JE SENS QUE JE VIEILLIS - Jacques Hadida

JE SENS QUE JE VIEILLIS - Jacques Hadida

En effet, je sens que je vieillis et cette sensation me déplaît au plus haut point.
Pourquoi devons-nous vieillir? Nous étions bien tout ce temps là.

A mon réveil ce matin, sortir de lit est devenu un exercice désagréable . D’abord, la tête qui tourne un peu et puis les pieds hésitent à se mobiliser. Au bout de vingt à trente seconde je me lève et marche très lentement vers la salle de bain. Est-ce ça le cadeau que la vieillesse n’a apporté?

Vieillir! Ce mot signifie devenir vieux, être marqué par l’âge. Il y a là une perte de force et de notre efficacité. Il parait que c’est  le moment où on acquière certaines qualités par l’effet du temps. Je pense que ceci s’adresse au vin et non à ma personne.  Quant à moi, si avec le temps je perds ma force, je deviens suranné, désuet.

Comment faire pour remédier a cette tragédie, car pour moi , c’en est une .  Me voilà , ce personage qui se croyait héroïque dans une situation de conflit. Il y a là terreur et pitié et c’est ça la tragédie. Parfois des élément comiques se présentent avec un dénouement heureux et ça devient  une tragi-comédie

Certains essaient de me convaincre que  vieillir, c’est la seule façon de  vivre longtemps , que vieillir c’est passer de la passion à la compassion , Imaginez me faire traiter de vieillerie, comme un objet ancien, usagé. Et pourtant, je continue à me poser la même question: Pourquoi partir lorsque nous sommes bien ici? Dois-je croire que la mort n’est pas la fin de tout puisqu’il y a le souvenir?

Le souvenir , celui-ci, n’est-il rien d’autre qu’une espèce d’imagination? Une imagination qui n’en finit jamais de renaître de ses cendres? Le souvenir n’est-il pas la plus formidable de toutes les forces spirituelles?

Le dicton dit bien: « si jeunesse savait, si vieillesse pouvait » . Il faudrait en somme que la jeunesse, en échange de l’expérience de la vieillesse puisse lui apporter son énergie. Oui, l’énergie , elle a la force et la puissance d’action. Oui, je sais je parle de puissance physique, ce qui n’est plus mon cas. Quel dommage!

Et voilà que la réalité me fait face. Elle ne rappelle deux personnages de notre passé qui m’ont certainement marqué. Leurs mots  ne sont guère plaisants mais plutôt réels. Je vais les mentionner pour ne libérer un peu tout en sachant qu’ils sont méchants.

Erasme me vient à l'esprit car il n'a pas mâché ses mots pour nous dire ce qu'il pense des vieux : ''Ils ne diffèrent que par les rides et le nombre d'années. Cheveux clairs, bouche sans dents, corps menu, goût du lait, bredouillement, sottise, perte de mémoire, étourderie, tout les réconcilie et plus la vieillesse avance, plus cette ressemblance s'accentue jusqu'à l'heure où l'on sort des jours, incapable comme les enfants, de regretter la vie et de sentir la mort.

Il a certainement lu Sénèque qui disait : ''Enfin, voici la vieillesse envahissante, en charge d'elle-même comme des autres et que personne ne pourrait supporter...Il reste que le mot vieillesse contient le mot vie, et nous reconnaissons que la  vie est quelque chose de fort, d'impérieux, de fascinant , de primordial, or il est question de  cette période ultime de la vie.  La sénescence n’étant qu’un affaiblissement de nos capacités physiques et intellectuelles. C’est ça le vieillissement. En veux-je? Catégoriquement NON!

Je pourrai conclure avec ce mot sympathique: La vie n’est qu’un voyage solitaire, dit le philosophe … c’est faux! la vie est un théâtre, une aventure, une mission, un devoir surtout. Nous ne vivons pas pour nous-mêmes, nous vivons pour les autres et ces autres sont nos descendants, nos prochaines générations. Nous leur préparons le chemin, nous les instruisons de nos connaissances, de nos expériences , de notre amour de la vie et surtout de notre admiration.

Jacques Hadida

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