Les Juifs de New-York, première communauté juive de la diaspora

Les Juifs de New-York, première communauté juive de la diaspora

Avec 1,6 millions de Juifs, New York abrite en 2021 la première communauté juive de la diaspora et, de fait, le centre névralgique et idéologique du judaïsme mondial. Toutes les grandes organisations juives internationales y ont leur siège ou y sont fortement représentées.

Des Juifs vivaient déjà à New York avant même que la ville ne porte ce nom. Et, surtout, c’est à New York que l’on rencontre la plus grande variété de Juifs, des orthodoxes aux libéraux en passant par les Budjews, des Juifs qui pratiquent le bouddhisme. Certains aiment dire que New York est la « Jérusalem du Nouveau Monde ».

"Vivent ici, dit Corinne Levitt, l’une des meilleures spécialistes de la question, des Américains juifs et des Juifs américains". Les premiers vivent aux États-Unis depuis plusieurs générations et sont profondément américanisés. Les seconds, arrivés plus récemment, ont conservé les mœurs de leur terre d’origine.

Certains sont français d’autres viennent d’Israël (150 000 à New York), d’Allemagne, de Pologne, de l’empire austro-hongrois, de Russie ou d’ailleurs. Ils sont de nationalité américaine ou sur le point de l’être. Pour le sociologue Michel Maffesoli, ils font partie des « tribus urbaines ».

 

Vingt-trois. Ils étaient vingt-trois, les premiers Juifs à avoir mis les pieds à New York. C’était en 1654 et la ville s’appelait alors Nouvelle-Amsterdam. Débarqués d’un navire, le Saint-Charles, ils sont très mal accueillis par le gouverneur, Peter Stuyvesant qui n’hésite pas à les qualifier de « race fourbe » et de « blasphémateurs et ennemis du Christ ». Menacés d’expulsion dès 1655, victimes de mesures vexatoires et de limitation d’activités, ces premiers Juifs font faire le gros dos et il faudra attendre la conquête anglaise en 1664 pour pouvoir se sentir un peu plus libres. Toutefois, comme la « Charter of Liberties » promulguée en 1683 n’autorisait que les Chrétiens à pratiquer leur religion en public, la première synagogue new-yorkaise, Shearit Israel, ne voit le jour qu’en 1729.

Entre 1654 et 1820, la communauté juive, certains préfèrent dire la « société juive » va se construire peu à peu. En 1820, il y a 60 000 Juifs à New York.

1821 marque un événement notable, une première : un Juif, Mordechaï Manuel Noah, membre du parti démocrate, est élu High Sheriff de New York. Il sera plus tard consul à Tunis.

Dans l’ensemble, à cette époque, les Juifs pratiquent le commerce, derrière un comptoir ou à cheval à travers les campagnes. Leur spécialité, c’est l’achat et la vente de biens en tous genres.

Entre 1870 et 1920, le nombre de Juifs va croître de manière exponentielle. Ils sont 4% de la population en 1870 et passent à 29% cinquante ans plus tard. Le commerce n’est plus leur préoccupation principale même si beaucoup se lancent dans le porte-à-porte. Les voilà qui s’impliquent dans l’industrie vestimentaire, la fabrication du verre, la confection de cigares. En 1930, la moitié des médecins, des dentistes, des avocats et des instituteurs new-yorkais sont juifs. En 1930 aussi, on voit un Juif d’origine italienne, Fiorello La Guardia, être élu maire de la ville.

Les Juifs s’impliquent désormais fortement en politique et dans le combat syndical. Ils sont très nombreux au sein des sections du parti socialiste à Manhattan et dans le Bronx et, dans les années 30, 40% des membres du Communist Party of the USA sont juifs. On parle à présent ouvertement d’un « vote juif ».

La vie juive s’organise, les synagogues se construisent et, désormais, les Juifs disposent d’un quotidien, le Forward.

D’un point de vue religieux, les Juifs de New York se répartissent entre Orthodoxes (14%), Réformés (34%), Conservateurs et Reconstructionnistes (1%). Il existe également à Harlem une congrégation de Juifs noirs, l’Ethiopian Hebrew Congregation, qui compte deux mille membres.

En 1972, pour la première fois, une femme, Sally Preisand, a été ordonnée rabbin. Le mouvement réformé s’est largement ouvert aux homosexuels et il existe en son sein des rabbins homosexuels.

Quant au hassidisme, on peut considérer que New York est la ville au monde où vivent le plus grand nombre de sectes hassidiques, formant de véritables enclaves : loubavitchs, satmars, bobovers…

Bien que les Juifs de New York se soient très tôt investis dans l’action sociale et l’aide aux défavorisés, devenant notamment les plus fervents partisans de la discrimination positive (Affirmative Action), on constate depuis quelques années un refroidissement des relations avec la communauté noire.

Enfin, dans le domaine des arts et de la culture, la contribution des Juifs de New York est exceptionnelle.

Malgré les aléas dus à l’évolution de la situation internationale et du conflit israélo-arabe, nul doute que les « enfants de Woody Allen » vivent heureux, en 2021, dans la « Goldene Medine » et que, tout compte fait, à New York, « Jewish is beautiful ».

Jean-Pierre Allali

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