Que se passe-t-il à Carthage? par Mustapha El Okby

Que se passe-t-il à Carthage?
"À ce jour, nul ne sait à quoi ressemblera la colline de Byrsa"
par Mustapha El Okby
Fondateur de l'Acropolium de Carthage
"Le Musée de Carthage, la place de l'UNESCO, l'Acropolium ( ancienne cathédrale Saint-Louis, Primatiale d'Afrique), le decumanus romain avec l'arche moderne qui surmonte les escaliers dont chaque marche est gravée d'une lettre de l'alphabet punique, toute la colline de Byrsa, témoin de la naissance de Carthage, dort d'un sommeil profond entraînant naturellement l'oubli de sa splendeur passée.
Pourtant des hommes de bonne volonté, humanistes dans l'âme, ont tout fait pour conserver et faire vivre ce qui restait de ce patrimoine. Peine perdue, aucune bonne volonté ne résiste à l'acier des pioches sourdes et aveugles de la bureaucratie.
Récemment, depuis 2018, semble-t-il du temps du huitième ministre de la Culture (il y en a eu dix en dix ans), le ministère compétent aidé de ses deux bras vaillants à savoir la Direction de protection du patrimoine et l'Agence de mise en valeur du patrimoine ont conclu un accord de prêt ou de don avec l'Union européenne pour le réaménagement de la colline de Byrsa. Sans doute stimulé par le réaménagement en grande partie inutile du musée du Bardo, aujourd'hui visité davantage comme mémorial que comme musée, ainsi que du fiasco arabo-stalinien de la Cité de la culture, le ministère et ses donateurs ou prêteurs se sont mis à l'ouvrage depuis trois ans.
L'encombrement des compétences et des responsabilités
Pour accomplir cette tâche, l'Union européenne a délégué deux organismes dont les champs d'activité s'étendent tous azimuts aux pays en perpétuelle voie de développement. Sans faire la fine bouche, applaudissons à cette aide sauf que cette assistance destinée à apporter savoir-faire et moyens est venue s'ajouter à l'encombrement des compétences et des responsabilités déjà en place, causant forcément antagonismes, gaspillage de temps et d'argent et autres dégâts.
Voici posé le cadre général du projet de réaménagement de la pauvre colline de Byrsa et de la mise en valeur de nos tristes monuments patrimoniaux à l'image aussi de Borj Boukhris ou Al Abdellia.
Où en est-on aujourd'hui? En dehors des réunions périodiques (photos à l'appui) entre autorités et experts, personne à ce jour, ne sait à quoi ressemblera la colline historique de Byrsa et quels sont les monuments et édifices du patrimoine destinés à être protégés et mis en valeur.
"Il est temps que l'État revoie sa politique du patrimoine"
Dans ce contexte pour le moins imprécis, il est temps que l'État revoie sa politique d'aménagement et de mise en valeur des sites du patrimoine en assumant son rôle de législateur et de bâtisseur. Comment? Les quatre points suivants permettront certainement d'enrichir la réflexion.
1. En faisant adopter le plan de protection et de mise en valeur de Carthage, qui date de plusieurs décennies et reste plus que jamais d'actualité.
2. En promulguant un statut de partenariat public-privé qui incite véritablement à l'investissement privé dans la mise en valeur du patrimoine.
3. En restructurant la Cité de la culture, abîme budgétivore, non fonctionnel.
4. Enfin, en construisant un véritable musée d'art contemporain afin de protéger et mettre en valeur les oeuvres de nos artistes et placer la Tunisie au rang des nations du monde civilisé.
Mustapha EL OKBY
Fondateur de l'Acropolium de Carthage

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