UNE JOURNÉE CHEZ KAMEL, UN SDF À TUNIS

UNE JOURNÉE CHEZ KAMEL, UN SDF À TUNIS

 

Il s’appelle Kamel, un quinquagénaire, les cheveux sel et poivre, le visage tanné par le soleil. Avec ses mains, il dessine dans l’air son histoire.

C’était un mercredi, 10h pile. J’aperçois une femme sortant d’un cabinet de médecin, monte dans sa voiture, elle démarre mais ça ne marche pas. Aucun signe de vie sur son tableau de bord. Au moment elle commence à s’inquiéter, Kamel apparait. Il dormait sous un arbre dans le coin. Il a demandé les clefs de la voiture. La femme était un peu méfiante mais pour la rassurer il a parlé en français. ‘’ Ne vous inquiétez pas madame. Je suis mécanicien’’, a-t-il lancé. 

Les mots qu’il a lancés lui ont fait oublié sa mauvaise posture. La dame lui donne les clefs. Il a réparé la voiture en 10 minutes. ‘’ C’est juste que le câble de la batterie qui est débranché, C’est rien Madame’’. Il lui a donné les clefs et il retourne vers sa demeure ‘’ ça aurait couté une fortune si c’est vraiment un mécanicien’’, a-t-il lancé.

Cette scène bizarre, m’a poussé à passer plus de temps avec ce monsieur pour savoir qui il est.

Après une brève discussion, nous nous sommes retrouvés assis sur le trottoir pour continuer la suite de l’histoire.

‘’ Je vivais en France, je travaillais dans une grande maison de voiture. Je gagnais bien ma vie. Ou plutôt j’étais riche. Un jour, on m’a appelé de Tunis pour me dire que ma mère est décédée quelques temps plus tard mon père est aussi décédé. Quand je suis revenu en France ma femme encore a rendu l’âme, tout ça en trois mois. Ma vie depuis n’a plus de sens. J’ai commencé à vendre tous mes biens à Paris. Je suis venu m’installer à Tunis pour gaspiller cet argent. Quelques mois après, la mission a pris fin. Je n’ai plus aucun sou. Le propriétaire de la maison me donne un préavis d’un mois, soit je paye le loyer, soit je quitte la maison. Le mois est très vite passé. Je me suis retrouvé gardien dans une villa d’un vieil ami juif tunisien, M.Z.

‘’C’était sympathique'‘, a-t-il lancé. Je m’occupais du jardin, j’avais ses animaux à nourrir, je m’occupais aussi des ses petits-enfants quand ils arrivent de France pour passer les vacances. Ma vie a de nouveau un sens. Mais, le destin est cruel. Un jour pendant que j’étais en train de peindre le portail extérieur de la maison, je suis tombé de l’échelle, et une nouvelle phase de misère commence.

J’étais hospitalisé pendant 9 mois. A ma sortie, j’ai découvert que mon ami M.Z est décédé, lui aussi. Ses enfants ont vendu la villa.
Voilà, je passe mon temps ici, devant la maison. Les voisins me donnent à manger. Je cherche un boulot mais sans succès parce que je n’ai pas de papiers. La nuit, un ami mécanicien me laisse une voiture ouverte, devant son garage. Je passe la nuit dedans‘’ tantôt je dors sur le siège du conducteur, tantôt sur le siège à côté ’’a-t-il lancé comme s’il se moquait de sa situation.

Après une longue discussion, il demande l’heure. ‘’15h30’’, ai-je répondu.
A ce moment, il prend son sac, il s’excuse :‘’ Je dois rentrer, je suis très en retard’’.
En se levant, il a remarqué mon étonnement par rapport à ce qu’il dit. N’a-t-il pas dit qu’il était SDF et qu’il n’avait ni famille ni job ? il est en retard par rapport à quoi ? il va rentrer où ?

‘’Nulle part’’ a-t-il répondu, comme s’il lisait dans mes pensées. ‘’ Je m’amuse à dire ça pour ne pas oublier comment vivent les gents normaux, comme le film ‘’Im legend’’ de Will Smith’’, a-t-il répondu avec un sourire laissant apparaître une dentition qui en dit long sur son vécu.

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