Les moines appelés en renfort creusèrent derrière elle, en vain, puis ensuite dans le mur qui lui faisait face : apparut alors une cavité dans laquelle reposaient une quinzaine de jarres de terre cuite qui contenaient les os de douze personnes.

Les moines attribuèrent ces restes humains aux patriarches bibliques et à leurs descendants immédiats. Les douze personnes pouvaient être les douze fils de Jacob. Ces reliques furent lavées dans une jarre de vin et sorties pour être présentées au public dans des reliquaires ; quelques-unes furent vendues à des pélerins tandis que d'autres reprirent leur place dans la sépulture.

            Le sanctuaire bénéficia ensuite de quelques travaux destinés à en améliorer l'accès. On compléta le puits d'accès par le creusement d'un escalier, et la voûte de la pièce circulaire par le percement d'un puits étroit. Plus tard la tombe devait redevenir interdite d'accès lorsque le territoire fut repris par les musulmans en 1187.

La grotte de Macphéla ne fut pas rouverte avant 1967, lorsqu'à l'issue de la guerre des Six-Jours le général israélien Moshe Dayan tenta une nouvelle exploration, profitant d'une situation locale troublée. L'étroitesse du puits d'accès incita l'officier à engager une fillette de douze ans à qui il fournit du matériel d'exploration. La jeune exploratrice se glissa courageusement dans l'ouverture et parvint à la grande pièce circulaire décrite jadis par les moines. Elle n'y vit que trois dalles de pierre, dont l'une était gravée d'un extrait du Coran. Elle retrouva également le long couloir dans lequel elle se faufila jusqu'à atteindre l'escalier dont l'extrémité était obturée.

La jeune visiteuse ne réussit pas à aller plus loin. Elle prit des mesures et des photos, ce qui permit de dresser un plan détaillé des lieux, sans avoir pu vérifier l'accès aux caves ni voir ce qu'elles contenaient [1][2].

Une dernière exploration fut effectuée en 1983 par le docteur Seev Jevin, directeur du Service des Antiquités d'Israël, qui eut davantage de succès [3][4]. Il descella de nuit et clandestinement la pierre qui bloquait l'escalier et pénétra dans le couloir jusqu'à atteindre la grande pièce circulaire. Dans le sol de celle-ci il repéra plusieurs pierres mal agencées. Les ayant retirées, il trouva effectivement l'entrée d'une grotte naturelle, sans doute la caverne de Macphéla. Celle-ci ne contenait rien d'autre que des gravats et de la poussière, mais donnait accès à une seconde pièce de forme ovale, où il trouva des tessons de poterie, une jarre de vin et quelques ossements.

S'agissait-il des dépouilles des patriarches ? Un examen rapide des tessons de poterie montra qu'elles dataient de l'âge du fer. L'explorateur s'arrêta là, faute de pouvoir demeurer plus longuement sur place. En l'absence de preuves formelles, la question de l'authenticité des reliques de la famille d'Abraham enfouies sous le Haram-al-Khalil reste ouverte.

 

La succession patriarcale

 

            L'histoire des patriarches après la mort d'Abraham se prolonge avec celle de ses descendants. Lui et ses proches avaient mené une vie nomade et pastorale : leurs successeurs immédiats firent de même, et leur parcours est une succession de péripéties au travers desquelles le message divin se révèle peu à peu.

Le décès d'Abraham faisait de son fils Isaac l'héritier de ses biens et de sa connaissance du Dieu révélé. Isaac est surtout connu par l'épisode de son faux sacrifice, au cours duquel Dieu fait mine de demander sa vie en holocauste. Mais Isaac n'est pas sacrifié et Abraham reçoit au contraire la bénédiction divine et la promesse d'une descendance nombreuse.

Isaac eut à son tour deux fils, Esaü et Jacob. Ce dernier s'appropria par une ruse le droit d'aînesse et la bénédiction paternelle, devenant de ce fait l'héritier légitime de la future lignée. Jacob (également appelé Israël) eut lui-même douze fils qui devaient chacun former plus tard une tribu du peuple hébreu.

            L'un des fils de Jacob, Joseph, fut maltraité par ses frères et vendu comme esclave à des marchands ismaélites. Son transfert en Egypte fut paradoxalement une chance, car un destin exceptionnel l'y attendait et allait permettre à sa famille de s'établir en Egypte pour plusieurs générations (Gn. 25-36).

Références :

[1] G. Couturier : "Macpéla : tombeau des patriarches". Chronique du 14 nov. 2008 (interbible.org).
[2] N. Miller : "Patriarchal Burial Site Explored for First Time in 700 Years". Biblical Archaeology Review 11:03, may-june 1985 (cojs.org).
[3] "Hidden Until Now : Abraham's Burial Site". Koinonia House, June 1997 (khouse.org).
[4] N. Arnon : "Entering the caves of the Machpelah" (hebron.com).

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